Il n'est pas dans les traditions de l'institution militaire depuis l'indépendance de féliciter publiquement et de manière aussi ostentatoire un responsable de parti ou de l'Etat pour son élection ou sa promotion. Dans le cas présent, le message de félicitations divulgué par la presse, et non encore démenti, dépasse le simple cadre protocolaire pour être un message politique contenant une position et dictant une orientation. Il n'est pas dans les traditions du commandement de l'armée de cautionner publiquement la position d'un parti politique sur l'échiquier national ou de déterminer son poids parmi les autres formations politiques comme cela s'est produit dans le message de félicitations adressé à la direction du parti FLN. Ceci d'autant plus qu'il est de notoriété publique que la méthode d'organisation des élections à ce jour n'a jamais fait l'unanimité de la classe politique et ne permet donc, en aucun cas, de déterminer le poids réel de chaque formation politique. Il n'est pas dans les traditions du commandement de l'institution militaire de définir publiquement un objectif pour un parti politique donné comme c'est le cas ici en demandant à la direction du parti FLN d'«enrichir la dynamique de la classe politique… et de consolider son édifice». Il va sans dire que cette attitude inédite du commandement de l'état-major est en contradiction totale avec l'une des missions de l'armée soulignée dans le message, à savoir la défense et la préservation de la «stabilité de la nation». Car de quelle manière l'engagement en faveur d'une formation politique donnée pourrait-il garantir cette stabilité ? Le contraire ne serait-il plutôt vrai ? L'implication de l'armée dans une polémique interne à un parti politique donné, ou dans le jeu de tous ceux qui, au sein du pouvoir ou dans son environnement immédiat, s'activent à se positionner pour l'après-4e mandat, ne favorise guère le renforcement de la cohésion nationale pour faire face aux défis internes et externes. Bien au contraire, cette implication, si elle venait à se confirmer, constituera une nouvelle source de complication d'une situation déjà tendue, et menacerait la préservation du consensus indispensable sur le rôle de l'institution militaire dans la construction de l'Etat de droit souhaité. Incontestablement, la position du vice-ministre de la Défense nationale et chef d'état-major ne facilite guère la recherche de solutions consensuelles aux problèmes du pays et ne s'inscrit nullement dans le sens du changement pacifique qu'impose l'évolution de la société. C'est pourquoi, le Parti de la liberté et de la justice invite le commandement de l'armée à rester au-dessus des partis politiques, loin de leurs différends conjoncturels, et à respecter scrupuleusement les missions constitutionnelles de l'armée qui doit demeurer, au besoin, le recours de tous.