Cette maladie neuropsychique est un problème majeur de santé publique, selon le diagnostic établi par des spécialistes du domaine, lors d'une journée d'étude organisée lundi au siège de l'APW. «Quelque 100 000 Algériens sont soignés chaque année pour de tels troubles», a-t-on indiqué. L'insuffisance des moyens de prise en charge et de thérapeutes spécialisés dans notre pays était parmi les points débattus lors de cette rencontre scientifique ayant pour thème «L'autisme, entre pathologies et différences», initiée par l'Association des enfants inadaptés mentaux de la wilaya de Tizi Ouzou, en partenariat avec la faculté des sciences humaines de l'université Mouloud Mammeri et l'APW. Six communications traitant de l'autisme, du rôle de la famille dans l'évaluation, le dépistage et la prise en charge des enfants, ainsi que de l'importance des études électro-physiologiques dans l'exploration des capacités cognitives des autistes et autres programmes psychoéducatifs ont été animées par des psychologues, des orthophonistes, des enseignants universitaires et des psychiatres. «L'autiste n'est pas un malade. Il est juste différent des autres. La famille est le premier spécialiste indiqué pour s'occuper de ces troubles qui prennent de l'ampleur à Tizi Ouzou, notamment dans la région d'Azazga», a estimé le Pr Belkheir Omar, psycholinguiste. «Le diagnostic précoce de l'autisme, avant l'âge de 2 ans, est indispensable. Cela mettra un terme à l'errance des parents et leur permettra un meilleur accès à l'information, aux livres sur le sujet, ainsi qu'à la prise en charge de l'enfant, même si cela reste à l'état embryonnaire dans notre pays», a indiqué pour sa part Ould Madi Lydia, maître assistante en orthophonie. Azaz Mohamed Zoheir, universitaire, a évoqué dans son exposé le manque de moyens mis à la disposition des thérapeutes en Algérie et l'absence de formation du personnel apte à prendre en charge les autistes. «Dans des pays étrangers, pas moins de 15 spécialistes proposent un diagnostic multidisciplinaire et interviennent dans l'évaluation de l'enfant autiste sur les plans psychomoteur, psychique, etc., alors que chez nous, si l'enfant a le regard fuyant, on dit : il ne me fixe pas dans les yeux, donc il est autiste». Outre cela, un psychologue a révélé que nombre de familles en Kabylie cachent le handicap de leur(s) enfant(s). «Il y a des autistes qui sont orientés vers des centres médico-pédagogiques spécialisés à l'âge de 16 ans, alors qu'ils devaient être dépistés et traités très tôt pour éviter l'aggravation des troubles». Pour Mohand Akli Rezzik, universitaire, «il ya des centres publics qui n'acceptent pas les autistes. Pourquoi ne les prennent-ils pas dans des classes adaptées ? L'école doit ouvrir ses portes aux autistes». Il ajoute : «De Corso à Tichy, il n'y a pas un seul centre qui accueille les enfants en difficulté. Plusieurs demandes de placement d'enfants autistes ont été enregistrées au Centre d'inadaptés mentaux d'Aït Oumalou (Larbaâ Nath Irathen). Sur 78 sujets pré-identifiés autistes dans ce centre, plus de la moitié viennent de la région d'Azazga». Dans une autre communication, le Dr Mahmoud Boudarène, psychiatre, s'est intéressé aux carences affectives précoces et à leur rôle dans l'émergence des troubles psychiques chez l'enfant. Pour une meilleure prise en charge des patients, les participants à cette rencontre recommandent la mise en place d'une équipe multidisciplinaire qui conduira un travail de recensement de tous les cas, la création d'une association de wilaya, ainsi que l'ouverture d'un Master en autisme à l'université de Tizi Ouzou pour enrichir la formation et la recherche dans ce domaine de la santé neuropsychique.