Hier, toutes les issues menant à l'hôpital Mustapha Pacha étaient sous haute surveillance. Tôt le matin, des casques bleus et des policiers en civil ont été dépêchés sur les lieux. Ils ont quadrillé les alentours du grand hôpital afin de faire barrage aux praticiens en grève ouverte depuis plusieurs semaines. Il était 11h, lorsque des centaines de médecins généralistes et spécialistes, chirurgiens dentistes et pharmaciens ont pris d'assaut le centre hospitalo-universitaire. Ces médecins venus d'Alger-Centre et des régions limitrophes ont répondu positivement à l'appel de leur syndicat pour participer à ce rassemblement, le deuxième du genre, dans l'enceinte de l'hôpital Mustapha. Des députés du RCD, le président du groupe parlementaire du MSP et des élus du PT ont tenu à apporter leur soutien aux praticiens de la santé en marquant de leur présence ce sit-in, qui se veut un appel insistant aux dirigeants de ce pays pour la prise en charge des revendications des travailleurs du secteur. Les praticiens affiliés au Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) et au Syndicat national des praticiens spécialistes de santé publique (SNPSSP) ont scandé des slogans hostiles au pouvoir. « Barkat, barakat », « Où va la santé ? », « Malades en danger », « SOS Bouteflika, les praticiens agonisent », tels étaient, entre autres, les slogans que l'on pouvait lire sur les longues banderoles brandies hier par les contestataires. Une marche a été également improvisée à l'intérieur du CHU. Les animateurs de cette manifestation envisagent d'entreprendre d'autres actions, plus radicales, au cas où les portes du dialogue demeurent fermées. Le docteur Lyès Merabet, porte-parole du SNPSP, est revenu sur la réunion tenue mardi après-midi avec les responsables de la commission de la santé de l'APN. « Nous avons exposé la situation catastrophique dans laquelle se débat le secteur de la santé publique. Les membres de la commission étaient scandalisés par l'attitude du ministre de tutelle et par le comportement du gouvernement », a souligné le docteur Youcefi, président du SNPSSP. La commission s'est engagée à saisir par écrit le premier magistrat du pays et le Premier ministre. « Nous avons expliqué aux membres de la commission qu'il était obsolète de convoquer le ministre, qui a avoué publiquement son incapacité à prendre en charge nos doléances », a noté M. Merabet. Pour M. Khendek, député RCD, le régime en place est autiste : « Le pouvoir aime la situation de confusion et aime agir en eaux troubles. » Le député RCD est convaincu qu'il y a consensus général sur le mal-être de ce corps. « Il y a des lobbies qui ne veulent pas que la santé publique soit au service du citoyen. Ils veulent casser l'un des piliers de la santé à savoir l'élément humain. Pourquoi attendre des mois pour répondre aux revendications des grévistes ? Sommes nous condamnés à vivre que des situations de pourrissement ? », s'est interrogé M. Khendek. M. Besbes, du même parti, estime qu'il s'agit là d'un problème politique : « Il n'y a pas de volonté politique pour le règlement du problème de la santé. Lorsque le gouvernement a voulu envoyer 20 000 supporters à Khartoum, il a dégagé les moyens et a tenu un Conseil des ministres. Le pouvoir doit avoir ce courage politique. Nous interpellons le président car le gouvernement applique les décisions de Bouteflika. » Par ailleurs, certains grévistes ont été interpellés par les forces de l'ordre et ont même été sommés d'enlever leurs blouses : « Nous trouvons inadmissible qu'un policier nous demande d'enlever nos blouses blanches ! D'autres policiers ont tenté vainement de nous arracher nos banderoles ! », ont pesté des manifestants.