Les dernières nouvelles en provenance de Syrte font état que les forces de l'opération «Bloc soudé», relevant du gouvernement de réconciliation nationale, se sont emparées, mercredi et jeudi, de l'hôpital central Ibn Sina, de l'université, du complexe Ouagadougou, des palais d'hôtes et de la cité Dollar à Syrte. Ces lieux constituaient les aires de commandement de Daech dans la ville natale d'El Gueddafi. La direction politique et les milices terroristes de l'Etat islamique ont dû lâcher ces lieux d'autorité dans cette ville, qu'ils contrôlaient depuis juin 2015. Les milices de Daech marquent leur présence dans un petit réduit au quartier Trois et dans quelques zones périphériques à Syrte. Leur danger est matérialisé, surtout, par leurs snipers, les mines qu'ils ont semées dans les artères de la ville, ainsi que les kamikazes qui peuvent surgir n'importe où à Syrte, selon Ridha Issa, membre du bureau de communication de l'opération «Bloc soudé». Ridha Issa demande aux habitants des quartiers touchés par les combats de rester chez eux, de ne pas sortir, en attendant le contrôle des unités de déminage pour sécuriser les lieux.Selon son bureau de communication, l'opération «Bloc soudé» contre Daech à Syrte a engagé près de 6000 hommes, notamment de Misrata. On déplore près de 370 morts et 1500 blessés, ainsi que la perte d'un avion, un Mig 21, avec lequel les liaisons ont été rompues avant-hier alors qu'il attaquait les positions de Daech dans la ville. Les Américains parlent de 29 attaques aériennes contre des positions de Daech à Syrte depuis le 1er août. Attentisme Ce qui se passe à Syrte rappelle l'évolution de la situation à Benghazi. En effet, depuis février dernier, la majeure partie de la ville de Benghazi a été reprise par les forces du général Haftar, qui ont délogé les milices de Majlis Choura Benghazi, une alliance entre Daech et Al Qaîda. Jusqu'à maintenant, les troupes de Haftar continuent à épurer la ville de Daech et ses alliés, qui conservent un petit réduit à l'ouest de Benghazi (Gaouarcha) et un autre au centre-ville (Sabri). «Les troupes de l'armée libyenne sont en train de prendre les terroristes à l'usure, notamment au centre-ville, près du marché aux poissons où il y a des immeubles et l'ancien souk», selon Asma Sahd, correspondante de l'agence Dune-voices à Benghazi. Pour le journaliste Maher Aouami, originaire de Benghazi et qui a visité Syrte alors sous occupation de Daech, «il faut s'attendre à une période d'attentisme avant le retour à la vie normale à Syrte, car Daech dispose de cellules dormantes qui peuvent faire mal à Syrte, Tripoli et dans plusieurs autres villes libyennes». La même prudence a été observée par Mahmoud Jibril, ex-directeur exécutif du Conseil national de transition, qui a détrôné El Gueddafi. «La vraie bataille contre Daech se déroulera à Tripoli», selon Jibril, qui considère que «Fayez El Sarraj ne dispose d'aucune assise forte à l'intérieur de la Libye puisqu'il n'y a pas de forces régulières sous son autorité». La transition en Libye ne bloque pas uniquement à cause de Daech et ses alliés du conseil de la Choura des moujahdine (Al Qaîda), aussi bien à Syrte qu'à Benghazi ou Derna. Beaucoup à faire Le gouvernement de réconciliation d'El Sarraj, né de l'accord de Skhirat du 17 décembre 2015, n'est pas encore validé par le Parlement de Tobrouk, comme le stipule l'accord. L'armée n'a pas été unifiée et les centaines de milices conservent un pouvoir réel sur le terrain. L'envoyé spécial de l'ONU, Martin Kobler, essaie désespérément à réunir les Libyens. Mais, les forces de Misrata et l'armée du général Haftar se divisent l'autorité sur la Libye. La ville de Misrata est soutenue par les Turcs et les Qataris. Haftar est soutenu par l'Egypte, la Jordanie et les Emirats. Les dernières révélations ont montré que les deux bords sont soutenus par les Services spéciaux français, italiens, britanniques et américains. L'Egypte est parvenue à réunir la semaine dernière Fayez El Sarraj et le président du Parlement, Salah Akila, en vue de faciliter la réunion du Parlement afin qu'il accorde sa confiance au gouvernement. Ces pourparlers se poursuivent. Mais la question de la place de Haftar dans la hiérarchie militaire continue à poser problème. Le Parlement le considère comme chef d'état-major de l'armée libyenne et insiste sur le fait que c'est le Parlement qui nomme le commandement de l'armée. El Sarraj veut que ce soit le gouvernement qui décide de l'octroi de cette autorité. Le dénouement du scénario libyen ne se limite pas au sort de Daech.