La fusillade a fait aussi au moins huit blessés, dont trois Suisses parmi lesquels une femme. Les deux suspects, arrêtés selon des sources policières maliennes, ont été relâchés. «Ils avaient des armes pour commettre des larcins, de petits hold-up, mais ils ne sont pas au cœur des derniers actes terroristes perpétrés» à Bamako, a déclaré un haut responsable de la police malienne, précisant qu'ils n'étaient «pas impliqués» dans l'attentat. Les mêmes sources ont indiqué qu'au moins un homme armé est entré à La Terrasse, le restaurant en question, fréquenté par des étrangers. Il a lancé des grenades avant d'ouvrir le feu, puis jeté deux autres grenades en partant, en direction d'une patrouille de police, tuant un policier. Une source diplomatique a relevé que le ou les auteurs de l'attaque ont tué le Belge et deux Maliens dans la rue, à proximité du restaurant, avant d'entrer et d'ouvrir le feu. «Ils auraient crié : ‘Mort aux Blancs' en entrant dans le restaurant (…) puis ils auraient visé le Français», a ajouté la même source. Dans un communiqué rendu public hier, le porte-parole du gouvernement malien et ministre de l'Economie numérique, de l'Information et de la Communication, le docteur Choguel Kokalla Maiga, a condamné «fermement» cet attentat, qualifié d'«ignoble». Tout en indiquant qu'une enquête est ouverte en la circonstance, il a affirmé que Bamako «reste attaché à la recherche de la paix et ne se laissera pas intimider par ceux qui n'ont d'autre dessein que d'éloigner les perspectives de la paix et de la concorde entre les Maliens». Le président français François Hollande a dénoncé «avec la plus grande force le lâche attentat» de Bamako. Le chef de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), Mongi Hamdi, qui a déployé quelque 10 000 hommes dans le pays, a condamné l'«attaque odieuse et lâche». Le ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders, a condamné «cette terreur lâche, ignoble qui a frappé à Bamako». En visite à Paris, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a qualifié l'attentat d'«horrible et lâche». à quand la paix ? La veille, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a demandé aux groupes rebelles du Nord de parapher l'accord d'Alger. Dans un communiqué rendu public hier, il a observé qu'«une paix durable requiert la volonté politique et l'engagement personnel de toutes les parties maliennes» et «encourage la coalition de groupes armés à parapher le projet d'accord». Et d'appeler «toutes les parties à poursuivre leur engagement en faveur d'un accord final». Cet accord a été paraphé par le gouvernement, mais pas par la Coordination des mouvements de l'Azawad, qui regroupe les principaux groupes rebelles à dominante touareg et qui a demandé un délai pour consulter les populations qu'elle représente. En résumé, le texte d'Alger appelle à «reconstruire l'unité nationale du pays sur des bases novatrices, qui respectent son intégrité territoriale, tiennent compte de sa diversité ethnique et culturelle». Sur le partage des pouvoirs, comme le souhaite Bamako, l'accord ne parle ni d'autonomie ni de fédéralisme et insiste sur l'unité, l'intégrité territoriale du Mali, ainsi que sur le caractère républicain et laïque de l'Etat. Le texte fait état néanmoins de l'appellation «Azawad» pour désigner le nord du Mali. Une revendication des rebelles, reconnue comme une «réalité humaine» sans contenu politique clair. Il prévoit la création d'assemblées régionales dotées de pouvoirs importants, élues au suffrage universel direct dans un délai de 18 mois, dirigées par un Président élu lui aussi et dont l'Etat ne contrôlera les actes qu'a posteriori et non a priori comme l'aurait voulu le pouvoir central. Côté sécurité, une armée restructurée, intégrant notamment des combattants des mouvements du Nord, «y compris dans le commandement», doit se redéployer progressivement dans cette partie du pays, avec des patrouilles mixtes au plus tard deux mois après la signature de l'accord. Les collectivités territoriales seront dotées d'une police. Volet partage des richesses et développement, l'accord évoque la création d'une «zone de développement du Nord» dotée d'une stratégie visant à la «hisser au même niveau que le reste du pays en termes d'indicateurs de développement» dans un délai de 10 à 15 ans. Cette stratégie serait financée notamment par la communauté internationale, appelée à contribuer «promptement et généreusement» à une conférence d'appel de fonds. Le gouvernement devra mettre en place à partir de 2018 un «mécanisme de transfert de 30% des recettes budgétaires de l'Etat aux collectivités territoriales (…) avec une attention particulière pour les régions du Nord». Comme il devra rétrocéder aux collectivités un pourcentage des revenus tirés de l'exploitation des ressources naturelles de leur sol, à déterminer d'un commun accord. Pour la réconciliation, une conférence nationale devra lancer «un débat approfondi entre les composantes de la nation malienne sur les causes profondes du conflit» afin d'aboutir à une «charte pour la paix, l'unité et la réconciliation nationale». Le texte évoque aussi une commission d'enquête internationale sur tous les crimes de guerre, contre l'humanité, génocide et autres violations graves des droits de l'homme pendant le conflit. L'application de l'accord sera confiée à un comité de suivi chargé d'arbitrer d'éventuels litiges présidé par l'Algérie, assistée du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad (vice-présidents) et comprenant les signataires : l'ONU, l'Union africaine, l'Union européenne et l'Organisation de la coopération islamique. Le nord du Mali était tombé au printemps 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al Qaîda. Ils ont été en grande partie chassés par l'opération militaire Serval, lancée par la France en janvier 2013, à laquelle a succédé en août 2014 l'opération Barkhane dont le rayon d'action s'étend à l'ensemble de la zone sahélo-saharienne.