Sans surprise. L'accord d'association avec l'Union européenne (UE) a été ratifié, hier, à l'unanimité par les députés de la chambre basse du Parlement. Hormis les élus du Parti des travailleurs (PT) qui ont rejeté le projet, les autres députés, y compris ceux d'El Islah dont le parti n'appartient pas à la coalition présidentielle , ont tous voté pour cet accord. L'Assemblée populaire nationale (APN) a connu, en effet, une journée très mouvementée, jalonnée par un riche et houleux débat sur cette question d'extrême importance pour l'avenir du système politique et économique du pays. Durant sept heures de débats, les élus des formations politiques siégeant dans cette institution ont exprimé leurs appréhensions quant aux conséquences de cet accord sur l'économie nationale. Dans sa présentation du projet, le ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem, après une rétrospective du processus des négociations ayant conduit à la signature de ce pacte, a mis en exergue « l'importance d'un tel accord pour l'intégration de l'économie nationale dans les échanges internationaux et la facilitation de sa mise à niveau ». Pour le chef de la diplomatie algérienne, l'Algérie a trop tardé dans la conclusion de cet accord, par rapport aux pays voisins, en l'occurrence la Tunisie et le Maroc. « L'Union européenne sera notre voisin à l'Est en 2008 avec l'ouverture de la zone de libre-échange en Tunisie, et en 2010 elle sera, également, notre voisin à l'Ouest après l'ouverture d'une zone de libre-échange au Maroc. L'UE est notre principal partenaire d'où proviennent 65% de nos importations, et cet accord est indispensable si l'on veut s'adapter aux mutations rapides des économies internationales, qui sont le résultat de la mondialisation et de la globalisation des échanges », a déclaré Abdelaziz Belkhadem. Afin de tranquilliser les députés, le ministre des AE a affirmé que « le marché parallèle et les produits d'imitation seront freinés avec la mise en œuvre de cet accord ». « C'est vrai que le démantèlement tarifaire sera en faveur de l'UE, mais il est un meilleur moyen pour la lutte contre le marché parallèle et la prolifération des produits d'imitation. Désormais, les produits qui n'existaient pas sur le marché national seront disponibles avec la mise en application de l'accord », a-t-il lancé. En outre, le système productif national, souligne M. Belkhadem, aura tout le temps devant lui pour se mettre à niveau. « D'ici 2017, date arrêtée pour arriver au démantèlement tarifaire total, l'économie algérienne pourra largement se mettre à niveau et s'adapter aux nouvelles règles du marché », souligne-t-il. Le chef de la diplomatie algérienne s'est longuement étalé, notamment, sur la question du démantèlement tarifaire. « Les droits de douane seront supprimés de façon complète dès l'entrée en vigueur de l'accord pour les matières premières protégées entre 5 et 15%. Mais cela ne se fera qu'après sept ans pour les semi-produits et les biens d'équipement industriels et agricoles et d'une manière progressive à partir de la deuxième année de sa mise en œuvre », a-t-il affirmé. Les critiques des députés du PT Durant les débats, les élus, en particulier ceux du PT, ont soulevé plusieurs questions relatives aux désagréments qui peuvent être causés à l'économie nationale et l'ingérence étrangère dans les affaires internes du pays à travers cet accord. « Nous craignons que l'Algérie soit un marché pour les produits européens », dira l'un des députés. Pour Mme Louisa Hanoune, porte-parole du PT, « l'Algérie n'a pas besoin de signer cet accord, d'autant plus qu'il engagera 25 pays dont la majorité vit une situation sociale austère ». « Nous n'avons pas besoin de signer cet accord qui est en contradiction avec l'article 121 de la Constitution. Nous n'avons pas besoin d'argent, d'autant qu'on a 43 milliards de dollars comme réserve de changes et une fluidité dans les banques. » L'autre son de cloche est venu du député MSP, un parti de l'Alliance présidentielle, Fatah Guerd, qui a attiré l'attention sur la non-participation des députés aux négociations. Ce dernier a soulevé le problème du rôle du député et sa marginalisation. Les questions de la sauvegarde de la souveraineté nationale, la défense de l'économie algérienne et la privatisation du secteur de l'agriculture ont été aussi posées. Répondant particulièrement aux interrogations de Louisa Hanoune, Belkhadem a tenu à préciser « que l'Algérie est souveraine et elle a bien défendu ses intérêts ». Pour lui, l'Algérie a préféré conclure cet accord avant l'entrée à l'OMC « afin d'éviter les négociations avec l'UE lors des négociations avec cette organisation ». S'agissant de la perte en matière de TVA en appliquant le démantèlement tarifaire, M. Belkhadem a minimisé les « dégâts » en déclarant qu'« elle sera de l'ordre de 600 à 800 millions de dollars sur 10 ans ». Concernant la libre circulation des personnes, M. Belkhadem dira : « Pour le moment, il y a un consensus pour abréger les délais de délivrance des visas et discuter par la suite de la possibilité d'aller vers la libre circulation des personnes. » Cet accord entrera en vigueur en 2007.