Le traitement sécuritaire, à lui seul, ne suffit plus quand on sait que les trois quarts du territoire de l'Algérie se trouvent constitués par seulement 6 wilayas sur 48 que compte le pays. Faiblement habitées et se trouvant au sud, Tamanrasset, Adrar, Illizi, Ouargla, Béchar et Tindouf sont toutes des régions frontalières (Mali, Niger, Libye, Mauritanie, Sahara occidental et Maroc). Des wilayas qui ne peuvent alors, au fil des années, que subir les effets directs et indirects des situations éprouvées dans chaque pays voisin. Tout un éventail de préoccupations que les responsables algériens, civils et militaires, doivent bien entretenir, actualiser et jauger. Comment assurer le contrôle ou la sécurité d'une wilaya comme Tamanrasset dont la superficie est plus grande que celle de la France métropolitaine, avec plus de 550 km2 ? Cette interrogation émane d'un ancien wali en poste dans cette ville du pays et qui avait demandé, durant son époque, un hélicoptère pour pouvoir bien accomplir son travail. Elle illustre la difficulté de plus en plus grandissante qu'ont les pouvoirs publics à exercer une autorité grignotée par de multiples facteurs extérieurs. De plus, Tamanrasset est limitrophe du Mali et du Niger sur une longueur de 1200 km. « Ces deux pays sont une source d'instabilité permanente pour l'Algérie avec des groupes rebelles (Touareg), des terroristes, des immigrants, des trafiquants d'armes, de drogue et de véhicules », rappelle un officier de l'ANP. Une instabilité tantôt amplifiée, tantôt régulée par les Etats-Unis et/ou la France, chacun ayant ses propres calculs et parfois ils se rejoignent. « Au nom du combat contre Al Qaîda, Washington cherche coûte que coûte à avoir une présence dans la région subsaharienne, allant jusqu'à arguer d'entraîner les militaires maliens tout récemment », avance un cadre au ministère algérien de l'Intérieur. Paris, quant à lui, « ne peut se permettre de lâcher son influence dans une région qu'il considère encore sous sa coupe réglée pour des raisons affectives, mais aussi des calculs stratégiques », explique un ancien diplomate algérien qui était en fonction à Bamako. Dans ces conditions, les pouvoirs publics sont peu conscients qu'il y a une grave erreur stratégique de laisser le Grand-Sud presque vide. « Un déséquilibre qui équivaut à un danger menaçant crescendo la stabilité du pays dans le sens où la vie nationale est perçue et vécue rien qu'au Nord, oubliant ainsi le Sud », relève, sous le couvert de l'anonymat, un ancien ministre de l'époque du défunt président Houari Boumediène. Il est temps de se pencher « très sérieusement sur la sécurisation des régions du Sud par des traitements économiques et sociaux, au lieu de se contenter uniquement des casernes militaires et des bases de vie pour travailleurs », juge-t-on du côté des services de sécurité activant dans les zones frontalières. Tamanrasset, par exemple, qui dispose de potentialités très importantes en hydrocarbures (7 champs de gaz naturel au niveau du bassin d'In Salah) et en minerais (uranium, or, étain) devrait attirer plus de citoyens à s'y établir, mais à condition de mettre en avant des mesures incitatives sérieuses et bien étudiées. Pour les puissances étrangères, elles n'avancent vers ces zones — par problèmes provoqués — qu'après être sûres qu'il y a des failles établies que l'Algérie est presque absente sur les trois quarts de son vaste territoire.