A la fois poétesse, écrivaine, traductrice et philosophe, Rabéa Djelti est revenue, avec toute la modestie qu'on lui connaît, sur la trame de son dernier roman. Ce roman a été finalisé au bout de deux ans d'écriture. Rabéa Djelti indique qu'elle s'est toujours inspirée de ses voyages et de ses rencontres multiples avec l'autre pour écrire ses romans. Sa dernière publication, Nostalgie à la menthe — disponible au Liban et en Algérie (El Ikhtilef) —, met l'accent sur une histoire qui se passe à Oran, à Paris et à Damas. Ces trois villes qui se conjuguent dans son roman sont en fait les vraies escales de la vie de Rabéa Djelti en tant qu'étudiante, poétesse, professeur et être humain. «Dans ces trois villes où j'ai vécu, dit-elle, j'ai vu beaucoup de choses. J'ai vécu, par exemple, à Oran durant la décennie noire, à Damas pendant la guerre, et également à Paris.» Le personnage principal de Nostalgie à la menthe est Dhaouia. Une jeune fille à la beauté impressionnante. Un beau jour, elle se rend compte qu'elle a des ailes. Ces dernières poussent à vue d'œil. Sa grand-mère Nouha se rend compte très vite du changement physique de sa petite-fille. Quelque chose de grave va arriver sur Terre. Cette dernière va être engloutie par l'eau. Dans son roman, Rabéa Djelti indique que tout le monde va mourir. «Sauf qu'il y a un sixième continent qui est quelque part entre les astres où se retrouvent intellectuels, musiciens, physiciens et scientifiques, tels que Beethoven, Mozart, Socrate et Platon. Ces cerveaux qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes se retrouvent dans ce sixième continent que personne ne voit, sauf Dhaouia». Ces personnes qui évoluent dans ce sixième continent sont tous ailés. Après que la Terre ait été engloutie par l'eau, elle va tourner à une vitesse exponentielle jusqu'à ne plus s'arrêter. Par la suite, ce sixième continent va descendre sur la nouvelle Terre. La démarche de Rabéa Djelti repose sur le fait que c'est le cerveau qui va aider la Terre à surpasser ce que l'on vit maintenant. Elle explique d'ailleurs, devant l'assistance nombreuse, qu'elle est peinée, en tant qu'être humain, de tout se qui se passe actuellement dans le monde. Son roman traduit tout ce malheur, et ce, à travers les haltes qu'elle a effectuées dans les trois villes phares qu'elle a eu à découvrir et à connaître. Ces trois escales ont été un prétexte pour venir raconter la tourmente de l'auteure. Dans ce roman, Rabéa Djelti note qu'on retrouve tout ce qui s'est passé à Paris et à Bruxelles. «A chaque fois qu'il y a des choses horribles qui se passent, je me dis mais pourquoi ils ne sont pas visionnaires. Dans le roman, il y a le vécu et l'imaginaire. Mais l'imaginaire est tissé à partir de la matière réelle», argue-t-elle. Pourquoi ne pas parler de ces trois villes, sachant qu'Oran a vu naître Rabéa Djelti. Une ville aussi où elle a failli mourir également durant la décennie noire. «Il y a des choses, ajoute-t-elle, qu'on ne peut pas oublier et qu'on ne peut pas garder au chaud. Cette ville reflète ma personnalité, ma famille, ma vie, mon existence sur Terre. A Damas, j'ai vu des gens extraordinaires. J'ai vu comment les communautés vivaient entre elles dans la joie et l'entente. J'ai été subjuguée par ce genre de vie à Damas, où je suis restée six ans pour mon magister et mon doctorat.» Par ailleurs, profitant de cette rencontre littéraire, Rabéa Djelti a révélé que la langue arabe est actuellement en difficulté. Elle pourrait même mourir. «On croit, dit-elle, que la langue arabe est vénérée alors qu'on ne vénère pas une langue. Il faut qu'elle soit à l'image de toutes les autres langues. Elle doit descendre dans la rue. De plus, la langue arabe ne pourra jamais être irriguée, sauf si celui qui l'écrit doit parler d'autres langues. La langue arabe est en danger. Il faut que les intellectuels, ceux qui utilisent cette langue aient une autre langue pour lire et s'instruire. La langue arabe semble être enfermée dans cave. Il faut la laisser s'aérer et se moderniser.» Il est à noter que Nostalgie à la menthe sera disponible en langue française d'ici la fin de l'année 2016.