Demain lundi 8 Mars c'est la Fête internationale de la Femme. C'est aussi la nôtre à nous les hommes. Depuis le prélèvement d'une côte sur Adam et la création d'Eve, la femme n'est en effet rien d'autre que l'autre partie de l'homme…, sa chère moitié. Alors, faisons d'une pierre une double fête. Hélas, comme chaque année, les filles d'Eve n'ont droit qu'à un modeste billet flatteur du genre, un bouquet de fleurs, quelque menu cadeau et une demi-journée de repos, pour aller ensuite vaquer à leurs éternelles occupations domestiques ; sans compter les obligations professionnelles, dès le lendemain, pour celles qui ont la chance de travailler. Certes, comme à son habitude, le mouvement associatif pour la protection des droits de la femme a prévu plusieurs manifestations culturelles à travers la ville d'Oran et ailleurs. Dans cette ambiance festive, les fleuristes font bonne recette. Les portables ne cessent d'appeler pour faire vibrer des cœurs à l'autre bout du fil. Dans deux ou trois jours, les lampions vont s'éteindre. Et puis c'est tout.Femmes de mon radieux pays, permettez-moi à mon tour de vous jeter des fleurs bien méritées. J'en ai plein la corbeille. Ceux qui vous accusent d'être la source des maux sociaux sont des imposteurs et des misogynes qui ont été incapables d'atteindre votre niveau intellectuel et de responsabilité dans le monde du travail. Vous avez réussi à entrer de plain-pied sur les tatamis et les rings, dans les stades et les piscines pour faire flotter notre drapeau sur les podiums du monde. Des sports naguère réservés aux hommes. Vous êtes entrées par la grande porte dans nos chambres parlementaires et nos ministères. Poursuivez donc votre ascension et laissez votre caravane grimper la côte en faisant la sourde oreille aux canidés. Vous avez montré hier votre courage dans le combat libérateur et aujourd'hui dans la construction du pays. Vous n'êtes pas cette hirondelle précoce qui annonce le printemps. Vous n'êtes pas ce rayon de soleil qui éclaire les zones d'ombre de notre morne existence. Vous n'êtes pas non plus celles dont le ventre fécond a le pouvoir de donner la vie. Vous êtes tout à la fois le printemps, le soleil et la vie elle-même de notre vie de tous les jours. Au côté de l'homme, vous êtes un débordement du paradis céleste sur terre. C'est quoi ce code de la famille qui confine la femme dans un statut d'éternelle mineure et dont le calendrier est resté bloqué à l'époque de la « Jahilia » ? La parité ? Allons donc ! Même dans les pays dits émancipés, on n'en est pas encore là. Certes, cela est mieux qu'avant, mais moins qu'ailleurs. Celui qui parle ici est un ancien enseignant rescapé de la guerre d'Algérie et de la foudre qui a récemment embrasé notre pays. Il a maintenant l'âge de ses souvenirs de jeunesse. Autrefois, la vie était infiniment plus simple, plus belle et pleine de tolérance et d'entraide. Mais ma pauvre voix usée jusqu'aux cordes risque de ne pas porter loin mon message et de se heurter sans doute en vain à un mur aveugle atteint de surdimutité psychologique. Que me reste-t-il, sinon à m'éloigner de cet environnement pour aller me nicher au pied de la montagne, en cette saison de fleurs et d'amours printanières qui grouille de mille et une vies ? Là au moins, je pourrais écouter, dans la quiétude du soir, au soleil couchant, les vrilles envoutantes d'un chardonneret solitaire à la recherche d'une compagne pour perpétuer l'espèce. Quel est ce civilisé qui a dit que le chardonneret est un oiseau sauvage ? Allez, bonne fête à toutes les femmes du monde.