Depuis quelques jours, le nouveau code de la route est entré en vigueur. Pas de grosse surprise : les législateurs algériens, habitués à aller vers toujours plus de répression, jusqu'à la sanction de prison, pour gérer tous les phénomènes de société qui leur échappent, ont encore montré leur paresse intellectuelle. Mais bref, les prisons sont faites pour ça et l'Algérie en est une grande. Sauf que dans ce nouveau code, le piéton, l'homme qui marche debout, cet homo erectus marchus anarchicus, est visé, pour la première fois depuis l'indépendance, là même où le populisme a longtemps expliqué que le pauvre est supérieur au riche et le piéton toujours plus respectable que l'automobiliste. De quoi s'agit-il ? De verbaliser ceux qui traversent n'importe où et ceux qui, au lieu d'emprunter les trottoirs, utilisent la chaussée pour marcher. L'idée est bonne, il est temps d'apprendre aux gens à circuler comme des gens pour qu'ils arrêtent de se prendre pour des voitures. Sauf que l'Algérien étant par nature hostile à l'ordre, comment verbaliser ces milliers d'anarchistes qui n'ont pour but que de faire le contraire de ce que chacun fait ? C'est là où la DGSN va montrer son utilité ; les centaines de milliers de policiers recrutés n'ont pas réussi à faire baisser le taux de délinquance mais vont enfin servir à quelque chose. La chasse au piéton va commencer, avec des rafles sauvages aux abords des trottoirs. L'Algérie ayant excellé dans la chasse aux espèces en voie de disparition – les outardes, les gazelles, les alcooliques, les femmes émancipées et les militants des droits de l'homme – passe aujourd'hui à la chasse aux espèces en voie de prolifération. C'est bon signe. Demain, la chasse aux corrompus ? Non, faut pas précipiter les choses, comme dirait Belkhadem qui vient de refuser la loi anticorruption sous prétexte qu'on a le temps. Lui en a. Il a même une voiture.