Le pays s'achemine vers un Etat d'exception qui ne dit pas son nom. Hier matin, les autorités ont interdit toute opération d'atterrissage et de décollage des avions privés dans tous les aéroports du pays. Au même moment, des informations sur des mesures d'interdiction de quitter le territoire national frappent de nombreux hommes d'affaires et de responsables qui se comptent parmi l'entourage du clan présidentiel. Depuis hier matin, tous les avions privés sont interdits de quitter ou de rejoindre l'Algérie. Prise par la Direction générale de l'aviation civile, la décision est tombée dès 9h et touche plus d'une trentaine d'aéronefs qui appartiennent à des personnes physiques et morales. Il s'agit de deux compagnies Star Aviation, appartenant au groupe Red-Med, et d'Air Express, propriété d'un ancien patron d'Air Algérie, qui à elles seules comptent 32 aéronefs qui assurent le transport et les évacuations sanitaires au sud du pays, notamment dans les plateformes pétrolières. En plus de ces entreprises de transport aérien, la mesure cible également deux autres jets privés, appartenant à deux hommes d'affaires, Mahieddine Tahkout et Hadj Cherif, et qui sont enregistrés pour le premier aux Etats-Unis et le second en Espagne. Il faut dire que cette interdiction a causé de lourds préjudices aux deux compagnies privées, Air Express et Star Aviation, dont les avions ont été cloués au sol. Leurs programmes de vol, liés à la prise en charge d'une grande partie des déplacements, par voie aérienne, des cadres dirigeants qui travaillent sur les plateformes pétrolières dans les régions enclavées du sud du pays, ont été totalement annulés. Pour l'instant, aucune information officielle n'a circulé sur les raisons d'une telle décision. Ce qui est certain, c'est qu'elle intervient au moment où l'on évoque des mesures d'interdiction de quitter le territoire national (ISTN) dont feraient l'objet plusieurs personnalités de l'entourage du clan présidentiel. L'arrestation de Ali Haddad, le désormais ex-patron du FCE (Forum des chefs d'entreprise), alors qu'il s'apprêtait à traverser le poste-frontière (avec la Tunisie) d'Oum Teboul, wilaya d'El Tarf, a alimenté les rumeurs les plus folles sur les réseaux sociaux et les sites électroniques, poussant certains à apporter des démentis, comme cela a été le cas pour Mahieddine Tahkout, le patron du groupe Cima Motors. Personne ne sait dans quelles conditions ces ISTN – qui relèvent du strict ressort du juge – ont été établies et surtout quels sont les motifs qui les ont justifiées. Pour l'instant, aucune autorité ne s'est exprimée sur cette affaire pour informer l'opinion publique sur ces mesures, qui risquent, dans le cas où elles ne respectent pas la loi, de basculer dans les règlements de comptes et les opérations de chasse aux sorcières.