Le thème a été choisi pour accroître la visibilité de l'agriculture familiale et des petits exploitants. Il appelle l'attention mondiale sur le rôle crucial que joue l'agriculture familiale dans de nombreux domaines : lutte contre la faim et la pauvreté, renforcement de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, amélioration des moyens d'existence, gestion des ressources naturelles, protection de l'environnement et réalisation du développement durable, notamment dans les zones rurales. L'initiative de la FAO est louable, mais elle semble décalée dans un monde où la mondialisation de l'économie provoque des bouleversements accélérés du monde agricole. L'agriculture familiale recouvre les activités de 2,8 milliards de personnes, soit près de 40% de la population mondiale qui vivent et travaillent dans une exploitation familiale. Elles produisent les trois-quarts des productions mondiales dans des filières bien adaptées à la demande et reposant sur l'utilisation des écosystèmes naturels et des savoir-faire ancestraux. C'est la forme d'agriculture qui s'oppose à l'agriculture intensive et à l'«agro-business» en plein essor. Il y a un peu plus de 7,2 milliards de personnes qui peuplent la Terre aujourd'hui et nous serons près de 9 milliards en 2050. La Terre pourra-t-elle nourrir l'humanité à ce moment-là ? Les réponses sont mitigées, mais des nations et des Etats ont déjà pris les devants en achetant des terres, notamment en Afrique. Pour Laurence Roudart, de l'université libre de Bruxelles, la crise alimentaire actuelle surtout pour les productions céréalières ravive le discours malthusien. Sur les 13,4 milliards d'hectares de terres émergées de la planète, quelque 30%, soit 4,2 milliards, sont considérées comme cultivables, sans qu'il soit besoin d'irriguer. Or, sur ces 4,2 milliards d'hectares de terre, 60% ne sont pas cultivées. En Amérique latine, 12% seulement sont cultivées, et en Afrique subsaharienne, 20%. Extension des cultures C'est donc là que les possibilités d'extension des cultures sont les plus élevées. Mais c'est sur la définition de «terres cultivables» que les spécialistes divergent et ils sont autant d'optimistes que de pessimistes. Des pays et des Etats riches ou dépassés par leurs croissances démographiques ont pris les devants. Depuis le début des années 2000, ils achètent des terres non cultivées pour différentes raisons mais essentiellement par manque de moyens des populations locales. C'est en Afrique que l'on observe l'achat massif de terres arables par des investisseurs privés dans les zones pauvres. Les Chinois, Indiens, Coréens du Sud et les économies pétrolières du Golfe sont en effet à la recherche de terres étrangères pour répondre à leurs besoins croissants de production alimentaire. Les pays occidentaux, eux, sont intéressés par les opportunités de production pour leurs biocarburants. Ce marché en pleine expansion est un sérieux motif d'inquiétude que de nombreux observateurs considèrent comme une forme moderne de colonialisme menaçant la sécurité alimentaire des populations pauvres. Pour Nyéléni, la voix du mouvement international pour la souveraineté alimentaire, «l'accaparement des terres arables mondiales s'étend de jour en jour avec la prise de contrôle des terres mondiales par les gouvernements de certaines nations qui arguent agir dans le seul but de résoudre le problème de l'insécurité alimentaire». Des groupes financiers se sont rués dans des processus d'acquisition, dévoilant son caractère spéculatif. L'accaparement de ces terres n'est malheureusement pas seulement l'exploitation pour des entreprises agricoles de monoculture de matières premières, mais implique aussi l'extractivisme (déforestation avec extraction d'eau et narcotrafics) qui fait des ravages en Amazonie et en Indonésie.