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Fusion et infusion !
2e Alger Jazz Meeting
Publié dans El Watan le 06 - 12 - 2009

Alger Jazz Meeting, est un événement musical organisé par l'Office Riadh El Feth, sous le haut patronage et à l'initiative du ministère de la Culture qui a voulu créer un événement musical jazz annuel. Par conséquent, offrir une tribune de choix aux jazzmen algériens et internationaux et surtout, une rampe de lancement aux artistes locaux.
Aussi, c'est une expression directe et promotionnelle des « jazzeux » algériens, à l'image de la formation de Madar. Quatre garçons dans le vent... en poupe soufflant, sifflant et « persiflant » tellement fort qu'ils amorcent une montée dans les… airs du temps et tempo jazzy. Ils sont en orbite et le Final Countdown (le compte à rebours) comme dirait le groupe Europe. Car Madar tourne très bien. Du talent brut de décoffrage incarné par le guitariste, arrangeur et compositeur, Aminoss, le violoniste Kheireddine Mekachiche, le bassiste Nadjib Gamora et le batteur Nazim Benkaci. Et puis, Madar ne fait pas dans la quadrature du cercle. Au contraire ! Un carré… d'as qui a fait « jazzer » un public averti et acquis à la fameuse « blue note », la note bleue et pas à la fausse note. Et ce, de par une carte de crédibilité déclinant des morceaux de bravoure comme Cirta 2008, El Bahdja, Le vent du Nord, Harda ou encore Maghrébine. Du jazz foncièrement fusionnel, orchestral, choral, groove, pop, jazz-rock, berouali, hard-gnaoui, andalou ou encore l'electro-raï de Sidi Bel Abbès.
Madar, pas un ovni
Un compromis d'une très bonne facture et intelligence instrumentiste malouf, chaoui, orientalisante, marocaine et voire atlasienne aux « riffs » pentatoniques. Des notes « piquées » du terroir avec un habillage très frais ! Enfin, free jazz ! Le bouche à oreille aidant, le nom de Madar ne cesse de bruisser. Et tout le monde en parle ! Le cercle de ses poètes du jazz s' élargit. Enfin son fanclub qui ne cesse de s'agrandir. C'est que Madar commence à se forger un nom d'airain sur la place musicale jazz-fusion. Et puis, les gens, qui se sont déplacés, n'ont pas été déçus du voyage, enfin du « trip » que Madar leur a offert. Le public fut agréablement « bluffé ». Une partition d'un jazz contemporain, expérimental, fusionnel, algérianisant et maghrébin. Chaque membre du groupe a sa minute de gloire de par des solos convaincants. La formation existe depuis deux ans. C'est une rencontre impromptue qui a donné le jour à un projet musical contemporain de jazz à l'estampille algérienne, à l'issue d'une résidence de formation organisée par la fameuse et dynamique association Limma à Constantine. Un groupe qui ira loin en affinant encore plus son exercice de style.La formation Sinoudj, la tête de pont de Cirta en matière de jazz, la pionnière et l'initiatrice du fameux Festival international Dimajazz de Constantine est toujours égale à elle-même. Quand Sinouj est sur scène, on ne peut immanquablement penser à son leader, le batteur Aziz Djemame, mort prématurément à l'âge de 34 ans. Le groupe proprement dit a été créé en 2000 par le guitariste Kheiredine Dehkal et le regretté Aziz Djemam, qui est aussi cofondateur du Festival de jazz Dimajazz de Constantine. Le line-up au 2e Alger Jazz Festival a aligné Kheireddine Dehkal (guitare), Najib Gamoura (basse), Moustafa Lazli (percussions, derbouka), Khiredinne M'kachiche (violon) et Abdelkrim Mechaâr (batterie). Sinouj fera dans le beat maghrébin nous rappelant Dessidenten, jazz-rock, oriental et la tonalité fusionnelle malouf-jazz. Avec des explorations sahariennes voire dunaire et pittoresque. Car alliant jazz contemporain et rythme traditionnel algérien comme Alger-Constantine, Dimajazz ou encore Berab Blues. Sinoudj invitera en guest star, le jeune saxophoniste, au talent avéré, Mohamed Mazouni, pour un morceau à l'effet « boeuf ». En matière de découverte jazz-fusion ce fut celle de Fayçal Salhi. Un jeune compositeur français de 30 ans né à Khenchela, en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de 11 ans. Instrumentiste et luthiste(oûd), c'est un autodidacte ayant plus de cordes à son arc pour ne pa dire à son oûd.Enfant spirituel du grand compositeur libanais Rabih Abou Khalil, Fayçal Salhi est auteur d'un album intitulé Timgad. Il subjuguera son bon public tout ouïe et acquis à ses riffs aériens, limpides, cristallins et surtout énergiques. C'est que Fayçal Salhi Quintet, Christophe Panzani au saxophone, Vladimir Tores à la contrebasse, Thomas Nicol au violoncelle, Etienne Demange à la batterie et Fayçal au oûd et guitare décline une tablature recherchée et élaborée dans le registre du jazz orientalisant basé sur le maqam (mode musical arabe) comme celui Bayati ou Nahawand comme sur les titres Ah ! Ya Rabih, Timgad, Entre deux Mondes, Errance, Miel Amer, Du Sommet du Hoggar, Le Voleur Squatte Toujours ou encore La Rose Sans Epine. C'est sûr, Fayçal Salhi est une virtuose du oûd forçant le respect. Et puis, il était très ému de se produire pour la première fois en son pays, l'Algérie. « Merci d'être venus aussi nombreux. C'est un concert très particulier pour moi ! Merci ! », confiera-t-il.
Second couteau… Suisse !
Quant aux formations étrangères Mario Canonge Trio a offert une prestation très chaleureuse en parfaite adéquation avec le public. Nullement dépaysé, Mario Cannonge, célèbre pianiste martiniquais, et ses « acolytes », le bassiste Linley Marthe et le batteur Jean Philippe Fanfant, ont commis performance de toute beauté. Jazzy, bien sûr, insulaire et joviale entre notes pianistiques accentuées et slide et autre fretless sur une mazurka polonaise à trois temps. La preuve ! Mario Canonge Trio a fait danser la salle. « Il y a une relation entre mon lieu et tous les lieux du monde, et je veux essayer de mettre cette relation en musique », dit Mario Cannonge. Une agréable destination : West Indies (Caraïbes). Le Pascal Schaer Trio aura été une autre sensation. Shaer and Co est composé de Baba Konaté aux percussions et djembé, Christian Guggenbuehl à la guitare et le leader et le joueur de trombone et cor des Alpes, « cousin » du didgeridoo, un instrument de musique à vent joué par les aborigènes en Australie, ayant une portée de 12 km et faisant écho aux cimes des montagnes. Car instrument privilégié des patres suisses. Ainsi, le trio fera cor à corps avec des titres comme Rendez-vous, Descente de fleuve, Techno cor ou encore Be cor bop. Des thèmes emplis de groove très « laid back » ( cool, flegmatique). Avant d'entamer son concert, Pascal Shaer, qui est suisse, confiera de par un petit « speech » : « Salam Alikoum ! On est très content d'être, ici. C'est la première fois qu'on y vient. On a été très touché par la gentillesse des gens. Ils sont très accueillants, cool et très aimables. Je m'excuse pour mon pays (la Suisse). Ils ont voté une loi (interdisant les minarets des mosquées). Vous savez, 50% ne sont pas d'accord. C'est une campagne stupide. Il y a uniquement que cinq minarets en Suisse. Je m'exprime au nom de ces 50% de Suisses... Allez, laissons place à la musique ! » Une pique comme un... couteau suisse ! L'insigne honneur de clôturer Alger Jazz Meeting est revenu au Raaga Trio qui n'en est pas un. Car ils sont quatre musiciens. Ils se définissent comme Trio plus un. Andreas Fulgosi (guitare), Andra Kouyaté (djeli ngoni et ngoni, basse) qui n'est autre que le frère de Bassekou Koyaté, Baba Konaté (djembé, percussions) et Guillaume Lagger (harmonica), la nouvelle recrue. Une bande originale espérantiste et citoyenne du monde. Un Malien, un Burkinabé, un Italien et un Suisse. Des rois de l'improvisation et du jazz expérimental interprétant magistralement les douze barres du blues, afro-beat et funk avec générosité, fluidité, élégance et puissance. Une grande formation ! Raaga Trio conviera en guest-star, le surdoué du oûd, Fayçal Salhi pour un « bœuf » très unpplegged et émouvant. Une fratrie universelle. « Funk soul brother », disait le Dj britannique Fatboy Slim !


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