Vingt ans après la promulgation de la loi de l'information, datée du 7 avril 1990 (la 90-07) sous le gouvernement Hamrouche, la corporation des journalistes ainsi que les acteurs de la société civile se rendent à l'évidence : l'article 3 de la 90-07, « le droit à l'information s'exerce librement », reste une belle fiction. Les violences des années 1990 et l'autoritarisme du pouvoir ont ajourné l'élaboration d'un paysage médiatique ouvert et compétitif. « La liberté d'expression et de presse garantie par les articles 38 et 41 de la Constitution et par la loi du 3 avril 1990 sur l'information est méconnue et violée au quotidien », soulignait le Mémorandum sur les violations de la Constitution par le président de la République signé par plusieurs personnalités politiques en 2004. Et le constat reste inchangé six ans plus tard : le dernier rapport de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH) estime que « d'une manière générale il existe un fort sentiment de recul, voire de négation, de la liberté d'expression. Ce sentiment de recul de la liberté d'expression est lié – quoiqu'en dise le discours officiel – au maintien de l'état d'urgence depuis février 1992 ». La survivance de la presse privée ne serait, dans ce contexte liberticide, que l'arbre qui cache la forêt. Les exemples de non-respect de la loi 07-90 et des textes régissant l'audiovisuel sont légion. Les cahiers des charges des services publics de télévision et de radio (annexés aux décrets 91-101 et 91-103) sont ignorés. Les cahiers des charges annuels prévus par les décrets précités ne sont pas établis. La liberté de création de publication périodique, sur une simple déclaration d'enregistrement, dont le récépissé doit être délivré sur-le-champ conformément, est violée par l'administration qui transforme, de fait, un système déclaratif d'un droit en autorisation qu'on sollicite et qui est refusé. Et la faculté de création de services de communication audiovisuelle privés, consacrée par la loi (articles 56 et 61 de la loi 90-07) n'a pas été organisée et reste lettre morte. Sans oublier la lourde pénalisation des délits de presse en 2001, condamnée par la profession et les ONG de défense des droits de la presse. Vingt ans après, malgré l'émergence de la presse privée, des pans entiers de l'expression restent baillonnés…