Certes, le projet en lui-même est une louable initiative, une Constitution doit évoluer au fil du temps et au rythme des développements économiques d'une nation ; cependant, elle ne doit pas être modifiée au gré des desiderata, à la moindre saute d'humeur de nos décideurs. Une des clauses majeures serait qu'elle ne puisse être modifiable que dans des délais acceptables, entre trois et cinq ans. Que les consultations soient menées par Ahmed Ouyahia, cela est déjà une avancée majeure. Ahmed Ouyahia, contemporain des Beatles et des Rolling Stones, représente la génération intermédiaire entre les anciens moudjahidine et nos enfants. Le fait de faire participer les différents acteurs politiques, les partis, les personnalités nationales ainsi que la société civile aux propositions d'amendements est fortement prometteuse et c'est une véritable avancée démocratique pour notre pays. Cependant, pensez-vous que les associations nationales satellites et inféodées au pouvoir, telles que l'UGTA, l'UNFA, le FCE, le CRA, etc., représentent réellement cette société civile ? Ne sont-elles pas uniquement des caisses de résonance transformées en véritables comités de soutien à tous les gouvernants depuis l'indépendance de notre pays à nos jours ? Pensez-vous réellement que la société civile et les associations nationales ne sont réduites qu'à ces nombreux appendices du pouvoir ? La société civile représente l'ensemble des rapports inter-individuels, des structures familiales, sociales, économiques, culturelles ou religieuses qui se déploient dans une société donnée, en dehors du cadre et de l'intervention de l'Etat. D'après cette définition, les associations citées plus haut, ainsi que toutes celles qui puisent sur le budget de l'Etat, ne représentent absolument pas la société civile. Cette dernière n'est-elle pas plutôt constituée par les nombreux cadres et intellectuels qui sont la majorité silencieuse, pleine de ressources et avec une vision autre que celle des laudateurs du système ? A-t-on associé au débat des associations autres que celles qui ont la capacité de se mouvoir en comité de soutien, et pourtant il en existe une multitude en Algérie, qui œuvrent dans tous les domaines, qu'ils soient culturel, social, scientifique, éducatif et sportif, ainsi que dans les milieux de la jeunesse. Ces associations qui agissent dans l'humilité, bénévolement, sans demander de subventions, ni de locaux à l'Etat œuvrent avec leurs modestes moyens financiers, leurs cotisations et agissent de façon complémentaire, souvent dans l'anonymat, à l'action gouvernementale. Ces associations sont confrontées aux réels problèmes des citoyens lorsque qu'elles se déplacent dans des zones déshéritées. Elles ne visitent pas la partie visible de l'iceberg, mais s'engouffrent dans les profondeurs immergées. Elles ont des rapports de confiance avec les citoyens, connaissent parfaitement les problèmes de la jeunesse et débattent des vrais problèmes sans langue de bois et cherchent des solutions concrètes aux attentes des citoyens. L'Algérie, à l'instar des autres nations et vu la complexité de la mondialisation, se doit d'avancer vers la modernité et vers les nouvelles technologies. Ce n'est que par cette société civile ouverte sur le monde et en même temps jalouse de son passé et de ses traditions ancestrales que nous y accéderons. Cette révision de la Constitution vient à point nommé à une période charnière de notre essor, mais il faut écouter surtout les bons interlocuteurs, sincères, dévoués, mobilisés et non partisans, ceux qui œuvrent uniquement dans l'intérêt de notre pays. Nous sommes à la croisée des chemins, ne ratons pas le train du XXIe siècle.