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Yémen : La guerre n'en finit plus
Publié dans El Watan le 08 - 12 - 2017

Avant la guerre, le Yémen traversait déjà une grave crise caractérisée par la pauvreté généralisée, une faiblesse de l'Etat et des tensions ethniques et religieuses, mais avec la guerre opposant les rebelles houthis— soutenus par l'Iran et qui contrôlent Sanaa la capitale— au camp du président Abd Rabbo Mansour Hadi, réfugié à Riyad et épaulé, depuis 2015, par une coalition militaire commandée par l'Arabie Saoudite, le pays sombre dans une impasse.
Cette semaine, le conflit semble avoir pris une nouvelle tournure après l'assassinat de l'ex-président Ali Abdallah Saleh, à la tête du Yémen pendant 33 ans jusqu'à son départ forcé en 2012, qui avait mis fin à des décennies d'hostilité envers les Houthis et s'était allié aux rebelles, avant d'offrir à l'Arabie Saoudite de «tourner la page» en échange d'une levée du blocus imposé par Riyad qui étrangle le pays.
Un responsable du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a affirmé : «Sanaa a connu les combats les plus violents depuis le début du conflit en mars 2015.» Les violents bombardements sur la capitale ont pris au piège les civils chez eux. Les agences de l'ONU ont demandé une «trêve» humanitaire pour venir en aide à la population de Sanaa, où les récents affrontements au sein du camp rebelle ont fait au moins 230 morts et 400 blessés, dont des civils.
Sur le terrain la nouvelle donne à Sanaa risque de compliquer un peu plus le conflit au Yémen, qui a fait plus de 8750 morts depuis mars 2015, dont plus de 1500 enfants, ainsi que 50 600 blessés, en majorité des civils. Le pays connaît la pire crise humanitaire de la planète, selon l'ONU, 17 millions de personnes ont besoin d'aide alimentaire, dont 7 millions risquent la famine. Ce qui rend ce conflit plus complexe c'est qu'il est le théâtre de rivalité régionale et internationale.
Enjeux internationaux
Le bras de fer entre l'Iran chiite et l'Arabie Saoudite sunnite est à l'origine de ce conflit et ce n'est pas qu'une rivalité religieuse mais également stratégique et géopolitique, en décidant, pour les Saoudiens, d'intervenir militairement dans le conflit et pour les Iraniens en soutenant ouvertement les Houthis, ils n'ont fait qu'aggraver la situation déjà très instable à l'intérieur du pays.
Au niveau international, on se demande pourquoi si peu de pays se préoccupent du sort du Yémen et de la situation catastrophique des civils, les grandes puissances portent donc une responsabilité non négligeable dans le pourrissement de la situation . Elles ont préféré fermer les yeux considérant que ce pays n'était pas une priorité dans leurs différents agendas.
D'ailleurs la position des Etats-Unis et de l'Europe en est la parfaite illustration, en sous-traitant le dossier aux acteurs régionaux, surtout l'Arabie Saoudite, dont ils ont a priori considéré que ses dirigeants maîtrisaient le Yémen, ont reconnu le gouvernement soutenu par Riyad et donné carte blanche aux Saoudiens dans la gestion de ce dossier, taisant ainsi les graves dérives commise par l'armée saoudienne, à sa tête l'ancien ministre de la Défense et actuel prince héritier Mohammed Ben Salmane.
Cependant, la pression internationale et médiatique a poussé Donald Trump à appeler l'Arabie Saoudite à ouvrir «immédiatement» l'accès à l'aide internationale au Yémen face à la grave crise humanitaire en cours dans ce pays, où le président américain soutient pourtant Riyad face à «l'agression» iranienne. Le président américain ne va toutefois pas jusqu'à demander à l'Arabie Saoudite, grande alliée des Etats-Unis, d'arrêter de bombarder le pays.
La Russie, quant à elle, a lancé mercredi un appel aux acteurs politiques au Yémen afin de mettre sur pied un «dialogue national, le plus large possible» en vue de cesser la guerre qui ravage le pays. «Nous espérons que les principaux acteurs internationaux et régionaux useront de leur influence sur les parties yéménites pour les convaincre d'arrêter la violence, d'arrêter les hostilités et de revenir à la table des négociations.» Toutefois, les déclarations en faveur d'une négociation sont en décalage avec les politiques que déploient les Etats impliqués.
Ils disent tous sur la scène internationale vouloir des solutions politiques, mais ils encouragent en même temps les forces sur le terrain à ne pas faire des compromis. La priorité est aujourd'hui humanitaire et l'ONU appelant a une «trêve humanitaire» va dans le bon sens, mais cela ne suffira pas à arrêter les hostilités, ce qui nécessiterait donc une pression internationale sur les belligérants, en particulier l'Arabie Saoudite, car c'est elle qui bombarde.
Il est impératif pour les grandes puissances d'accentuer la pression et que les gouvernements occidentaux acceptent de considérer que cette guerre doit cesser et qu'il n'y a pas de solution militaire et que ce n'est qu'avec l'arrêt de leurs bombardements qu'une dynamique politique pourra s'enclencher. Des négociations devront impliquer les rebelles houthis et le camp du président Hadi, reconnu par la communauté internationale, même si celui-ci a perdu bien du crédit. Mais ils doivent aussi être plus larges, en mobilisant par exemple le mouvement sudiste et les tribus.


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