L'Irak joue, aujourd'hui peut-être, son avenir en tant qu'Etat uni malgré les luttes inter-communautaires et interethniques qui le minent depuis la chute du régime du défunt Saddam Hussein. Ces deuxièmes élections législatives qui se tiennent aujourd'hui constituent un enjeu crucial pour un pays qui pourrait basculer d'un côté comme de l'autre. Confronté à une violence terrifiante couplée à des tensions entre Kurdes et Arabes et un schisme entre sunnites et chiites, l'Irak, apparaît comme un pays ouvert aux quatre vents. Les 19 millions d'Irakiens appelés aujourd'hui aux urnes pour renouveler leur Parlement, composé de 325 membres, ont le devoir et la responsabilité historique de faire en sorte d'éviter la « balkanisation » de leur pays. Le risque est hélas bien réel de voir l'Irak uni voler en éclats. Cela arrange sans doute les affaires de certains Etats occidentaux qui se frottent les mains de pouvoir enfin faire main basse sur les richesses immenses de ce grand pays. Pour cause, le monde entier, les Irakiens d'abord, ont découvert « en live » les bienfaits de la « démocratie héliportée » larguée un certain 9 avril 2003. Sept ans plus tard, c'est un pays encore déchiré qui s'apprête aujourd'hui à tenter de recoller les morceaux pour sauver le Tigre qui se meure et pourquoi pas redorer le blason de cette terre, berceau de la civilisation. C'est là l'enjeu majeur de ce scrutin, au-delà des partis et des sensibilités qui vont rafler les strapontins parlementaires en jeu. La participation de tous les Irakiens, quelles que soient leur origine et leur confession, constitue, en l'occurrence, la pierre angulaire de sa mission de sauvetage d'un pays en détresse. Cela étant dit, en terme pratique, ce scrutin proportionnel se déroulera dans les 18 gouvernorats du pays considérés comme des circonscriptions. Les ruines de la démocratie « héliportée » Les électeurs voteront sur une liste dans laquelle ils peuvent élire les candidats de leur choix. Pour la communauté irakienne établie à l'étranger, le vote a déjà commencé vendredi et se poursuivra jusqu'au 7 mars dans 16 pays. Environ 1,4 million d'électeurs sont attendus aux urnes à l'étranger. Lueur d'espoir dans le ciel gris irakien : ces législatives irakiennes seront marquées par la participation de toutes les communautés, surtout des sunnites qui avaient boudé les urnes en 2005, lors des premières législatives depuis l'invasion américaine du pays en mars 2003. Ce qui autorise un optimisme quant à une bonne négociation de ce virage historique pour permettre au nouveau pouvoir de rebâtir le pays sur de nouvelles bases plus solides que celles ethniques ou confessionnelles qui ont transformé Baghdad en décombres depuis 2005. Ces élections sont également curiales du fait qu'elles interviennent à la veille du départ des troupes de combat américaines. La majorité (ou la coalition) politique qui sortira des urnes devra être suffisamment forte et soutenue pour réussir l'exploit d'une réconciliation nationale sans laquelle l'Irak ne serait plus ce qu'il était. L'Irak a, en effet, besoin d'un gouvernement fort, mais surtout crédible pour restaurer l'autorité de l'Etat, garantir la sécurité aux citoyens et évidemment l'intégrité territoriale. Les Irakiens ne doivent pas entendre les menaces de la nébuleuse Al Qaîda, cette société par actions pour qui un Irak stable signerait forcément une fin de mission. L'attentat d'hier qui a fait trois morts à Najaf doit être interprété plus comme un signal de détresse que comme une capacité de nuisance. L'enjeu est à ce niveau.