Nous avons décidé de sortir nos griffes car la dignité n'a pas de prix. » Cette phrase lourde de sens, lancée hier par Mohamed Youcefi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP), résume à elle seule la situation critique dans laquelle se débat le corps de la santé. Ainsi, le SNPSSP a décidé, « après avoir épuisé toutes les voies de recours », de se joindre, à partir de demain, au mouvement de débrayage ouvert décrété il y a quelques semaines par le Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP). Ayant les mêmes objectifs, confrontés aux mêmes problèmes, travaillant dans les mêmes structures et dépendant de la même tutelle, les deux organisations syndicales représentant les médecins de santé publique généralistes et spécialistes ont opté pour l'unification des rangs et la coordination de leurs actions pour défendre une cause commune, à savoir l'amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles. Les initiateurs de cette grève ouverte sont prêts à affronter toutes les situations pour faire aboutir leurs revendications légitimes. Ils ne se soucient guère des ponctions sur salaire car non seulement la dignité n'a pas de prix, mais leurs payes sont à l'origine amputées. « Après un long cursus, un praticien de santé commence à 32 000 DA et certains généralistes à 10 000 DA. C'est une insulte ! Nos salaires restent figés en l'absence de mécanismes adéquats. Face à l'amputation des salaires des grévistes, nous gagnerons au bout du compte notre dignité », ont fulminé les patrons des syndicats. Lors d'une conférence de presse animée conjointement par les porte-parole des deux syndicats, le docteur Lyes Merabet, leader du SNPSP, n'a pas caché son effervescence par rapport à l'attitude du ministère qui fait non seulement dans le deux poids deux mesures, mais qui n'est jamais à l'écoute du personnel médical. « M. Barkat parle souvent de l'ouverture des portes du dialogue. Nous avons frappé à toutes les portes du ministère, mais aucune ne nous a été ouverte. Aucun des responsables n'a daigné écouter nos doléances », a déploré M. Merabet, qui ne comprend pas l'attitude du ministre de la Santé qui traite les praticiens de « voyous ». « Nous avons toujours assumé nos responsabilités, nous avons assuré le service minimum pendant toute la durée de la grève. Chose qu'ignore apparemment le ministre puisqu'il avance le contraire. Mais du moment que nous sommes des voyous, la question du service minimum sera à l'ordre du jour du conseil national prévu le 14 janvier », a précisé L. Merabet. Plus explicite, le conférencier a indiqué que les médecins, irrités par les propos du ministre, demandent la radicalisation du mouvement à travers la révision de la notion de service minimum et le maintien du débrayage jusqu'à satisfaction de toutes les revendications. En outre, les deux syndicats ont vivement critiqué la position de S. Barkat concernant son refus d'installer la commission mixte chargée de mettre en place le régime indemnitaire. Les pouvoirs publics, selon M. Youcefi, doivent impérativement impliquer le partenaire social dans la prise des décisions concernant le secteur et plus particulièrement celles qui touchent directement les praticiens. « Il s'agit de notre régime indemnitaire, alors pourquoi le ministre refuse-t-il de nous associer à son élaboration ? Qui de nous connaît les intérêts des travailleurs de ce corps ? », a souligné M. Merabet.De son côté, M. Youcefi qualifie l'attitude de la tutelle à l'égard du partenaire social de très négative, de méprisante et de négligente. MM. Merabet et Youcefi ont rappelé les points essentiels de leur plateforme de revendications. Tous deux rejettent le projet de décret portant statut particulier des praticiens et des spécialistes de la santé, imposé et non proposé par les pouvoirs publics ; ils demandent la promulgation du statut particulier dans sa forme négociée et ratifiée en commission mixte (ministère-syndicats) et l'installation d'une commission mixte pour la mise en place du régime indemnitaire. Les deux syndicats dénoncent, par ailleurs, les intimidations et les dépassements de l'administration enregistrés dans diverses régions du pays à l'adresse des syndicalistes et demandent, à cet effet, la levée de toutes les situations d'entrave au libre exercice du droit syndical.