La Conférence d'Alger sur la sécurité dans la région sahélo-saharienne tonne comme une alarme destinée à recadrer l'effort de lutte contre le terrorisme dans cet espace tant convoité. L'initiative algérienne d'inviter autour d'une même table les pays concernés par cet espace régional, théâtre d'un déploiement inquiétant du terrorisme, souligne la nécessité de conjuguer les efforts de tous autour d'un seul et même objectif. Après que des vicissitudes se soient installées entre voisins au sujet, notamment, de la libération des otages, la rencontre d'Alger a replacé dans leur contexte les objectifs d'une lutte efficace et surtout éloignée de toute ingérence extraterritoriale. La rencontre des états-majors militaires des pays du Sahel, en avril prochain, sera une nouvelle étape décisive pour confirmer l'option d'une lutte concertée et consensuelle. Les représentants des sept pays participant à la réunion ministérielle consacrée à la situation dans la région sahélo-saharienne – Mali, Niger, Mauritanie, Tchad, Algérie, Burkina Faso et Libye – se sont mis d'accord sur une série de mesures politiques, sécuritaires et économiques à mettre en œuvre pour prévenir et lutter contre le terrorisme selon « une approche intégrée coordonnée et solidaire ». Les plus importantes, et surtout urgentes, ont trait au volet sécuritaire. Ainsi, les ministres se sont mis d'accord sur le principe de réunir leurs responsables de la lutte antiterroriste, ainsi que leurs chefs d'état-major des armées à Alger, « dans les meilleurs délais, en vue de dégager les voies et moyens de renforcement des échanges d'informations et d'évaluation et d'analyses en lien avec la menace terroriste et ses connexions ». Dans ce cadre, ils ont « félicité » la décision de « rendre opérationnel » le conseil de leurs chefs d'état-major, issu de la réunion de Tamanrasset, en été 2009, qui, selon eux, est un outil important dans la lutte contre le terrorisme et « va contribuer à avoir une vision commune, tenant compte de l'évolution de la menace terroriste et de l'état de la situation socioéconomique de la région », mais aussi à « consolider et conforter la coopération régionale et donner une impulsion à la lutte antiterroriste ». En fait, il s'agit d'une véritable stratégie de lutte menée sur le plan d'abord national à travers « la responsabilité des Etats à mener une lutte efficace et globale contre le terrorisme », ainsi que sur le plan bilatéral par « le renforcement de la coopération en mettant en œuvre les mécanismes et accords bilatéraux », et au niveau régional, « à travers la promotion de la coopération régionale structurée, inclusive et de bonne foi ». Enfin sur le plan international, « par la participation active à l'action internationale de lutte contre le terrorisme ». Pour les participants, la coopération bilatérale et régionale « constitue le seul cadre incontournable pour une lutte coordonnée, efficace, totale et sans concession contre le terrorisme et ses connexions ». Dans ce cadre, ils ont souligné « la primauté du principe de responsabilité des Etats de la région et leur appropriation de la prise en charge des problèmes et défis auxquels est confrontée la région sahélo-saharienne ». Une manière de rejeter toute idée d'intervention extrarégionale, brandie ces derniers jours par certaines puissances occidentales. Tout en félicitant l'adoption par la Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution incriminant le versement des rançons aux terroristes, ils ont rappelé la « nécessité pour tous les Etats de son application pleine et entière, et l'adoption de mesures répressives à l'égard des personnes et entités listées pour leurs liens supposés avec les activités terroristes ». Faire adhérer les populations locales Toujours sur le volet de la coopération, les ministres ont mis l'accent sur l'importance du renforcement des mécanismes d'assistance judiciaire mutuelle, « fondée sur les conventions judiciaires bilatérales existantes, les conventions régionales et internationales en lien avec le terrorisme, et la mise à profit au bénéfice de la lutte, les possibilités offertes en matière d'assistance technique par les mécanismes multilatéraux… » Sur le plan socioéconomique, les ministres ont mis l'accent sur l'importance de la réalisation des programmes de développement durable pour l'amélioration des conditions de vie des populations et leur réinsertion sociale et économique, notamment en direction des jeunes. « Dans ce cadre, le renforcement de la coopération transfrontalière visant à améliorer les conditions de vie des populations ainsi que le soutien aux grands projets structurants à vocation régionale, constituent des domaines d'action prioritaires pour les Etats de la région. Les actions humanitaires pour faire face à des situations d'urgence ont été identifiées comme l'expression d'une solidarité régionale agissante ». Mieux encore, les participants à la conférence d'Alger ont estimé que les efforts de lutte contre le terrorisme et les autres formes de criminalité transfrontalière ainsi que ceux destinés au développement « nécessitent l'adhésion et la mobilisation des populations locales, dont la sécurité et la quiétude sont directement menacées et dont l'attachement séculaire à la stabilité et à la sécurité a toujours constitué un élément déterminant de la relation transfrontalière ». A ce titre, ils ont tenu à souligner le rôle significatif de ce patrimoine séculaire fait de tolérance et d'échanges, dans la préservation des populations des dangers des relents idéologiques du terrorisme. Les ministres n'ont pas omis de revenir aux principes de la conférence ministérielle de Bamako, tenue en novembre 2008, en rappelant « sa validité et la pertinence » de ses conclusions, mais aussi « en confirmant le format de ce cadre de consultations et de coopération régionale ». De ce fait, ils n'ont pas manqué de relever l'importance de la tenue « dans les meilleurs délais de la conférence des chefs d'Etat sur la paix, la sécurité et le développement dans la région sahélo-saharienne à Bamako ». Par ailleurs, tout en réitérant « la ferme condamnation » de leurs pays respectifs du terrorisme, les ministres ont « affirmé avec force leur détermination à agir individuellement et collectivement pour éradiquer le terrorisme et redonner à la région sa vocation d'échanges, de paix, de stabilité et de coopération féconde ». En conclusion, ils ont tous mis l'accent sur la nécessité de la mise en œuvre des mesures qu'ils ont adoptées, notamment celles relatives à la réunion à Alger, courant avril 2010, des chefs d'état-major et des responsables de la lutte antiterroriste.