C'est assurément vers une situation de pourrissement que semble se diriger le secteur de la santé. Secoué depuis près de trois semaines par une grève illimitée déclenchée par les praticiens affiliés au Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP), la situation de ce secteur s'est exacerbée, depuis le 4 janvier dernier, avec l'entrée «sur scène» du Syndicat national des praticiens spécialistes de santé publique (SNPSSP) qui a, lui aussi, opté pour une grève illimitée. D'aucuns affirment que cette grève revêt un caractère particulier dans la mesure où elle intervient dans un contexte marqué par la campagne de vaccination contre le virus de la grippe A(H1N1), ce qui a d'ailleurs nourri les craintes les plus folles. Outre l'amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles, les blouses blanches réclament davantage de dignité surtout que la tutelle se comporte avec eux avec mépris, ne daignant pas les associer à tout débat les concernant en premier lieu. «Nous sommes déterminés à aller jusqu'au bout de notre mouvement de protestation. Même les ponctions sur salaires dont nous avons fait l'objet ne nous font pas peur. Les promesses faites par notre tutelle n'ont pas été tenues. Rien de concret n'a été fait en notre direction. Il n'y a aucun indice qui atteste que les choses vont en s'améliorant. Nous savons pertinemment que toute grève pénalise le citoyen, mais c'est malheureusement le seul moyen de faire entendre notre voix. Nous respectons les malades qui doivent être traités en tant que citoyens à part entière. Cette grève a justement, entre autres objectifs, l'amélioration des prestations qui lui sont assurées», nous dira le Dr Mohamed Youssefi, président du SNPPSP. Pour notre interlocuteur et ses collègues, il est évident que, tant qu'un système de santé solide n'a pas été mis en place, il ne faudra assurément pas s'attendre à des miracles. Outre cet aspect, les praticiens de la santé mettent en évidence tout ce qui a trait au perfectionnement et à la formation continue. «Rien que par rapport à nos voisins maghrébins, nous accusons un énorme retard. Faute de moyens, nous ne pouvons assister aux congrès mondiaux, lesquels sont incontournables par les temps qui courent», fulmineront les interlocuteurs avec qui nous avons eu à nous entretenir. Pour les protestataires, la réforme dont la tutelle parle tant est un vain mot. Pour eux, la réforme ne peut pas se résumer en l'embellissement des hôpitaux ou la création d'espaces verts. La réforme doit impérativement viser les problèmes de fond, ceux-là mêmes dans lesquels se débat le secteur depuis bien des années. Mais, incontestablement, le courroux des praticiens de la santé monte d'un cran lorsqu'on évoque la notion de dialogue et de concertation. Ils sont catégoriques pour dire que, depuis l'arrivée de M. Barkat à la tête du ministère, rien n'a été fait pour mettre en place une culture et des traditions de dialogue. «En dépit de nos nombreuses sollicitations, le ministre de la Santé ne veut pas nous recevoir», diront les docteurs Merabet et Youssefi. Dans ce climat, quelle chance pourrait-on accorder à l'appel lancé hier par la tutelle à aux protestataires afin qu'ils fassent preuve de sagesse en privilégiant le dialogue et la concertation ? Il est évident que, en l'état actuel des choses, cet appel a peu de chances d'aboutir surtout que la détermination des grévistes semble inébranlable. Ces derniers envisagent de remettre en cause la notion de service minimum qu'ils assuraient jusque-là lors de leur conseil national, le 14 janvier prochain. C'est là, espèrent-ils, l'unique moyen de faire sortir les pouvoirs publics de leur mutisme. B. L.