Les négociations entre les meneurs de la contestation et l'armée soudanaise sur une solution de sortie de crise devant permettre de bâtir un Etat civil commencent à porter leurs fruits. Les deux parties ont identifié, dès la reprise de leurs discussions lundi, les institutions de cette transition : un Conseil souverain, un cabinet et une Assemblée législative. Mardi, les deux camps sont parvenus à un accord qui fixe à trois ans la durée de la phase de transition, la contestation réclamant jusque-là une période de quatre ans alors que le Conseil militaire insistait sur deux. Les six premiers mois de la période de transition seraient consacrés à conclure des accords de paix avec les mouvements rebelles dans l'ouest et le sud du Soudan. La physionomie de l'Assemblée législative a également été définie. Elle devrait être composée de 300 membres dont 67% seront désignés parmi l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance du mouvement de protestation. Le reste des sièges sera réservé aux représentants des forces politiques qui ne sont pas affiliés à cette alliance. Khaled Omar Youssef, un leader de la contestation, a minimisé le rôle qu'aura à jouer le Conseil souverain, insistant sur le fait que le pays disposera d'un gouvernement puissant. «Seuls les ministères de la Défense et de l'Intérieur iront aux militaires, les autres portefeuilles seront assumés par des civils.» M. Youssef a insisté sur la nécessité d'avoir un Conseil souverain composé essentiellement de civils, comme le réclame la contestation. Les généraux ont exprimé à plusieurs reprises leur préférence pour un Conseil souverain dominé par les militaires. Justement, les deux parties devaient aborder, hier soir, la phase finale de leur dialogue, avec l'espoir de s'accorder rapidement sur la composition de ce Conseil souverain. Il est à rappeler que la contestation a commencé le 19 décembre 2018 au Soudan. Des centaines de Soudanais avaient manifesté après la décision du gouvernement de tripler le prix du pain. Le 6 avril a marqué un net regain de la contestation et le début d'un sit-in devant le quartier général de l'armée à Khartoum. Les manifestants avaient réclamé des négociations avec les militaires sur un «gouvernement de transition». Des affrontements meurtriers ont lieu avec les forces de l'ordre : l'armée, qui ne participe pas à la répression menée par le puissant service de renseignement NISS, et la police antiémeute, affirme qu'elle ne laissera pas le pays «sombrer dans le chaos». Le 11, les militaires destituent Omar El Béchir, remplacé par un «Conseil militaire de transition». Le chef du service de renseignement, qui a dirigé la répression de la contestation, démissionne. Le 17, Omar El Béchir est transféré dans une prison du nord de Khartoum. Depuis lors, des négociations ont lieu entre l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC) et l'armée sur une issue de sortie de crise.