Ce meurtre intervient quelques jours après que le président sud-soudanais, Salva Kiir, eut publiquement menacé de «tuer» les journalistes «travaillant contre le pays». Rassemblés en mémoire de leur confrère, des journalistes ont demandé une enquête sur la mort du reporter Peter Moi, tandis que des organisations de défense de la liberté de la presse ont appelé le gouvernement à clarifier les propos tenus par le Président la semaine dernière. «Nous espérons sensibiliser au fait que les journalistes ne sont pas satisfaits de la gestion des évènements par le gouvernement et faire pression sur le gouvernement afin qu'il agisse rapidement pour trouver le tueur de ce garçon», a déclaré Alfred Taban, directeur de l'Association pour le développement des médias au Soudan du Sud (Amdiss). Peter Moi, reporter du quotidien indépendant New Nation, a été tué mercredi soir à Juba par des inconnus de deux balles dans le dos, après avoir quitté son travail, dans ce qui ressemble à un assassinat ciblé. «La liberté de la presse ne signifie pas que vous pouvez travailler contre le pays», a lancé M. Kiir à des journalistes à l'aéroport de Juba, où il embarquait à destination de la capitale éthiopienne Addis-Abeba pour d'ultimes pourparlers, en vue de mettre fin à la guerre civile qui ravage le Soudan du Sud depuis 20 mois. «Si certains d'entre vous, les journalistes, ne savent pas que ce pays a déjà tué des gens, nous allons le démontrer un jour», a menacé le chef de l'Etat. Des propos rapportés par le Comité de protection des journalistes (CPJ). Selon le CPJ, citant des journalistes locaux, ces menaces répondaient à des critiques sur le caractère stérile et interminable des négociations d'Addis-Abeba. Lundi soir, le chef de la rébellion au Soudan du Sud, Riek Machar, a signé à Addis-Abeba un accord destiné à mettre fin au conflit. Malgré les menaces de sanctions internationales et les condamnations des Etats-Unis et de l'ONU, le président Salva Kiir a refusé de le faire et a obtenu un délai de 15 jours pour «mener des consultations». Le Soudan du Sud est au 125e rang sur 180 pays dans le classement de Reporters sans frontières (RSF) sur la liberté de la presse. «Qu'un chef d'Etat menace de mort les journalistes de son pays est proprement criminel», a déclaré dans un communiqué Christophe Deloire, secrétaire général de RSF. Le Soudan du Sud est plongé dans la guerre civile depuis décembre 2013, quand des combats ont éclaté au sein de son armée, minée par des antagonismes politico-ethniques alimentés par la rivalité à la tête du régime entre Salva Kiir et son ancien vice-président, Riek Machar.