La question était dans l'air depuis au moins le début de l'actuelle crise. Celle-ci a même servi à en préciser l'urgence. Et depuis jeudi, la revendication d'un ordre mondial plus juste est revenue sur le devant de l'actualité mondiale. Elle a été formulée par les quatre pays – Brésil, Russie, Inde et Chine – réunis jeudi à Brasilia au niveau des chefs d'Etat. Il s'agit du deuxième sommet de ceux qu'on appelle les BRIC. Une abréviation pour dire de nouveaux acteurs et pas seulement des pays émergents comme ils sont qualifiés. Se demande-t-on par qui ils ont été ainsi qualifiés ? Certainement par ceux qui détiennent les véritables leviers de l'économie mondiale, comme on le ferait avec des personnes que l'on n'a pas vu grandir en termes de puissance bien entendu, et qui se sentent à l'étroit, comme dans un carcan. Ils ont beau être invités à des conclaves, mais les BRIC savent que la table a été dressée par d'autres, et qu'en tout état de cause, leur rôle sera extrêmement réduit. Et pourtant, en cette période de crise, ils constituent la locomotive de l'économie mondiale, en proposant une croissance forte et durable, et le marché, avec 40% de la population mondiale et 16% du PIB. De nombreuses compagnies de niveau mondial font l'essentiel de leur chiffre d'affaires avec les BRIC. Bons payeurs, ces derniers ont même accepté le rôle ingrat du souffre-douleur des économies en panne, ou plus simplement en crise. Que n'a-t-on entendu dire au sujet des délocalisations ? La compétition est perdue de vue. Ou encore sur la flambée des prix des matières premières. Ce sont encore eux, entend-on, avec il est vrai des besoins soutenus et conséquents pour maintenir la croissance. Ces pays sont même quelque part accusés de fausser les rapports économiques mondiaux. Simple guerre des mots ? C'est une bataille. Aujourd'hui, les BRIC vont au-delà du simple discours, en donnant des contours précis à une revendication, laquelle, pour dire vrai, est vieille de près de quatre décennies, puisque l'appel pour un ordre mondial plus juste a été lancé par les non-alignés lors de leur Sommet d'Alger en 1973. A la tête d'un pays qui a souscrit à cet appel, le Premier ministre indien a apporté une importante précision en soulignant qu'il ne s'agit pas de places à prendre, ou de marges bénéficiaires à améliorer, mais « d'un nouvel ordre mondial plus démocratique, juste et multipolaire ». La déclaration finale se veut, quant à elle, plus explicite en affirmant la nécessité de réformer le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, ainsi que le Conseil de sécurité de l'ONU afin que ces institutions internationales reflètent mieux ce qu'on appellerait la réalité mondiale. De nombreux pays à travers le monde, et pas seulement les BRIC, souffrent des rapports internationaux actuels. Ils n'en veulent pour preuve en ce qui concerne l'ONU que les violations répétées de sa propre doctrine, un texte qui prône la paix. Il s'agit d'abord de rendre justice aux peuples et de traquer l'injustice sous quelque forme que ce soit. C'est toute la définition que renferme la notion de démocratisation des rapports internationaux.