Une fois de plus, le budget des ménagères dans la capitale est mis à rude épreuve. Sans aucune raison logique, les prix des fruits et légumes connaissent une hausse sans précédent. Une petite virée dans les marchés de la capitale suffit pour confirmer ce triste constat. La pomme de terre au marché Réda Houhou (ex-Clauzel) est vendue à 100 DA le kilo, la tomate et la laitue à 120 DA, le fenouil à 100 DA et la carotte à 80 DA. La courgette a atteint le seuil des 70 DA, au moment où le prix des petits pois oscille entre 200 et 250 DA le kilo. Les artichauts, quant à eux, sont cédés à 80, voire 100 DA le kilo. Pour plusieurs ménagères croisées dans ce marché populaire d'Alger, il faut d'abord faire le tour des différents marchés environnants et comparer les prix pour ensuite se décider à faire ses emplettes. «Je suis obligée de jongler avec le salaire de mon mari et du mien pour pouvoir faire face à nos dépenses mensuelles et surtout faire nos emplettes sans être obligés de nous endetter. Avec cette flambée des prix, ma mission n'est pas facile», s'exclame Fatiha, une jeune maman de 4 enfants. Au rayon des fruits, les prix ont aussi connu une hausse. «Déjà avec leurs anciens prix, les fruits n'étaient pas à la portée de toutes les bourses, maintenant ils sont presque inabordables», affirme Abdelkader, quinquagénaire, fonctionnaire rencontré au marché Ali Mellah. En effet, le kilo de bananes coûte 200 DA, les pommes 200 DA, les oranges entre 80 et 120 DA et la mandarine entre 80 et 100 DA. Pour l'Union générale des commerçants et des artisans algériens (UGCAA), cette flambée de la mercuriale, estimée entre 10 et 15%, est due à plusieurs facteurs majeurs. «Le marché des fruits et légumes sur le territoire national connaît un taux de production insuffisant par rapport à la demande. Prenant en compte les produits disponibles dans les 43 marchés de gros, le déficit est estimé entre 20 à 30%», explique M. Boulenouar, secrétaire général de l'Ugcaa. L'une des causes, selon notre interlocuteur, est le manque d'organisation du réseau de stockage, entre autres, les chambres froides. «La mauvaise gestion de ce réseau censé assurer la stabilité de l'approvisionnement du marché, laisse place aux spéculateurs. Vu l'instabilité, le circuit de stockage s'impose de lui-même. Il s'agit de pénuries. L'absence d'un système développé de gestion des carences, surtout en période d'intempéries, contribue fortement à la rareté des fruits et légumes sur le marché. S'ajoute à cela, les agriculteurs qui ne travaillent pas en temps de pluie, encore moins sous la neige ou la grêle. Même s'ils le veulent, leurs employés refusent», ajoute-t-il. Il y a aussi le manque important de marchés de proximité. D'après M. Boulenouar, cette insuffisance aide à gonfler la différence entre les prix de gros et celui imposé par le détaillant. Sur le territoire national, nous avons enregistré un manque de 3000 marchés de proximité. Dans la capitale, il nous faudrait au moins entre 30 et 40 marchés pour combler le déficit. «Où sont les marchés de proximité réalisés annoncés par le ministère du Commerce ? Pis encore, à voir le retour en force du réseau de commerce informel, les déclarations des autorités locales quant à l'éradication de 60% des points de commerce illicite dans le pays reste à confirmer», abonde notre interlocuteur, avant de tirer la sonnette d'alarme quant au prix de la pomme de terre. Selon ses propos et au rythme où vont les choses, d'ici le mois de mars le prix du kilo de pomme de terre atteindra facilement les 120 DA. Les raisons probables de cette énième hausse seraient les mauvaises conditions climatiques et les retards d'approvisionnement en semence de certains agriculteurs. De son côté, Medjber Mohamed, président de la commission nationale des mandataires, appelle à la limitation de la marge bénéficiaire des détaillants. «La notion de prix doit être revue avec un affichage des prix et une facture d'achat. La liberté des prix doit être appliquée au niveau des marchés de gros. Le prix dépend de la disponibilité du produit et de sa saison. En application de la loi, la marge bénéficiaire ne doit pas dépasser les 30%», déclare-t-il. Quant aux produits qui connaissent des pénuries, il explique que celles-ci sont provoquées par les spéculateurs. D'après notre interlocuteur, il est inconcevable que la pomme de terre ne soit pas disponible sur le marché : «Nous sommes en train de mener une enquête dans ce sens, et sur le territoire national près de 40 000 tonnes de pommes de terre sont disponibles. Elle sont aujourd'hui entre les mains des spéculateurs. Nous tirons la sonnette d'alarme.» En attendant que les autorités réagissent pour mettre fin à cette flambée des prix due à la spéculation, le citoyen est le seul dindon de la farce.