Un colloque sur la vie et l'œuvre de Kateb Yacine se tient depuis hier à la maison de la culture Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou. Cette manifestation culturelle, qui s'achèvera cet après-midi, a regroupé autour du père de Nedjma des universitaires de Guelma, d'Alger, de Béjaïa et de Tizi Ouzou, des amis de Yacine et sa sœur Fadhéla. La maison de la culture, avec le concours d'associations culturelles, a récidivé en organisant cette rencontre dédiée à Kateb Yacine, après le colloque de décembre 2005 avec la collaboration du théâtre Jean Sénac de Marseille. La nouveauté de ce colloque réside dans la présence de la sœur de l'illustre intellectuel, qui a exposé des documents manuscrits et photographiques inédits, des objets personnels de son frère tels que sa machine à écrire portable, des dominos, deux stylos, un peigne, des lunettes, une sacoche marron. Fadhéla Kateb, lors de la séance de la matinée consacrée aux témoignages, dira : « Je ne vais pas parler des œuvres de Yacine, mais plutôt de mon frère. » Ainsi nous apprendra-t-elle qu'il aimait les fêtes : musulmanes, chrétiennes et juives. Elle a révélé qu'elle avait été sa secrétaire et membre de la troupe du théâtre de la Mer, créée au début des années 1970. Elle racontera ses rencontres déchirantes d'émotion avec lui, vers la fin de sa vie en 1989, ses funérailles populaires, joyeuses et sans la présence des représentants du pouvoir politique de l'époque, qui l'avait banni de la sphère culturelle algérienne. « Kateb Yacine a toujours été un militant des droits de la femme. Lors de son enterrement, il y avait de nombreuses femmes qui l'ont accompagné à sa dernière demeure. Même mort, Yacine a libéré la femme », a conclu Fadhéla. Il convient de rappeler que dans les sociétés musulmanes, les femmes ne se rendent pas au cimetière lors des enterrements. A ce témoignage émouvant a succédé celui de Ouiza Zamoum, la veuve de Ali, ami de Yacine. La vieille dame dira que Yacine partageait ses joies et ses peines avec Ali Zamoum quand ils résidaient à Bouira ou à Ighil Imoula (Tizi Ouzou). Disparu en 2004, Ali Zamoum, ancien moudjahid et militant des libertés après l'indépendance, a soutenu les actions de Kateb Yacine. Rabah Zamoum, neveu de Ali et fils du colonel Si Salah, a déclaré : « Mon oncle Ali, qui était directeur de la formation au ministère du Travail dans les années 1970, aidait son ami Yacine en soutenant la troupe l'Action culturelle des travailleurs, créée après le théâtre de la Mer. Yacine montait des pièces en langue arabe algérien et Ali lui facilitait la présentation de ses spectacles dans les milieux des travailleurs et des paysans. » Kateb Yacine était connu pour son engagement dans le travail d'éveil des consciences des masses. Lors de l'allocution d'ouverture, le directeur de la maison de la culture, Ould Ali Lhadi, dira : « Ce colloque se veut un carrefour de débat et de réflexion. Notre objectif est de transmettre aux jeunes générations les idéaux de Kateb Yacine, ses combats et ses rêves. » Romancier, dramaturge, poète et journaliste, la vie et l'œuvre de Kateb Yacine sont un patrimoine immense. Des repères toujours utiles pour l'Algérie d'aujourd'hui et de demain. Les travaux du colloque se poursuivent aujourd'hui avec des conférences d'enseignants universitaires, une représentation théâtrale par la troupe Les compagnons de Nedjma de Sétif, à 11h, et un gala de la mythique troupe Debza à 14h.