– Le chantier d'une autre réforme hospitalière a été lancé dans le cadre de l'élaboration d'une nouvelle loi sanitaire. En tant que chirurgien et gestionnaire à la fois, quelles sont vos propositions en la matière ? L'EHU est un support de la réforme hospitalière : le grand levier à actionner est la ressource humaine qui doit être disciplinée et compétente. Pour cela, il est impératif de revoir la formation initiale par l'amélioration du contenu des programmes de médecine et l'instauration d'un meilleur mode d'évaluation des enseignants. Puis, la formation continue prendra le relais. A l'EHU, notre politique est basée sur la valorisation des ressources humaines. L'établissement compte 44 professeurs, 300 médecins spécialistes et 1200 paramédicaux dont le quart a été formé in situ.Tout ce personnel bénéficie de formations continues : l'établissement abrite une moyenne de douze séminaires par an, fruit de conventions conclues avec des organismes étrangers. Notre établissement dispose aussi d'une école de cytométrie reconnue par une école française, d'un centre de tensiologie animé par une équipe pluridisciplinaire et compte ouvrir une unité cœur et métabolisme. Autre élément : la politique salariale est un élément important pour inciter à la qualité des prestations. Une convention collective et une grille de salaires sont en cours d'élaboration, d'un commun accord avec le partenaire social. Par ailleurs: il faut une évaluation chiffrée des gestionnaires, basée sur des critères palpables. La décantation des idées se fera lors des prochaines assises dans le cadre de l'élaboration de la loi sanitaire. L'autre grande idée est de passer à un financement des hôpitaux indexé sur les prestations assurées par ces derniers. – Justement, l'EHU d'Oran et tous les hôpitaux algériens sont-ils appelés à être autonomes ? De par la spécificité de son statut, l'EHU a déjà une certaine souplesse dans la gestion. Désormais, le cap sera mis vers la contractualisation pour que l'établissement puisse fonctionner sur ses fonds propres. L'EHU en a les moyens car il assure, par exemple, des interventions qui permettent la réduction des transferts à l'étranger. Un exemple: l'hôpital dépense 4 millions de dinars pour assurer une greffe de la moelle osseuse qui coûte à l'étranger l'équivalent de pas moins de 60 millions de dinars (400 000 euros). C'est autant de ressources non négligeables pour l'hôpital. Encore faudrait-il que la CNAS et l'Etat payent. Nous sommes sur la bonne voie. La mise en place d'une tarification est en cours pour pouvoir facturer les prestations au ministère de la Santé et à la CNAS. Il y a des amendements à apporter aux textes d'application en matière d'assurance maladie. Une ébauche est amorcée depuis la nomination de l'actuel ministre de la Santé. Les discussions avec la CNAS sont amorcées. Le dossier électronique du malade mis en place facilitera ce processus car il garantit une traçabilité de la prescription et de la prise en charge des patients. – Vous prônez «une approche qualité». Quel en est le contenu ? Le but de la création de l'EHU est en effet d'opter pour une approche qualitative : la mission est de produire des prestations de haut niveau pour réduire les transferts à l'étranger. En matière de gestion, un processus de mise aux normes universelles iso est en cours. L'établissement est à la pointe dans diverses disciplines. 98% des actes de chirurgie générale se font par laparoscopie, c'est-à-dire sans ouvrir le malade. Toutes les lourdes pathologies (cancéreuses et hépatiques…) sont prises en charge. L'EHU est le seul hôpital en Algérie à réaliser la chirurgie de l'obésité. En chirurgie vasculaire, les endoprothèses aortiques sont réalisées pour réparer la paroi de l'aorte afin de traiter les anévrismes ou une dissection de l'aorte. L'EHU assure également la chirurgie cardiaque lourde, les reconstructions de la cage thoracique en utilisant l'ostéosynthèse de dernière génération. En hématologie, les autogreffes et les allogreffes de la moelle osseuse sont réalisées avec succès. L'établissement dispose d'une banque de sang des cordons ombilicaux permettant de mener la thérapie cellulaire des leucémies. La maternité s'apprête à se doter d'un échographe 3 D et d'un véhicule médicalisé pour assurer l'hospitalisation à domicile des femmes qui présentent une grossesse à très haut risque. En matière de procréation médicalement assistée (PMA), nous allons prochainement lancer la fécondation in vitro. – L'EHU souffre de surcharge. Est-ce un mal algérien incontournable ? Nous souffrons effectivement de surcharge. L'EHU est initialement conçu pour produire de la qualité. Les services ne disposent que de 30 lits chacun. Le personnel de la maternité est particulièrement dépassé. Conçu pour n'accueillir que 60 parturientes présentant des grossesses à haut risque, ce service a atteint une capacité d'accueil de 150 lits. L'établissement fait face à un épineux problème : des établissements implantés dans diverses wilayas recourent souvent à des évacuations de malades y compris pour des actes de médicaux banals. La DSP a été saisie pour régler ce grand problème. – La recherche est réputée comme étant le parent pauvre en Algérie. Quelle place a-t-elle à l'EHU ? L'EHU accorde bien évidemment – et c'est là l'une de ses missions fondamentales – une place très importante à la recherche scientifique. L'établissement compte aujourd'hui 10 projets de recherche. Certains de nos chercheurs ont des publications dans des revues internationales indexées dans diverses spécialités, à l'image, notamment, de l'hématologie et de la chirurgie vasculaire.