Tayeb Belaïz, ministre de la Justice, a estimé hier que « la corruption, sous toutes ses formes, est un phénomène que les sociétés ont de tout temps connu » et qui doit être « traité dans la sérénité ». Le ministre répliquait à une question qui évoquait les scandales de corruption qui ont éclaté ça et là ces derniers jours en Algérie. Peu convaincant dans ses réponses, M. Belaïz s'est laissé prendre dans des déclarations incompréhensibles qui étaient loin de constituer une réaction de premier responsable en charge de la justice, une institution appelée à trancher dans des questions si lourdes. Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, a déclaré que « la corruption a existé dans les anciennes sociétés et l'est aussi toujours, même dans les pays se disant des plus développés et disposant de systèmes de gestion les plus transparents ». Ses déclarations ont été reprises par l'agence publique APS, à l'occasion de sa visite effectuée hier dans la wilaya de Ouargla. Très évasif, M. Belaïz a ajouté sur sa lancée : « Nous voyons ce qui se passe à travers le monde. La corruption, comme dans tous les autres pays, est un fait de société. » Visiblement, le ministre semble ignorer, tout comme son collègue du gouvernement Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines, qu'il s'agit bel et bien d'une corruption institutionnalisée, atteignant des proportions gravissimes et engageant les deniers publics, et donc loin d'être un « fait de société ». Si, aux yeux du ministre, le scandale Sonatrach n'est qu'un « fait de société », sa réaction serait la même pour les autres scandales de corruption liés notamment à l'affaire Khalifa, à l'autoroute Est-Ouest, aux concessions agricoles et à l'affaire du Haut-Commissariat pour le développement des steppes,etc. Pour le ministre, l'Algérie a mis en place un arsenal juridique afin de combattre la corruption, citant, à titre indicatif, la loi de 2006. « A ce jour, les institutions de l'Etat opèrent sur ce plan, mais ont besoin de travailler dans la sérénité et la sagesse, sans effet tapageur » car, a-t-il estimé, il est du propre de la justice de ne pas trop parler, en raison, entre autres, du secret de l'instruction, de la présomption d'innocence et d'autres réserves. D'après le ministre, « depuis la parution de la loi de 2006, voire depuis le 2e semestre 2006 jusqu'à 2009, la justice algérienne a prononcé 5575 condamnations dans des affaires liées à la corruption, sans compter les affaires en instruction ou en cours de traitement judiciaire ». M. Belaïz a insisté sur le fait que « toute personne est innocente jusqu'à preuve de sa culpabilité et jusqu'à ce que le jugement la condamnant devienne définitif ».