Ghaza De notre correspondante Les tirs d'obus de chars israéliens étaient plus violents et plus concentrés à l'est de la ville, où se trouve le quartier populeux de Chedjaiya. Ils se sont poursuivis durant toute la nuit de samedi à dimanche. Plus de 60 citoyens, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées, ainsi qu'un journaliste et un ambulancier ont été tués par des éclats d'obus ou après avoir été ensevelis sous les décombres de leurs maisons.Les blessés se comptent par milliers maintenant. Le décès de Khaled Hamad, deuxième journaliste à être tué depuis le début de l'offensive israélienne, et d'un ambulancier prouvent que l'armée israélienne applique la politique de la terre brûlée. Les équipes médicales de secours avaient beaucoup de difficultés à entrer dans le quartier. Selon des témoins, un grand nombre de morts étaient encore hier après-midi sur les trottoirs et sous les décombres des habitations. Des dizaines de milliers de citoyens se sont retrouvés pris au piège. Il leur était impossible de quitter leurs habitations. En même temps, ils sentaient que leurs maisons pouvaient leur tomber sur la tête à tout moment. «Nous nous étions entassés à 35 dans une chambre du rez-de-chaussée de notre maison. Les enfants pleuraient. Les femmes avaient très peur. Les bombes explosaient partout autour de nous. Nous avons essayé de contacter la Croix-Rouge internationale et le Croissant-Rouge palestinien pour nous aider à sortir de là mais personne ne répondait. A l'aube, nous avons décidé de fuir malgré les bombardements. C'est un miracle que l'on soit arrivés sains et saufs a l'hôpital Al Shiffa», raconte traumatisé Farid, un jeune homme de 26 ans, que nous avons rencontré dans l'un des espaces verts de l'hôpital Al Shiffa. Tous les témoignages sur la barbarie israélienne insistent sur l'épouvantable nuit que les habitants de ce quartier ont passé dimanche. N'ayant plus la force de crier leurs douleurs, des hommes et des femmes ont longuement pleuré à chaudes larmes leurs êtres chers assassinés par Israël dans leur sommeil. Dans la matinée d'hier, le bureau de la Croix-Rouge à Ghaza a proposé une trêve humanitaire de 3 heures pour permettre l'évacuation des morts et des blessés qui n'ont pu quitter le quartier martyr. Apres un premier refus, Israël a annoncé en début d'après-midi son «ok» pour un cessez-le-feu de 13h30 a 15h30, soit 2 heures seulement. Comme d'habitude, l'armée israélienne n'a pas respecté le temps imparti au cessez-le-feu. Elle a repris les bombardements avant l'expiration du délai. Les équipes médicales et les journalistes, qui s'étaient rendus sur place, ont dû quitter précipitamment les lieux. Au plan humanitaire, l'UNRWA, l'agence onusienne chargée de l'aide aux réfugiés palestiniens, a annoncé avoir accueilli depuis le début de l'opération militaire israélienne plus de 60 000 citoyens. Son porte-parole à Ghaza a appelé hier les citoyens à quitter l'hôpital Al Shiffa où ils avaient trouvé refuge pour se rendre dans des endroits (quatre nouvelles écoles, ndlr) préparées pour accueillir les réfugiés, et cela pour ne pas gêner le travail des équipes médicales. Les morgues pleines à craquer D'un autre côté, l'hôpital Al Shiffa, l'institution principale du système de santé dans la bande de Ghaza, est dépassé par la demande. Tous ses lits sont occupés. Des blessés sont maintenant soignés à même le sol. Le service de réanimation ne peut plus accueillir de cas critiques. Il a atteint ses limites. Ce n'est pas tout, il n'y a plus de place pour les morts dans la morgue de l'hôpital. Elle est pleine à craquer et l'odeur de la mort rôde partout. Les équipes médicales, malgré toute leur bonne volonté, n'arrivent plus à prendre en charge tous les cas acheminés du quartier Chedjaiya et des autres localités ciblées par l'armée israélienne. L'agression terroriste israélienne a provoqué une immense crise humanitaire dans l'enclave palestinienne et il faudra certainement une mobilisation internationale de plusieurs années pour en effacer les séquelles. Le ministère palestinien de la Santé a lancé un appel d'urgence aux organismes des droits de l'homme et aux institutions internationales pour la sécurisation d'une route sûre afin d'acheminer du sang, des aides médicales et humanitaires vers Ghaza. Dans le cas contraire, la catastrophe sera encore plus grande. Sur le terrain, les troupes spéciales israéliennes ont tenté, hier, sans succès, de prendre certaines positions de la résistance palestinienne. Les soldats israéliens, bien que suréquipés et surarmés, ont buté sur des résistants très combatifs. L'armée israélienne a même enregistré des pertes, ce qu'elle n'a pas pu accepter. Mais les autorités israéliennes ont fini tout de même par reconnaître avoir perdu 5 éléments et enregistrés 60 blessés. Malgré cela, les résistants palestiniens accusent l'armée israélienne de cacher l'ampleur de ses pertes qui sont en réalité bien plus importantes. Sur un autre plan, l'invasion terrestre dont a parlé Tel-Aviv n'a en réalité pas dépassé quelques centaines de mètres. Les résistants palestiniens ont réussi en revanche à tendre plusieurs embuscades aux forces israéliennes, que ce soit à l'est de la bande de Ghaza ou au nord, dans plusieurs régions limitrophes de la frontière. Une opération particulièrement audacieuse a été menée derrière les lignes de l'armée israélienne en territoire israélien où une douzaine de membres des brigades Ezzedine Al Qassam, la branche armée du Hamas, s'est infiltrée. A signaler par ailleurs que les tirs de roquettes contre les villes israéliennes ne se sont pas arrêtés. Et certains observateurs lient justement la violence extrême observée dans les bombardements sauvages ayant visé hier le quartier Chedjaiya à la surprise des chefs de guerre israéliens qui ne s'attendaient pas à ce que les combattants palestiniens fassent preuve d'une aussi grande résistance à ce moment de l'offensive terrestre. En face, la seule chose que Tel-Aviv – qui dispose de l'armée la plus puissante dans la région – ait réussie pour le moment à faire aura été de tuer des milliers de civils innocents.