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Le régime a une politique politicienne et utilitariste de la culture
Publié dans El Watan le 13 - 11 - 2015

– Vous avez annoncé pendant le 20e Salon du livre d'Alger la fermeture de votre maison d'édition qui a plus de 10 ans. Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à prendre cette décision ?

En effet, après 10 ans d'activités qui m'ont permis d'avoir un catalogue d'environ 60 titres inédits et de « coups de cœur » pour beaucoup de jeunes écrivains, poètes et bédéistes et parmi eux nombre de femmes, j'ai pris la décision, la mort dans l'âme, de mettre la clé sous le paillasson après mûre réflexion et non pas sur un coup de tête puisque cette décision mûrissait depuis 2 ou 3 ans déjà, mais que je ne cessais de reporter dans l'espoir de voir la situation financière de ma maison d'édition et celle du secteur de l'édition s'améliorer. Hélas, mon attente a été vaine. Les raisons qui m'ont amené à prendre cette grave décision tiennent à la fois du fait général et du fait personnel. Sur un plan général, ma conviction est faite aujourd'hui qu'il n'existe aucune volonté politique, à quelque niveau que ce soit, de mettre en place une réelle politique nationale du livre fondée sur une vision économique moderne et non folklorisante rentière de la culture. Cela plus de 10 ans après la tenue par le Syndicat professionnel du livre en 2003 des 1res Assises nationales du livre qui en avaient jeté les fondements, tracés la voie à suivre et esquissé l'avant-projet de la loi sur le livre. Il est regrettable de constater qu'aucune des 40 recommandations arrêtées par les Assises n'a été traduite sur le terrain comme le prix unique du livre, la mise en place d'une centrale de la distribution, l'encouragement de la création de librairies, l'aide à l'exportation du livre algérien, l'aide à la traduction, la suppression des taxes, etc. Et quand cela est arrivé, la résolution était vidée de son contenu comme l'introduction de la lecture à l'école. Sur un plan personnel, il m'était difficile de continuer de financer sur fond propre – et parfois en mettant la main à la poche – la publication d'ouvrages non rentables comme les recueils de poésie et en refusant catégoriquement et par principe de faire participer financièrement les auteurs – ce qui revient à faire de l'édition à compte d'auteur déguisée – ou d'attendre les subsides du Fonds d'aide du ministère de la Culture ou les manifestations occasionnelles. Par ailleurs, le nombre réduit de librairies ne permet pas d'écouler les ouvrages publiés et quand il arrive que des titres « marchent », la majorité des libraires ne fait pas de réassort. Les petites sommes récupérées au bout de plusieurs mois auprès des libraires ne permettent même pas de couvrir l'investissement pour pouvoir continuer l'activité… Les impôts, la Casnos, les auteurs et les prestataires de services eux n'attendent pas… Sans fonds de roulement conséquent et sans prêts bancaires, il est impossible non pas de faire vivre l'entreprise, mais seulement de la faire survivre…

– Le gouvernement va arrêter ses subventions aux maisons d'édition. Certains professionnels du secteur pensent que c'est une bonne chose, car cela soutenait parfois artificiellement le secteur, d'autres critiquent cette décision : de quel côté êtes-vous ?

Je pense que le rôle d'un gouvernement est de mettre en place – avec la collaboration active des professionnels du secteur – une politique nationale du livre dans le cadre d'une politique des industries culturelles – et des organismes efficients et crédibles pour sa mise en œuvre comme le Centre national du livre. Comme le régime en place a une politique politicienne et utilitariste de la culture pour des besoins de propagande, il agit en distribuant sur des bases clientélistes et népotismes la rente à travers des organismes dépendant du ministère de la Culture comme l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel à différents soutiens de sa politique, des soutiens qui se sont enrichis ces 15 dernières années en bénéficiant grâce à leurs entrées, leur proximité des cercles de décision, leur position de privilégiés ou leur poste, parfois indûment occupé – commissaires de festivals et autres – notamment durant les « années Toumi ». Beaucoup de ces maisons d'éditions ont des activités multiples et variée : imprimeurs, importateurs, distributeurs, libraires, boîtes de communications. Certaines maisons peuvent être suspectées de délit d'initiés voire de concussion. C'est ainsi que des sommes énormes sont passées du fond public vers des fonds privés à l'occasion des différentes manifestations, de l'Année de l'Algérie en France à Constantine, capitale de la culture arabe, en passant par le 2e Festival culturel panafricain, la commémoration du 50e anniversaire de l'Indépendance, Tlemcen, capitale de la culture islamique, mais aussi des 700 festivals organisés chaque année. Sans parler des dizaines de maisons d'édition fictives – dont la presse s'est fait l'écho, mais sans aller plus loin dans l'enquête – créées uniquement dans le but de bénéficier de cette manne, à l'instar de cet « éditeur » dont l'opportunisme n'a d'égal que l'inculture qui en avait créé en 2003, à l'occasion de l'Année de l'Algérie en France, au nom de ses proches pour capter le maximum de titres et donc de bénéfices et qui, de plus, s'en vantait publiquement auprès de membres de la commission de sélection dont il faisait partie ! La suppression de ces aides permettra la décantation du secteur en séparant le bon grain de l'ivraie, à condition que les aides du Centre national du livre, une fois opérationnel, se fassent sur la base de critères rigoureux concernant le choix des titres et l'exigence de qualité aussi bien dans la forme que dans le fond.

– Selon une enquête publiée dans El Watan le 9 novembre, le marché du livre est l'objet de gros enjeux financiers. On y apprend que le ministère de la Culture a subventionné l'édition ou la réédition d'1 millier de livres à plus de 1000 exemplaires chacun pour Constantine capitale de la culture arabe, ce qui représente 50 à 100 millions de DA.

Ce serait intéressant de mener une vraie enquête journalistique non seulement sur cette manifestation, mais sur toutes les grosses manifestations organisées depuis L'Année de l'Algérie en France en 2003 à Constantine, capitale de la culture arabe en 2015 en passant par le 2e Festival culturel panafricain en 2009, Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011 et la commémoration du 50e anniversaire de l'indépendance de l'Algérie pour voir les sommes allouées à l'édition d'ouvrages, à qui ont bénéficié les « aides », le nombre de titres par maison d'édition, les tours de passe-passe qui ont consisté à « fourguer » des invendus en les « labellisant », etc. Les chiffres et les noms des maisons existent aussi bien au ministère de la Culture qu'à la Bibliothèque nationale d'Algérie.

– Il existe aujourd'hui un millier de maisons d'édition, importateurs compris. Les Algériens aiment lire comme le montre l'affluence record du SILA de 1,4 million de visiteurs. Pourtant il existe très peu de librairies. Comment expliquez-vous cette distorsion ?

Il existe en tout et pour tout 290 maisons d'édition selon le chiffre fourni par le commissaire du Sila dans sa conférence de presse de clôture de la 20e édition et on peut le considérer comme réel sur la base de leur participation. Même ce chiffre ne signifie rien pour moi, la majorité de ce qu'on appelle des éditeurs est avant tout constituée de « commerçants » qui n'ont rien à voir avec le livre et l'édition. La majorité d'entre eux n'a aucune ligne éditoriale, aucune spécialité, ne signe pas de contrat avec les auteurs, les fait souvent payer pour éditer leur livre, ne paie pas les droits d'auteurs, n'attend que les « subventions » occasionnelles pour publier, ne déclare pas la totalité des tirages, ne facture pas ou peu, etc. Le nombre de vraies maisons d'édition qui répondent aux critères ne dépasse pas la vingtaine.
Le Sila est l'arbre qui cache… le désert. Le lieu naturel du livre est la librairie, mais en l'absence de librairies et de libraires professionnels, il est normal que les lecteurs se ruent par milliers vers le Salon du livre une fois l'an… Ils font des provisions de lecture pour l'année et les responsables qui pérorent et pavoisent sur le nombre de visiteurs ne veulent pas voir la misère culturelle et intellectuelle qui règne sur l'Algérie le reste de l'année… À 50 km d'Alger où le nombre de librairies professionnelles déjà est ridicule, que vous alliez vers le Sud, l'Est ou l'Ouest, il n'y a quasiment plus de librairies… Exemple ? La wilaya de Laghouat, pôle universitaire de 25 000 étudiants, toutes disciplines confondues, qui compte plus de 500 000 habitants ne dispose que d'une seule librairie située dans le chef-lieu de wilaya !
Hormis les métropoles dont la population est de plus de 300 000 habitants qui se comptent sur les doigts d'une seule main et où l'on trouve quelques librairies, notamment à Alger et Oran, la très grande majorité des grandes villes d'au moins 100 000 habitants, des villes moyennes d'entre 50 000 et 100 000 habitants sans parler des petites villes dont la population est comprise entre 20 000 et 50 000 habitants ne dispose d'aucune librairie ! Et de bibliothèques de wilaya ou communales souvent non plus. En ajoutant à cette situation anémiée de la librairie, l'inexistence d'une ou de centrales de distribution fiable, on comprend pourquoi des ouvrages tirés à 500 ou 1000 exemplaires mettent plusieurs années à être écoulés et pourquoi tous « les gens du livre » de l'Algérie prennent d'assaut le Sila ! Supprimez l'arbre et il ne restera que le… désert !

– 8 livres vendus sur 10 sont importés. En 2014, ils venaient surtout du Qatar, qui représente en valeur un tiers des importations algériennes. Qu'est-ce que cela dit de notre marché du livre ?

Cela dit simplement que nous avons, comme pour tout le reste des produits dont notre pays a besoin, un marché du livre dominé par l'importation. Notre production en termes de nombre de titres et de nombre d'exemplaires par titre est ridicule ! Une moyenne de 800 exemplaires par titre pour un pays qui compte 40 millions d'habitants, 8 millions d'enfants scolarisés et 2 millions d'étudiants !
Cela dit aussi que faute d'une réelle volonté politique de mise en place d'une politique nationale du livre, l'Algérie restera à la traîne dans ce domaine. Par politique nationale du livre, j'entends, selon la définition de l'Unesco, « une volonté politique de considérer le livre comme faisant partie d'un secteur culturel économiquement stratégique ; une conception globale du secteur du livre qui constitue en soi une chaîne articulée ; un consensus État/Secteur privé en vue de stimuler la création littéraire, créer un environnement fiscal et financier favorable à l'éditeur et à l'industrie graphique, favoriser le commerce et la distribution du livre au moyen de :
– tarifs postaux préférentiels et de l'élimination des taxes douanières ou autres à l'importation,
– renforcement des mécanismes de distribution, modernisation des librairies et soutien à la librairie de proximité,
– l'adoption par le Secteur, de codes de conduite dans les pratiques commerciales,
– mesures incitatives à l'exportation.
– développer le réseau national de bibliothèques et mettre en place des campagnes de lecture.
L'adoption d'un cadre juridique contenant l'ensemble des mesures concernant le livre ; l'engagement dans la formation des ressources humaines pour tous les métiers du livre.
C'est en ce sens que nous avions organisé en 2003, avec mes camarades du Syndicat professionnel du livre et le soutien de l'Unesco, de la Bibliothèque nationale d'Algérie, de l'Office national des droits d'auteur et des droits voisins, les 1res Assises nationales du livre qui, après une semaine de travaux ininterrompus, ont réussi l'exploit de tracer les grandes lignes d'une politique nationale du livre, de proposer un avant-projet de loi sur le livre et un mémorandum contenant plus de 40 propositions réalistes et faciles d'application pour l'ensemble de la chaîne du livre. La politique suivie n'est hélas ! pas allée dans ce sens et aujourd'hui, nous nous retrouvons quasiment au même point ! La conclusion à tirer est évidente.

– À quoi sert selon vous le Centre national du livre ?

Il aurait dû servir à quelque chose ! Crée en 2009, il y a de cela 7 ans, le temps qu'a mis l'Algérie combattante pour se libérer du colonialisme français, le CNL qui devait être pour l'ex-ministre de la Culture Khalida Toumi « le cœur battant de la politique nationale du livre » est à l'arrêt, paralysé par des questions de prérogatives, de manque d'autonomie par rapport à sa tutelle, de querelles de chapelles, de luttes d'influence et de luttes intestines qui ont en fait un organisme sur papier sans aucune efficacité ou fait notable à ce jour.


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