Au moins 10 000 personnes ont défilé à Niamey aux cris de « Vive l'armée nigérienne ! » et « Vive le CSRD ! ». Pour un coup d'Etat, c'est un coup d'éclat ! Une mission internationale, représentant l'ONU et les pays africains, s'est rendue hier à Niamey pour « s'enquérir » de la situation au Niger, où les putschistes ayant renversé le président Mamadou Tandja donnent des gages de bonne volonté pour un retour à la démocratie. « Nous venons nous enquérir ensemble de la situation qui prévaut au Niger », a déclaré à son arrivée Mohamed Ibn Chambas, président de la Commission de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Répondant aux nombreux appels de la communauté internationale, la junte a annoncé, samedi, des élections sans préciser de date. La délégation internationale, dont la visite ne devait durer que quelques heures, a rencontré dans l'après-midi des représentants de la société civile, des partis politiques et des diplomates et devait s'entretenir avec le chef de la junte, le chef d'escadron Salou Djibo. Outre M. Chambas, elle comprenait Saïd Djinnit, représentant du secrétaire général de l'ONU en Afrique de l'Ouest, et Ramtane Lamamra, commissaire à la paix et à la sécurité de l'Union africaine (UA). Jeudi, un « Conseil suprême pour la restauration de la démocratie » (CSRD, junte) a déposé le président Mamadou Tandja à l'issue de combats autour du palais présidentiel. Il a dissous le gouvernement et suspendu la Constitution très controversée adoptée en août 2009. « Notre intention est d'assainir la situation politique, de réconcilier les Nigériens. Nous comptons organiser les élections, mais avant, il faut assainir la situation », a assuré le colonel Djibrilla Hamidou Hima, l'un des hommes forts du CSRD, en marge d'un sommet de chefs d'Etat ouest-africains à Bamako. Autre gage de bonne volonté, les putschistes ont annoncé samedi la libération de ministres qu'ils détenaient. Toutefois, deux responsables de l'ex-parti au pouvoir, le Mouvement national pour la société de développement (MNSD), ont affirmé hier qu'outre le président Tandja, sept d'entre eux resteraient entre mains des militaires. Selon Issoufou Tamboura, responsable de la communication du MNSD, il s'agit des ministres de l'Intérieur, Albadé Abouba, de l'Equipement, Lamido Moumouni, des Finances, Ali Lamine Zène, des Affaires étrangères, Aïchatou Mindaoudou, et des Transports, Issa Mazou. Le vice-président du parti, Ali Sabo, y a ajouté ceux de la Défense, Djida Hamadou, et de la Justice, Garba Lompo. Les ministres avaient été arrêtés lors du coup d'Etat, mené en pleine réunion du Conseil des ministres présidé par M. Tandja. La junte assure que ce dernier se porte bien. Les putchistes se « popularisent » La communauté internationale a largement condamné ce coup et appelé à un retour à la démocratie après avoir vivement critiqué, ces derniers mois, M. Tandja. Estimant que l'armée avait mis fin à la dérive autocratique de Tandja, la rue a donné son appui à la junte. Au moins 10 000 personnes ont ainsi défilé samedi à Niamey, lançant des « Vive l'armée nigérienne ! » et « Vive le CSRD ! ». De nouvelles manifestations pro-junte de « plusieurs milliers de personnes » ont eu lieu hier à Zinder, deuxième ville du pays, a rapporté la radio publique Voix du Sahel, faisant état de manifestations similaires à Dosso (sud) et Tahoua (ouest). Aucun trouble significatif n'a été signalé depuis le coup d'Etat. Le Niger, vaste pays sahélien et important producteur d'uranium, est plongé dans une grave crise politique depuis que M. Tandja, dont le dernier quinquennat s'achevait en décembre, s'était maintenu au pouvoir en faisant adopter une Constitution prolongeant son mandat. Pour protester, la Cédéao avait suspendu le pays et l'Union européenne interrompu son aide au développement.