Tenue de couvrir directement une partie des besoins de financement du Trésor public, la Banque d'Algérie (BA) aura désormais la tâche ardue de veiller au même temps à ce que sa politique monétaire ne dérape pas complètement vers une inflation incontrôlée. En effet, que son autonomie soit réelle ou supposée, totale ou partielle, la Banque centrale est en tout cas mise devant le fait accompli de devoir jouer le rôle principal du scénario économique proposé par le gouvernement pour les cinq ans à venir. Bien avant la révision de la sacro-sainte loi sur la monnaie et le crédit (LMC) pour y introduire le fameux financement non conventionnel, le premier responsable de la BA, Mohamed Loukal, annonçait déjà la couleur. «La Banque centrale doit désormais faire face au défi majeur de mener une nouvelle politique monétaire», avait-il ainsi anticipé lors d'une conférence en juillet dernier à Alger. Alors que le niveau global de la liquidité bancaire a chuté ces deux dernières années de près de 67%, le défi majeur pour la BA dans le contexte actuel est de fixer, avait fait comprendre le gouverneur, «un nouveau cap de politique monétaire qui permet à la fois de stabiliser les prix et la situation des finances publiques, tout en continuant à favoriser le financement de la croissance économique». Une gageure pour le moins très complexe dont l'issue devra dépendre essentiellement du degré de rigueur qu'il sera donné à la Banque centrale de pouvoir ou non observer dans le cadre de ses missions «quasi intrinsèques» d'autorité monétaire. Un rôle et une responsabilité que le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, n'avait d'ailleurs pas manqué de bien désigner, lors de son intervention, jeudi dernier, pour défendre le projet d'amendement de la LMC à l'Assemblée populaire nationale (APN). Tentant de rassurer les députés sur les conséquences probables du recours au financement interne non conventionnel, le premier argentier du pays a ainsi indiqué clairement qu'en plus du contrôle sur le terrain qui sera exercé par une commission rattachée directement à son département, le suivi de l'impact de ce mécanisme sur la masse monétaire, le niveau d'inflation, la liquidité bancaire et le prix de change, pour une utilisation optimale des financements exceptionnels, sera assuré par la Banque d'Algérie. Cette dernière, faut-il donc croire en définitive, devra désormais apprendre à jongler entre d'éventuelles injonctions d'un pouvoir exécutif accro à la dépense et la nécessité d'empêcher l'explosion d'une inflation monétaire, qui serait tout simplement fatale pour la stabilité sociale du pays.