Il reste qu'il est difficile de positionner le curseur entre le programme de CFV et l'amnistie fiscale car : – d'un côté, les modalités d'application intègrent des mesures incitatives comme la tolérance : a. pour l'achat de biens par les modes de règlement rendus obligatoires, en montant équivalent de liquidités déposées auprès de la banque ; b. à défaut d'une adhésion volontaire au programme de CFV, pour les personnes déposant des fonds, dont le montant est inférieur à dix millions de dinars qui font l'objet, dans le cadre du processus «d'inclusion financière», d'un traitement normal de leurs dépôts au niveau des agences bancaires sur l'ensemble du territoire national ; c. Sur l'origine des fonds ou les transactions qui doivent être légitimes et ne correspondre à aucun acte incriminé par le code pénal et la législation régissant la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme ; sur ce sujet, la référence expresse au code pénal et non aux dispositions pénales des différents codes fiscaux qui sanctionnent la fraude fiscale devrait consacrer une forme d'amnistie. – D'un autre côté, le programme n'est pas : a. une alternative à l'abandon de poursuites de pratiques frauduleuses ; b. un dispositif d'amnistie totale ; c. un système de déclarations visant à rectifier volontairement la situation fiscale sans subir les poursuites et peines normalement prescrites par les codes fiscaux. La confusion entre le programme et l'amnistie, par déclarations de presse interposées, n'aura pas suffisamment mis en exergue la véritable source de ce programme, pourtant clairement exprimé dans l'exposé des motifs : celui de la conformité aux orientations du GAFI. Mise en conformité aux orientations du GAFI Concours de circonstances ou opportunité d'argument au moment d'une recherche de ressources additionnelles ? C'est dans ce cadre que la loi de finances complémentaire pour 2015 a inscrit le programme de CFV pour augmenter les recettes fiscales et tenter de bancariser la masse monétaire de l'économie informelle. Le Groupe d'action financière (GAFI) qui s'est imposé comme normalisateur en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme (LBC/FT) et de la prolifération des armes de destruction massives a élaboré une série de recommandations reconnues par une majorité de pays. Le GAFI a notamment encouragé la mise en place de «Dispositif de Régularisation Fiscale Volontaire» défini comme tout mécanisme conçu pour faciliter la régularisation de la situation fiscale d'un contribuable à l'égard de fonds ou autres actifs qui n'avaient précédemment pas été déclarés ou dont la déclaration avait été faite de manière incorrecte. Cet organisme a notamment publié, en octobre 2012, un document révisé intitulé «Meilleures pratiques dans la gestion des implications des politiques LBC/FT dans le cadre des dispositifs de régularisation fiscale volontaire». Le GAFI qui surveille les progrès réalisés par ses membres dans la mise en œuvre des mesures requises, examine les techniques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme ainsi que les mesures permettant de lutter contre ces phénomènes ; il encourage également l'adoption et la mise en œuvre des mesures adéquates au niveau mondial. L'Algérie qui est membre du GAFI et qui malgré une série de procédures et d'implémentation de lois et de réglementations de type LBC/FT ne réussissait à dépasser le stade de pays ne réalisant pas de progrès suffisant et nécessitant une attention sur les risques associés aux déficiences, vient de rejoindre un groupe mieux considéré : celui des pays qui ont développé un plan d'action avec le GAFI pour remédier à ces insuffisances. L'implémentation du programme de CFV n'est donc pas fortuite Pour l'instant, l'échéance du 31 décembre 2016 maintient les assujettis concernés à une position de veille, avec leur propre évaluation du risque associé à la fraude fiscale combinée à l'abandon du cercle de l'économie informelle, pour décider, si, in fine, ils doivent prendre ou non le chemin des guichets de banque. Auront-ils intégré qu'en faisant de la sorte, ils créditeront leur pays d'une bien meilleure image dans un environnement où les classements font référence ? Il faudrait qu'ils en soient formés et informés, car la culture des bonnes pratiques est un élément de patriotisme économique exercé avant tout individuellement.