Le film de Abdelkrim Bahloul sur Jean Sénac Le Soleil assassiné sort en DVD. Pour tous ceux qui n'ont pas eu l'occasion de le voir au cinéma, c'est une belle opportunité à ne pas manquer. Le long métrage est un souffle de vie, une ode à la liberté. Les éditions Montparnasse ont eu l'heureuse idée de sortir en DVD un film particulièrement attachant qui rend hommage à un homme qui continue de hanter la mémoire algérienne. Les assassins de Jean Sénac ont perdu : il n'a jamais cessé de vivre. Cette nuit d'août 1973 est une date honteuse pour l'Algérie. Et c'est pour rendre hommage à un poète engagé, dénigré par les autorités algériennes, à cause de sa liberté et, peut-être, son homosexualité, que Abdelkrim Bahloul a réalisé ce film chaleureux et juste. C'est une ode à la liberté, un hommage à l'engagement. Il était difficile de dire « non » sous Houari Boumedienne. « On veut nous faire croire aujourd'hui que cette époque était idyllique, qu'elle se passait sous les bons auspices de l'indépendance, de la révolution algérienne, du non-alignement. C'est pourtant à cette époque-là que l'on a commencé à opposer les Algériens entre eux, les démocrates contre les islamistes (que l'on appelait à l'époque les Frères musulmans), que l'on a voulu imposer à tout le pays le moule arabo-musulman. Par démagogie, il a été ainsi décidé d'arabiser à marche forcée. L'arabisation, qui a commencé aux alentours de 1972, a été menée de manière tellement hâtive et dogmatique qu'elle ne pouvait aller qu'à l'échec », note le réalisateur dans une interview. Et son film rend très justement compte de cette période où, poussé au suicide ou au départ, Jean Sénac était harcelé parce qu'il s'exprimait en France, parce qu'il était différent, parce qu'il avait refusé de rencontrer le raïs... Les circonstances de l'assassinat de celui qui s'identifiait comme algérien, qui était au FLN, n'ont jamais été élucidées. Charles Berling est époustouflant dans le rôle de Jean Sénac. Il a su trouver le ton juste pour incarner le poète martyr. Un petit reproche pour le DVD : le manque de bonus, comme une interview de Charles Berling et de Abdelkrim Bahloul. Mais on ne va pas bouder pour autant notre plaisir. Un vrai régal.