L'Association des droits des justiciables algériens, dirigée par M. Benagouche, conteste l'interprétation faite par la Chambre nationale des huissiers de justice de l'esprit du code de procédures civile et administrative, particulièrement en ce qui concerne les honoraires fixés par la loi, le décret exécutif n°09-78 du 11 février 2009. Ce « problème » posé par les avocats a été débattu lors d'une table ronde organisée hier à l'hôtel Président, à Oran, sous le thème « Le droit d'accès à la justice », un prélude à une série de rencontres qui seront couronnées vers la fin de l'année par une journée d'étude sur « la justice égalitaire ». Se basant sur un document élaboré le 31 mai 2009 par la chambre des huissiers fixant les honoraires que doit appliquer cette corporation (une lecture et une interprétation faites par les concernés), les intervenants ont considéré, entre autres, que le tarif global de 3048 DA appliqué pour la citation et la remise de celle-ci (1524 DA pour chacun des actes) n'est pas conforme à l'esprit de la loi. « Seule l'autorité administrative est habilitée à fixer les conditions d'application des textes de loi et les organisations corporatistes peuvent seulement expliquer les textes, elles n'ont pas à légiférer », a-t-on considéré lors de cette rencontre en relevant le fait qu'en agissant ainsi, « l'huissier de justice se comporte comme s'il témoigne de la remise d'un document que lui-même remet ». Cependant, ce sont surtout les incidences sur les justiciables qui ont été mises en avant à ce sujet. « Un justiciable qui veut introduire une action en justice pour un litige portant sur une somme de 20 000 DA abandonne facilement lorsqu'on lui signifie qu'il doit s'acquitter, pour un cas précis, d'un montant global de près 6800 DA de frais de l'huissier », constate-t-on. Les exemples donnés, tels que ceux relatifs aux problèmes d'héritage qui engagent plusieurs personnes d'une même famille, traduisent ce qui est considéré comme une difficulté d'accès à la justice. Un intervenant a donné l'exemple d'une affaire qu'il a eu à traiter relative à un problème d'héritage qui concerne 24 héritiers pour un terrain de 75 ha.En faisant le compte, il s'est rendu compte que l'huissier prend 720 000 DA d'honoraires contre seulement 20 000 DA pour l'avocat. « Avant d'être avocat, j'étais juge et je me rappelle qu'avant on allait nous-mêmes dans les mairies des localités rurales pour régler des problèmes juridiques des citoyens. Aujourd'hui, le discours politique est favorable à un rapprochement de la justice du justiciable, mais ces aspects-là ne favorisent pas ce rapprochement », déplore un participant. Un autre intervenant s'est demandé si ce n'est pas le changement de régime du socialisme vers l'économie de marché qui est à la base de ce genre d'interprétations des textes de loi qui pénaliserait les plus démunis.