Plus de 800 employés se retrouvent sans ressource ni travail après la dissolution de l'Enaditex, annoncée le 26 novembre dernier. Le syndicat de l'entreprise exige l'application de l'accord signé en mars 2008 l La SGP IM fait la sourde oreille. Qu'ils nous rendent notre gagne-pain », peste Mezoudji Boumediène. A 46 ans, ce désormais ex-employé de l'Enaditex, dissoute le 26 novembre dernier, se retrouve sans la moindre ressource. Il se bat ainsi pour la survie. La sienne et celle de sa famille. Au bout de ses 20 ans d'expérience, ce travailleur perd son emploi, comme les centaines d'autres employés de l'Enaditex. « Nous vivons depuis près d'une année et demie grâce à l'aide de la famille et des amis », lâche-t-il consterné. Sa colère est grande. Il l'exprime fortement et la partage avec une trentaine d'autres employés présents au sit-in organisé hier par le syndicat de l'entreprise devant la Société de gestion des participations Industries manufacturières (SGP IM) à Alger. C'est le quatrième rassemblement du genre depuis la fermeture brusque et inattendue de leur entreprise. « Je suis venu d'Oran et je reviendrai autant de fois qu'il le faut pour que mes droits ne soient pas perdus », s'époumone M. Mezoudji. Les travailleurs disent ne pas demander la lune. Ils demandent, comme écrit sur une pancarte, l'application stricte de l'accord signé entre le syndicat de l'entreprise et l'employeur. Ils insistent surtout sur deux articles. D'abord l'article 6, qui donne la priorité de recrutement aux travailleurs de l'entreprise dans le cas où celle-ci trouve repreneur. Ensuite l'article 8, quant à lui, qui laisse la possibilité de reprise des biens de l'entreprise par les salariés (conformément aux textes réglementaires en vigueur), si elle est dissoute. La seule disposition respectée dans cet accord est celle relative à l'indemnisation des travailleurs. « Nous avons demandé aux responsables de la SGP de s'asseoir autour d'une table pour discuter. Mais on a essuyé un refus catégorique. Le président de la SGP a refusé de nous rencontrer », dénonce le secrétaire général du syndicat de l'entreprise, Mohamed Denideni. Face au silence de la tutelle, le syndicat entend multiplier les actions de protestation. « Nous ne ferons pas marche arrière et nous ne nous tairons pas avant l'application stricte et totale de l'accord signé en 2008 », affirme M. Denideni, qui estime que l'entreprise dispose de suffisamment de ressources et de moyens pour un nouveau décollage. « Cela fait un mois qu'on fait des pieds et des mains pour dialoguer avec la tutelle, sans résultat. Nous nous trouvons face à un mur de silence. Qu'ils nous disent si nous sommes des Algériens ou pas, si nous avons des droits dans ce pays ou non », fulmine Lehanine Naïm, syndicaliste, qui tombe à bras raccourcis sur la SGP et le groupe Texmaco, leur reprochant de n'avoir pas mis de stratégie pour l'entreprise. Après une longue et insistante attente, des représentants des travailleurs ont été reçus par le secrétaire général et l'inspecteur général de la SGP. « Ils nous ont reçus en présence de policiers », indique Benyoucef Zenati, membre du syndicat de l'entreprise. Selon lui, la réponse de la SGP est sans appel : « La dissolution de l'entreprise s'est faite en toute légalité. » Pour M. Zenati, la SGP remet en cause le droit à l'exercice syndical et le droit à la négociation. « Comment expliquer une telle réponse alors que nous avons remis tous les documents prouvant que l'opération s'est faite sans le respect des procédures légales », se demande M. Zenati, qui interpelle le ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements, Abdelhamid Temmar, afin qu'il suive de « près » le dossier et préserve « les droits des travailleurs ». Mais pour les travailleurs, le combat ne fait que commencer. Une bataille judiciaire est déjà engagée. Une plainte a été déposée. Et d'autres mouvements de protestation sont envisagés. « Le temps n'est plus à la résignation », assure M. Zenati, qui reste que la reconfiguration était bien réelle, avant de s'interroger sur ce qui a motivé cette « hâtive et brusque » décision de dissolution. Selon lui, la SGP avait annoncé, en 2008, qu'un marché de transfert de magasins au groupe C & H Fashion était conclu. Il restait à établir la liste des magasins à transférer. Pourquoi cette opération n'a-t-elle pas été menée jusqu'au bout ? Pour M. Zenati, il y a bien anguille sous roche. Cette opération aurait permis la préservation des centaines d'emplois et d'en créer d'autres. Un riche patrimoine L'Entreprise nationale de distribution des produits textiles (Enaditex) dispose d'un riche patrimoine immobilier estimé à des centaines de millions de dinars. Cette EPE, qui constituait pendant les années 1970 et 1980 le fleuron de l'industrie textile nationale, compte aujourd'hui 256 biens immobiliers, dont 160 magasins répartis sur l'ensemble du territoire national. Un patrimoine non négligeable qui s'ajoute à un stock de marchandises d'une valeur de 11 milliards de centimes.