Une tentative de coup d'Etat mené par un groupe de soldats contre le président Ali Bongo, malade et absent du pays depuis deux mois et demi, a échoué hier au Gabon. Un groupe de militaires est apparu hier à l'aube à la radio-télévision nationale et a appelé à un soulèvement. Dans l'après-midi, la Présidence a annoncé que le chef du commando, qui s'est présenté comme étant le lieutenant Ondo Obiang Kelly, commandant-adjoint de la Garde républicaine (GR) chargée de la protection de la Présidence gabonaise, a été arrêté et deux autres membres ont été tués, affirmant que «la situation est sous contrôle». Les forces de sécurité ont «pris le bâtiment (de la radio) d'assaut, abattu deux membres du commando et libéré les otages», selon le communiqué. Les six membres du commando, après avoir «neutralisé» les gendarmes devant la RTG ont «intercepté et séquestré cinq journalistes et techniciens» et lu leur communiqué, selon la même source. C'est le chef du commando qui a lu ledit communiqué à travers lequel il exhorte l'armée et la population à se soulever. Il s'est dit président d'un Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité du Gabon (MPJFDS), jusque-là inconnu. Il «demande à tous les jeunes des forces de défense et de sécurité et à toute la jeunesse gabonaise de se joindre à nous», et annonce la prochaine formation d'un «conseil national de restauration» afin de «garantir au peuple gabonais une transition démocratique». «Nous ne pouvons abandonner la patrie», a-t-il déclaré, qualifiant d'«illégitimes et illégales» les institutions mises en place durant l'absence du Président. Comme il appelle «tous les hommes du rang et les sous-officiers» à se procurer «armes et munitions» et à «prendre le contrôle» des points stratégiques dans tout le pays, comme les édifices publics et les aéroports. Il demande à la population de les soutenir «pour sauver le Gabon du chaos». Victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) le 24 octobre dernier en Arabie Saoudite, le président Ali Bongo a été transféré ensuite à Rabat, au Maroc, où il poursuit depuis sa convalescence, sans qu'aucune date n'ait été fixée pour son retour au pays. La vacance du pouvoir n'a pas été déclarée en son absence. La Cour constitutionnelle a transféré une partie des pouvoirs du Président au Premier ministre et au vice-Président. Le gouvernement ne fait qu'assurer les affaires courantes. Le 31 décembre, le président Bongo a pris la parole depuis Rabat, pour la première fois depuis son hospitalisation. Le président gabonais a succédé en 2009 à son père Omar, à la mort de ce dernier. Il a été réélu en 2016. L'indépendance confisquée Ancienne colonie française, pays de l'Afrique centrale, le Gabon proclame son indépendance le 17 août 1960. En février 1961, Léon Mba devient président. Trois ans plus tard, il est déposé lors d'un coup d'Etat puis réinstallé grâce à une intervention de l'armée française. Lui succède à sa mort en décembre 1967, Albert-Bernard Bongo qui impose en mars 1968 le Parti démocratique gabonais comme parti unique. Converti à l'islam, il devient Al Hadj Omar Bongo. Seul candidat, il est élu président en 1973, 1979 et 1986. En avril 1990, le multipartisme est adopté. En mai-juillet de la même année, l'opération militaire «Requin» permet à Paris de rétablir l'ordre à Libreville après des émeutes. Officiellement, elle est destinée à l'évacuation des ressortissants français. Mais Omar Bongo remporte toutes les présidentielles (1993, 1998 et 2005). Scrutins tous contestés. En 2010, la justice française ouvre une enquête sur le patrimoine amassé en France par Omar Bongo et d'autres chefs d'Etat africains (affaire des «biens mal acquis»). En 2014, le journaliste français Pierre Péan affirme, dans son livre Nouvelles affaires africaines, que Ali Bongo a falsifié son acte de naissance. Démentie par le pouvoir, la thèse soutient aussi que le président est un enfant nigérian adopté par Omar Bongo pendant la guerre du Biafra (1967-1970).Selon la Constitution, il faut être né gabonais pour briguer la présidence. Avant la présidentielle d'août 2016, l'opposition demande en vain l'invalidation de la candidature de Ali Bongo, indiquant qu'il est un enfant nigérian adopté et ne peut ainsi être président. Le 31 août, la commission électorale annonce la réélection de Ali Bongo, devant son adversaire Jean Ping. Le 24 septembre, la Cour constitutionnelle valide la réélection de Ali Bongo. Reportées trois fois, les législatives prévues en décembre 2016 se tiennent en octobre 2018, avec une victoire écrasante du parti au pouvoir.