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Archives : Saddam Hussein interrogé par le FBI
Publié dans El Watan le 19 - 02 - 2010

En décembre 2003, Saddam Hussein est fait prisonnier par les forces américaines. En janvier et février 2004, il est longuement interrogé par le FBI, qui le livre ensuite à la justice irakienne. Pour l'histoire , El Watan Week-end vous livre les bonnes feuilles de cet interrogatoire.
L'arrivée au pouvoir
Un jour de 1979, Bakr (militaire et membre du Baas, président de la République d'Irak de 1968 à 1979, dont Hussein fut le vice-président, ndlr) m'a contacté et m'a demandé de le retrouver à son bureau, au palais. Il m'a annoncé qu'il n'avait plus la volonté ni la capacité d'être Président. Il m'a supplié d'assumer ses fonctions, en me disant que si je n'acceptais pas la méthode classique, il annoncerait la nouvelle à la radio. Je lui ai répondu que cette façon d'annoncer sa succession ne serait bonne ni pour le pays ni pour le peuple ou le Parti. A l'étranger en particulier, on penserait que quelque chose n'allait pas en Irak. (...) En janvier 1979, le Conseil de commandement de la Révolution (CCR, organe de décision du parti) a été convoqué. (...) C'était comme une réunion de famille. Nous sommes passés par toutes les émotions, y compris la tristesse. Le changement de présidence a été mené en accord avec la constitution. Un vote a été organisé.Je ne me souviens plus s'il s'est effectué à bulletin secret ou à main levée. J'ai été désigné secrétaire général du Parti et président de l'Irak.
Avez-vous été changé par votre accession à la présidence ?
Non, je suis simplement devenu plus fort et plus proche de mon peuple. (...)
Que seriez-vous devenu si l'on vous avait permis de quitter le gouvernement ?
Une personne lambda, un fermier peut-être. Mais j'aurais continué à être membre du Parti et à me rendre aux réunions.
Quelle était l'importance de la résistance koweïtienne durant l'occupation et quels efforts les services de renseignement irakiens ont-ils fait pour y mettre un terme ?
Je n'ai aucune réponse à apporter sur cette affaire.
Pouvez-vous être plus précis ?
Je ne suis pas de ceux qui abandonnent leurs amis.
Quelle était votre politique concernant les prisonniers de guerre quand vous étiez au pouvoir ?
Je ne suis pas l'ancien président de l'Irak, je suis le président de l'Irak. Je respecte toujours la volonté du peuple. L'Irak respecte la Convention de Genève et demande aux autres pays d'en faire autant. Dans mes discours, j'ai toujours demandé aux soldats de respecter la convention et de rester fidèle à leurs principes religieux. (...)
La déclaration de guerre contre l'Iran en septembre 1980 était-elle motivée par les menaces iraniennes ou par la volonté de récupérer l'estuaire de Chatt Al Arab et les territoires occupés ?
La guerre a débuté le 4 septembre et non le 22, comme l'affirment les Iraniens. Imaginez, un jour, votre voisin roue de coups votre fils... Le lendemain, il martyrise vos vaches. Puis il endommage votre exploitation en déréglant le système d'irrigation. Après un certain nombre d'incidents, vous finissez par aller le voir, vous vous plaignez des dégâts occasionnés, vous le sommez d'arrêter, poursuit Hussein, qui affectionne les métaphores rurales. Généralement, un avertissement suffit, mais avec l'Iran, ça n'a pas été le cas. L'Iran a violé les Accords d'Alger, un traité que nos deux pays avaient signé en 1975 et qui légiférait sur les modalités de navigation sur le Chatt al-Arab. L'Iran a également interféré dans la politique irakienne, ce qui constituait une violation caractérisée de notre accord. L'Irak n'a pas eu d'autre choix que de déclarer la guerre, afin de mettre un terme à l'ingérence de l'Iran. (...)
L'utilisation d'armes chimiques contre l'Iran au cours de la période défensive était-elle une nécessité ? Auriez-vous perdu la guerre sans cela ?
Je n'ai aucune réponse à apporter à cette question. Je ne répondrai pas. (...)
Avez-vous utilisé ces armes à des fins défensives ?
Vous pouvez tourner la question dans tous les sens, je ne vous répondrai pas. Je parlerai de tout, à moins que cela nuise à mon peuple, à mes amis ou à l'armée.
La guerre du Golfe
(...) Lorsqu'un pays est en désaccord avec les Etats-Unis, il est considéré comme un ennemi. Les Etats-Unis ont fait de l'Irak un ennemi pour des raisons économiques. Des groupes de pression américains, comme les fabricants d'armes et certains militaires, ont privilégié la guerre pour des raisons financières. C'est le cas des compagnies qui vendent de tout, des tapis jusqu'aux tanks, afin de soutenir une guerre. L'Amérique a découvert que la guerre en Afghanistan n'était pas suffisante pour faire vivre l'industrie des armes aux Etats-Unis. Ils ont alors déclaré la guerre à l'Irak. Après l'effondrement de l'Union soviétique, toutes ces raisons, internes et externes, se sont combinées pour amener les Etats-Unis à faire de l'Irak leur ennemi. (...)
Vous m'avez clairement dit que vous vous considériez toujours comme le président de l'Irak, bien qu'il soit aujourd'hui entendu que vous ne l'êtes plus puisque les Irakiens ont un nouveau représentant. Vous n'êtes plus le président de l'Irak, c'est terminé.
Oui, je sais, mais que puis-je y faire puisque c'est le choix de Dieu ?
Avez-vous une idée de ce que vous réserve l'avenir ?
Mon avenir est entre les mains de Dieu.
Dieu est très occupé, Il a sans doute des problèmes plus importants que vous et moi. (...) Votre vie touche à sa fin. Voulez-vous que ce qui vous reste d'existence ait un sens ?
Oui.
Vous vous êtes entouré de personnalités faibles qui, aujourd'hui, refusent d'endosser la responsabilité des actions de l'ancien gouvernement. Les autres détenus de haut rang font peser sur vous toutes les erreurs passées.
Qu'est-ce que je peux y faire ? Il faudra sans doute que j'endosse la responsabilité et les blâmes pendant que les autres tenteront de prendre leurs distances et de se déculpabiliser.
Au terme d'un procès fleuve ouvert en juillet 2004, l'ancien Président irakien est condamné à mort et exécuté par pendaison, le 30 décembre 2006.


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