En octobre prochain, la nouvelle entité mixte ArcelorMittal Algérie (AMA) fêtera la deuxième année de son accord stratégique, signé entre ArcelorMittal et le groupe public Sider. Une recapitalisation qui fera de ce dernier un actionnaire majoritaire avec 51% des actifs. Le reste, soit 49%, sera détenu par le partenaire étranger ArcelorMittal. Cet accord prévoit un plan d'investissement (2015/2017) de plus d'un milliard de dollars, destiné à la rénovation complète du complexe sidérurgique de Annaba et des mines de Ouenza et de Boukhadra (Tébessa). Le financement de ce plan d'envergure est rendu possible grâce à un crédit bancaire (BEA) de 796 millions de dollars, dont 720 pour AMA et 76 pour les mines. Un apport personnel en cash flow, estimé à 120 millions de dollars, a été assuré par les deux actionnaires. La concrétisation de ce plan a commencé sa première phase, le 14 septembre dernier, avec l'arrêt du haut-fourneau (HF) n°2 en vue de sa réhabilitation. Il sera fonctionnel en janvier 2016. En 2017, il est attendu de porter la capacité de production de l'usine de 1 à 2,2 millions de tonnes/an. Or, en 2013, le complexe d'El Hadjar avait produit 350 000 t d'acier liquide. Une année après, l'usine avait enregistré son plus bas record de production avec seulement 200 000 t, soit le 1/6 de sa capacité théorique estimée à 1,2 million de tonnes. La vétusté des équipements, les arrêts fréquents du HF et les conflits sociaux sont les principales raisons ayant signé l'arrêt de mort de ce fleuron de l'industrie nationale, avant que l'Etat ne vienne à la rescousse. Soutenu par les pouvoirs publics, le partenaire social et les travailleurs, ce plan d'investissement prévoit la rénovation du haut-fourneau, des installations existantes, ainsi que la construction d'une nouvelle filière électrique et l'implantation d'un nouveau laminoir de rond à béton et de fil machine d'une capacité d'un million de tonnes. Pour sa mise en œuvre, plusieurs équipes de projet ont été constituées, dont celle en charge de la réhabilitation du haut-fourneau n°2. Conduite par Djaâba Lakhdar, cette équipe est pluridisciplinaire. Elle englobe l'ensemble des spécialités, dont la mécanique, l'électricité, l'instrumentation, le génie civil, etc. A ce propos, Messaoud Bellili, directeur du HF n°2, rencontré sur le site, nous explique : «Il faut savoir que la durée de vie de notre haut-fourneau est arrivée à terme. Cet investissement devient donc une nécessité pour assurer la pérennité de l'activité au niveau de la région. Cela va permettre l'acquisition de nouveaux équipements qui vont contribuer à améliorer la sécurité des personnes et des installations, les conditions de travail ainsi que la fiabilité et la performance des installations. Les améliorations les plus significatives porteront sur les planchers de coulée qui seront plus accessibles et maîtrisés, la rénovation électrique ainsi que le changement de design des porte-vent. Le projet prévoit également la formation du personnel du HF n°2 aux nouveaux équipements, par le fournisseur en charge de la réfection, ainsi que d'autres de mise à niveau et de maîtrise du process. Tous ces éléments vont permettre d'augmenter la production et de maîtriser les coûts de transformation pour rendre notre produit compétitif sur le marché.» Certes, la réhabilitation du haut- fourneau constitue l'élément-clé de ce plan d'investissement. Toutefois, d'autres projets sont également lancés en amont et en aval. Il s'agit de la PMA, en tant que fournisseur direct du HF n°2 en matières premières et en aggloméré. Elle verra une grande rénovation et automatisation de son process pour lui permettre de produire les besoins nécessaires au fonctionnement du HF n°2, soit 1,8 million de tonnes en aggloméré et 300 000 t en produits calibrés. Etant le client direct qui transforme la fonte en acier liquide, l'aciérie n°1 sera également rénovée pour produire 1,4 million de tonnes d'acier liquide avec l'installation d'une nouvelle machine à coulée de billettes. Pour améliorer la fiabilité des équipements, les laminoirs (LAC, LAF, RPA et LRB) feront également l'objet de rénovations partielles. Ces différents projets nécessitent également un investissement et une mise à niveau de la logistique et des utilités. Il en est ainsi des rails et voies ferrées, les loco tracteurs, les ponts bascules, les routes et les installations maritimes au niveau du port de Annaba. En matière d'utilités, ce sont les installations énergétiques de l'usine qui touchent l'électricité, le gaz naturel, l'eau et la vapeur et l'oxygène. Les mines de Boukhadra et de Ouenza ne sont pas en reste. En effet, concerné par le pacte d'actionnaires, signé le 30 novembre 2014, ArcelorMittal Tébessa (AMT) est également majoritairement détenu à 51% par l'Etat algérien, dont 30% pour l'Entreprise nationale du fer et du phosphate (Ferfos) et 21% par le groupe public Sider. La part d'ArcelorMittal est passée de 70 à 30%. Ainsi, une enveloppe de 76 millions de dollars a été dégagée pour le développement du plan minier. Ce dernier consiste, selon Laurant, le conseiller du directeur général d'AMA, en «l'acquisition des équipements miniers tels que les foreuses, les installations fixes et les concasseuses. A cela, il faut ajouter la conversion des réserves pour l'exploitation minière sachant que pour 1 t de mines exploitable, il faut enlever 5 t de stérile. Donc pour les 2,5 t de mine représentant les besoins d'AMA, il faut ôter 10 millions de tonnes de stérile. Actuellement, nous sommes en phase d'ouverture des plis pour choisir nos fournisseurs. Cela est arrivé à point nommé puisque le marché mondial de ces équipements connaît une baisse de demande et de prix». Dans ce branle-bas de combat sidérurgique, la dimension humaine prend une place importante à travers la formation et au développement des compétences. A ce propos, El Hadi Laskri, directeur des ressources humaines à AMA, nous a affirmé qu'«un plan de formation pour chaque projet est prévu en direction du personnel dont l'objectif est d'acquérir les compétences nécessaires à la maîtrise du process et à la gestion des équipes». Et d'ajouter : «Plus de la moitié du programme sera assuré à l'étranger à partir de la première semaine d'octobre. A cet effet, un budget de 8 millions de dollars a été dégagé. Nous avons également engagé un plan de recrutement de 100 ingénieurs et techniciens supérieurs au profit des unités de production pour préparer la relève. Plus de 40 sont d'ores et déjà enrôlés. Il faut savoir qu'AMA enregistre une moyenne de 300 départs à la retraite chaque an. Cette année, ils seront quelque 400 à quitter l'entreprise, d'où la nécessité de prévoir un recrutement conséquent.» Force est de souligner que durant cette période d'arrêt du haut-fourneau et de la zone chaude en général, les laminoirs à plats et longs continueront à produire pour satisfaire le marché national. L'approvisionnement en matières premières est assurée par l'importation de demi-produits.