Après s'être enivrés de rêves du sacre africain et d'une énième revanche sur les Egyptiens, les supporters algériens ont aujourd'hui la gueule de bois. Une ambiance particulière a tout de même régné dans les rues algériennes immédiatement après le coup de sifflet final du match Algérie-Egypte. Les Pharaons avaient peut-être remporté le ticket pour la finale de la CAN, mais les youyous et les coups de klaxon n'ont pas cessé de résonner dans les rues algériennes. Nouveau mot d'ordre : « A eux l'Afrique, à nous le monde. » Pour nombre de supporters, l'équipe nationale n'a pas perdu ce match compte tenu des conditions particulières dans lesquelles il s'est déroulé. « Nous avons perdu contre l'arbitre et non pas contre l'Egypte. Ce sont ceux qui n'ont pas d'hommes qui achètent les arbitres », dit Nassim, 24 ans. Pour lui, le désormais célèbre Koffi Kodjia a privé les spectateurs du beau jeu. « Le match était mort dès la sortie de Halliche, c'est devenu une mascarade et non pas du football. Moi qui espérais voir un match à la hauteur des deux équipes, je suis déçu », considère-t-il. Rétrospectivement, il apparaît aux supporters algériens que ce scénario était prévisible. « Les appels au calme des Egyptiens étaient très bizarres. Il fallait s'attendre à un coup fourré de leur part, d'autant que la CAF a son siège au Caire », croit savoir Abdallah, 46 ans. Il ajoute : « L'équipe égyptienne a de bons joueurs qui n'ont point besoin de l'aide de l'arbitre. Ils n'ont pas gagné dignement. » Certains trouvent que cette défaite a un goût amer au vu des événements particuliers qui ont émaillé les rencontres sportives entre l'Algérie et l'Egypte ces derniers mois. « Il faut dire que c'est un feuilleton palpitant. Tous les ingrédients sont là : le bonheur, la haine, la victoire, la passion, la violence et la tromperie. L'histoire footballistique entre l'Algérie et l'Egypte reste bien singulière », s'enthousiasme Mohammed, étudiant. Ce match n'aura certainement pas participé à apaiser les esprits et renouer les liens entre Algériens et Egyptiens. Dans les rues d'Alger, on crie déjà : « Maâk ya el Khadra, Maâk ya el Ghana », en référence à la finale qui devra opposer l'Egypte au Ghana. Pour d'autres, il est nécessaire de tourner la page de l'Egypte et de regarder vers le Mondial. « Nous allons être dans la cour des grands, quel que soit le complot de jeudi, cela nous importe peu désormais. Nous avons perdu une finale, mais nous avons gagné une belle équipe de football », souligne Rédha, informaticien. Il estime important de tirer profit de cette défaite pour mieux rebondir lors de la Coupe du monde qui aura lieu en Afrique du Sud. « L'enseignement premier de ce match c'est que l'Algérien est très nerveux et il faut apprendre à se contrôler », analyse-t-il. Sur les forums de discussions, les internautes algériens expriment leur soutien indéfectible aux Verts. « Même si l'Algérie a perdu, cette équipe restera dans nos cœurs. Nos valeureux joueurs ont réussi ce qu'aucun Président, aucun politique, aucun dirigeant, aucun intellectuel en Algérie n'a réussi à faire depuis longtemps : redonner le bonheur, l'unité nationale et l'amour de la patrie aux Algériens », écrivent-ils. Mais pour certains, cette défaite pourrait être « bénéfique » dans la mesure où les Algériens vont enfin se préoccuper de leurs véritables problèmes. « Beaucoup de maux rongent notre société : grèves, malversations, érosion du pouvoir d'achat... Il est grand temps de revenir à nos véritables soucis. La pomme de terre est à 70 DA, la tomate 120 DA, les poivrons à140 DA, l'ail à 400 DA, le sucre à 100 DA..., il est temps de se réveiller », nous dit Ali, employé dans une entreprise privée. La fièvre des Verts devrait encore atteindre son paroxysme en juin prochain, pour la Coupe du monde de football.