Deux pionnières de la chanson kabyle, Chabha et El Djida Thamechtouhth, ont été honorées par la communauté estudiantine à Tizi Ouzou. Plusieurs chanteuses comme H'nifa, Zohra, Cherifa, Nouara, Bahia Farah, Lla Yamina, Djamila et Ouerdia, entre autres, ont été revisitées, la semaine dernière, à Tizi Ouzou. En effet, Chabha et El Djida Thamechtouhth, deux artistes ayant marqué leur passage à la radio chaîne II, notamment avec la chorale Nouva Lekhalath, étaient les hôtes de la communauté estudiantine. Ainsi, les deux pionnières de la chanson kabyle ont régalé les résidantes de la cité universitaire de Hasnaoua 4 (Bastos), à l'occasion d'une rencontre animée par Slimane Belharet. Vêtues de robes kabyles splendides, Chabha et El djida ont relaté à l'assistance le dur combat de la femme, notamment durant une période où la chanson était « interdite » même aux hommes. « Nous avons réussi à briser plusieurs tabous. Il était très difficile pour une femme de chanter, surtout durant la période de post-indépendance », disait El Djida qui a rendu hommage à plusieurs femmes qui ont, dit-elle, donné leur vie pour l'art. « Je rends hommage aussi à Lla Yamina, la première femme de la radio. Elle a intégré la radio en 1924. Moi, j'ai commencé la chanson à l'âge de 4 ans. J'étais fascinée par la chanson de Ouerdia, cette très belle femme. Puis, je découvre la voix cristalline de Nouara », ajoutera-t-elle avant de réciter ses fameux ichewiquen qui ont bercé l'assistance. Elle a interprété, avec une voix limpide, A Thakhathemth, ce texte légendaire qui reste aujourd'hui entièrement nostalgique. Il a été chanté avec une sensibilité inouïe au point de donner des frissons aux étudiantes. A la fin de ce récital, la dame d'Ighil Ali a été fortement ovationnée par le public. A 63 ans, El Djida Thamechtouhth a réussi à enchanter la communauté estudiantine dans un climat plein d'émotions. « Slimane Azem, Taleb Rabah, Athmani, Medjahed Mohamed, entre autres, étaient nos idoles. Il y a aussi des chanteuses qui ont passé une vie tumultueuse chargée de tristesse, mais aussi de gloire, à l'image de H'nifa et Zohra. Elles ont laissé des textes immortels qui ont marqué à jamais l'histoire de la chanson féminine. Elles étaient le symbole de la résistance et du courage infaillibles, Oui, mais il faut savoir que l'art est un métier ingrat », a-t-elle regretté. Dans la foulée de la même ambiance, Chabha monte sur scène pour remettre au goût du jour, avec la même brisure de voix, certains chants du terroir. Elle donne ainsi le ton à la soirée avec Assa Tiwizi. « Moi, je suis issue de la chorale de Mohamed Belhanafi avec Dhrifa, Malha, Karima et Djedjiga. J'ai fait aussi plusieurs tournées en Kabylie avec Lounis Aït Menguellet », a-t-elle dit avant d'enchaîner avec une autre chanson intitulée A Yemma Ad Zewdjegh. La rencontre était riche et la fête s'est poursuivie tard dans la nuit. Une étudiante poétesse a déclamé un poème en l'honneur du rebelle Matoub Lounès, comme elle a également retracé, avec beaucoup d'humour, ses quatre années au sein de la résidence universitaire.