Bouteflika a enterré le dossier des disparitions forcées. Il a même insulté nos familles, notamment quand il a dit à une maman dedisparu, lors de son meeting du 15 septembre 1999 à la salle Harcha, «vos enfants ne sont pas dans mes poches». Il déteste entendre parler de nous car à chaque fois qu'il voyage, on lui évoque le dossier. Bouteflika nous a assassinés une deuxième fois quand il a signé l'accord de réconciliation nationale sans la vérité et la justice que nous avions tant souhaitées. Nous avons toujours été contre cette loi. Nous avons cru qu'il allait désigner une commission d'enquête pour relâcher les quelques détenus encore vivants dans les prisons. Mais au lieu de cela, il nous a poignardé en faisant ce pacte, notamment à travers ses articles 45 et 46 qui nous interdisent d'évoquer le sujet en public. Il y a plus de 800 plaintes déposées par des parents des disparus dans nos tribunaux. Au lieu d'ouvrir des enquêtes, les magistrats nous demandent, au contraire, de déposer des plaintes contre X, alors que les familles ont même donné les noms des personnes qui les ont interpellés. Nous demandons une commission d'enquête indépendante pour trouver une solution qui arrangera tout le monde et la libération de ceux qui sont encore vivants. Nous sommes partie prenante de Hirak. Nous participons chaque vendredi aux marches pacifiques. Nous sommes sur le terrain depuis 25 ans. Nous espérons arriver à l'indépendance de la justice et à l'Etat de droit pour pouvoir rouvrir le dossier des disparitions forcées. Nous avons grand espoir en ce mouvement et en l'avenir du pays. Nous espérons l'ouverture du dossier des tombes des 3300 Algériens enterrés sous X durant la décennie noire. Il y en a 10 000 autres enterrés dans des charniers, selon l'association Soumoud. J'espère qu'on arrivera, ensemble, au règlement définitif de ce dossier qui date déjà depuis très longtemps.