Des milliards ont été dépensés dans un projet qui n'a pas été rentabilisé l Le commerce informel semble avoir de beaux jours devant lui dans la ville du Vieux rocher. Le summum de la déchéance est atteint dans ce qu'il convient d'appeler les bas fonds de Daksi, où a été érigé le fameux marché de toutes les désillusions. Implanté à la limite de l'intersection menant vers les cités Gammas et Benchicou, cet espace commercial, baptisé du nom du chahid Messaïd Abdelmadjid, censé résoudre définitivement le problème du marché parallèle, n'est, aujourd'hui, plus qu'une caricature de souk déserté par les clients. Et pour cause, puisqu'il est entouré de tous côtés par les marchands informels, qui ont accaparé l'intérieur de ce marché, dont la vocation initiale était d'être « le deuxième espace commercial après celui d'Oran » (dixit les autorités locales). En outre, il n'y a même pas d'eau, nonobstant l'existence d'une conduite d'AEP et de robinets demeurés désespérément secs. Les jeunes, bien entendu, doivent aussi pouvoir accéder au travail, mais faut-il que ce soit aux dépens de ceux qui paient leurs impôts et s'acquittent de leurs loyers ? Tous les commerçants que nous avons rencontrés étaient unanimes pour dénoncer ce qu'ils appellent une « marginalisation » qui ne dit pas son nom, les poussant au désespoir, et bientôt au « renoncement ». « Cette situation ne pourra pas durer éternellement, nous avons été parqués ici, loin du monde, et nous mettons des jours et des jours à écouler les fruits et légumes, que nous finissons toujours par jeter, car ils pourrissent. Nous payons les charges d'un espace investi par des gens qui ne paient rien ! » se sont-ils tous écriés. Seulement trois cents locaux sur les 748 que compte ce marché sont ouverts. Beaucoup trop demeurent fermés, soit non encore octroyés, soit non exploités par leurs locataires, « qui cherchent carrément à les vendre », selon les commerçants sur place. « C'est toujours les mêmes agissements et passe-droits qu'on rencontre : on concède des privilèges à ceux qui n'en ont pas besoin », dira, dépité, un jeune commerçant. Ce souk est devenu, d'après les personnes que nous avons rencontrées, un lieu mal famé, surtout dans sa partie inférieure, à proximité de l'intersection d'El Gammas. Selon des témoins, une jeune fille a failli se faire enlever, n'était l'intervention de quelques commerçants. Dans ce domaine aussi, il était prévu l'installation d'un poste de sûreté et de Protection civile. L'hygiène, un point noir L'hygiène est également le dernier souci dans ces lieux abandonnés par les services de l'APC, qui ne daignent même pas désigner un agent pour s'occuper de l'entretien de l'endroit, où s'entassent toutes sortes d'immondices. L'un des portails en tôle galvanisé, du côté inférieur, s'est récemment détaché du mur auquel il est fixé de manière hasardeuse, pour tomber de tout son poids sur un petit garçon de 5 ans. « Il a failli mourir, raconte un commerçant, il n'a pas arrêté de saigner ; il a eu une fracture au niveau du crâne dont il souffre jusqu'à maintenant. Il est orphelin et sa mère est très pauvre. Vous croyez que l'APC l'a indemnisée ? Que non ! Rien ! Et le comble, est que cette dernière a remis le portail en place en le bricolant avec un peu de ciment. Il tombera encore une fois, vous verrez ! » Tout est sens dessus dessous dans cet espace couvert qui a coûté des milliards. L'on y pratique l'abattage de volaille, et ce au mépris des normes régissant les marchés couverts. L'activité commerciale y est conjoncturelle, le reste du temps, les vendeurs se roulent les pouces et bavardent pour « tuer le temps ». « Depuis 7h que je suis là (et il était près de 12h ndlr) je n'ai pas vendu une dizaine d'œufs. Les gens font leurs emplettes dehors auprès des vendeurs informels », fait remarquer un commerçant. Il serait vraiment navrant de laisser cette situation se détériorer plus qu'elle ne l'est déjà, et la balle est dans le camp de ceux qui sont à l'origine de l'implantation de ce marché.