Comme promis l'été dernier par le ministère de l'Education nationale, l'enseignement de tamazight a été élargi à de nouvelles wilayas, mais pas à Alger. Où se situe le blocage ? En effet, malgré la demande sociale existante, principale condition pour l'ouverture de classes, et les efforts déployés, Alger n'a pas bénéficiée de mesures d'élargissement de l'enseignement, comme c'est le cas actuellement pour 23 wilayas. Le ministère de l'Education nationale doit prendre en charge l'effort de sensibilisation autour de l'introduction et de la généralisation de l'enseignement de cette langue. Nous refusons de tomber dans l'erreur de fixer un préalable à l'enseignement de tamazight. Le caractère facultatif de cette matière est un écueil de taille. Le département de l'éducation doit valoriser l'enseignement de tamazight en provoquant cette demande sociale et, qui soulignons-le, est restreinte par ce statut d'appendice attribué à tamazight, et un volume horaire désavantageant. Le statut de facultatif est très réducteur. Il est temps que le ministère fasse sauter le verrou du caractère facultatif à travers la sensibilisation avec ses moyens humains (inspecteurs et autres responsables des établissements). Il est important que les directeurs de l'éducation des wilayas s'impliquent aussi dans le développement des classes d'enseignement et rendent concrets les engagements du ministère concernant la généralisation de l'enseignement à travers les wilayas. Je vous renvoie à une déclaration récente à Béjaïa de la ministre qui a clairement indiqué que l'enseignement et la généralisation de cette langue vont constituer un indicateur d'évaluation des performances des directeurs de l'éducation. Ces derniers, à commencer par ceux d'Alger, doivent s'impliquer. Nous nous félicitons des classes ouvertes à Tlemcen, à Saïda, Relizane, Sidi Bel Abbès…, mais les autres doivent également suivre, et cela ne sera pas possible sans l'engagement et l'implication des directeurs de l'éducation. Je plaide pour des sorties mixtes (inspecteurs MEN-HCA) sur le terrain afin de susciter l'engouement pour tamazight à tous les paliers d'enseignement. Alger doit être un espace de rayonnement pour cette langue. Malheureusement, on constate toujours que l'enseignement de tamazight est décousu. Hormis deux classes, il n'est pas visible dans la capitale. Croyez-vous à une volonté politique visant l'accès de tamazight au statut de matière obligatoire à l'école ? Je me réfère à la loi d'orientation de l'Education nationale qui est un document scellé. Faut-il aujourd'hui l'amender ou l'accompagner par des circulaires d'application concernant le dossier de l'introduction et la consolidation de l'enseignement de tamazight ? Ce sont là les aspects développés par les membres de la commission mixte HCA-MEN qui sont à leur sixième réunion. Nous attendons avec impatience leur compte rendu qui sera bientôt remis. Les résultats auxquels aboutira cette commission mettra fin à plusieurs problèmes qui entravent l'enseignement, je parle de problèmes pédagogiques, liés au statut même d'une langue figurant dans la nomenclature des matières d'enseignement. Il faut dire aussi que la généralisation à 23 wilayas est un grand pas réalisé qui traduit sur le terrain l'engagement de notre partenaire qu'est le MEN, cela dénote aussi de la volonté de l'Etat à réaliser le saut qualitatif tant attendu pour la généralisation de l'enseignement de cette langue à tout le territoire national. Les établissements privés d'enseignement ne jouent pas le jeu non plus. Qu'est-ce qui motive cette réticence ? L'expérience de l'enseignement de tamazight dans les écoles privées n'a été faite que dans une wilaya ou deux. C'est le rôle du ministère de l'imposer dans le cahier des charges à travers des clauses, comme cela se fait pour les autres matières d'enseignement. Le HCA lance l'enseignement de tamazight pour adultes, en quoi cela consiste-t-il ? Il y a une autre catégorie de demandeurs d'enseignement de tamazight. Si les «enfants du boycott» ont cette chance d'accéder à cet enseignement, une partie de la population ne l'a pas. Pour nous, c'est un facteur de cohésion nationale. Le HCA fait donc son travail de réhabilitation de cette langue. Tous les Algériens se revendiquent Amazighs, il y a une demande importante qu'il faut prendre en charge. Nous avons mis en place un nouveau dispositif en démarrant une campagne de sensibilisation pour l'ouverture de sections d'alphabétisation en tamazight. Il est donc question de donner la possibilité à des adultes d'apprendre à lire et à écrire en tamazight, selon la variante souhaitée. Notre partenaire est l'association Iqraa. C'est un choix que nous assumons pleinement. L'association a de l'expérience dans l'enseignement des adultes. Elle possède déjà un réseau qui s'étend sur l'ensemble du territoire. Le HCA va l'accompagner avec ses moyens et son expertise et son manuel confectionné avec la collaboration de M. Hamad et ses applications multimédia.
Où en est l'opération ? Dans un premier temps, nous avons recruté et formé quelques enseignants. Nous sommes prêts à lancer cet enseignement dans 9 wilayas : Alger, Boumerdès, Tizi Ouzou, Oran Béjaïa, Sétif, Bouira, Oum El Bouaghi et Batna qui comptent toutes une ou deux sections (classes), à part Alger qui en a trois. Nous sommes en train d'agir graduellement, car cela demande du suivi et de l'accompagnement. Dans ce contexte, l'Office national d'alphabétisation doit s'impliquer, car ce n'est pas normal que sur les 12 000 postes libérés dans le cadre des missions de cet office pour l'enseignement des adultes, aucun n'est dédié à tamazight. Cet office est un moyen de l'Etat doté de budget et de outils de formation et tamazight doit trouver sa place dans la stratégie publique d'alphabétisation. Nous envisageons également de lancer une émission télé dans le cadre de ce même dispositif. Nous comptons aussi sur les radios pour diffuser cette information.