Le phénomène du retard dans les payements des différentes situations continue à impacter négativement le déroulement des travaux sur le chantier de modernisation des gorges de Kherrata. Pendant que l'Etat tergiverse, l'entreprise turque Özgün, en charge des travaux, reporte le payement des salaires et annonce un dégraissement important de ses effectifs. Des manœuvres rejetées catégoriquement par les ouvriers algériens de l'entreprise, qui se sentent lésés à plus d'un titre, car, pour eux, ils demeurent les uniques victimes de ces mésententes à répétition entre la DTP et Özgün. Depuis presque cinquante jours, ils n'ont reçu que des acomptes sur le salaire du mois d'avril. «Trop peu pour faire vivre toute une famille à l'ombre de la hausse vertigineuse des prix des produits de consommation de première nécessité, surtout durant ce mois de Ramadhan !» nous ont déclaré certains représentants syndicaux. En plus de son incapacité à verser le salaire du mois d'avril pour la totalité de ses ouvriers, l'entreprise avait pris la décision, la première semaine du mois de mai, d'opérer une réduction importante de ses effectifs. Ainsi, sur les deux cent quatre-vingt-dix ouvriers algériens qu'elle emploie, Özgün a décidé de licencier d'un coup cent soixante-dix d'ente eux, pourtant sous contrat jusqu'au 30 juin. Une décision qui a fortement déplu à la majorité des ouvriers qui ont décidé d'un débrayage, et ce, depuis le 8 mai passé. «Nous demandons à être payés dans les temps et nous exigeons que l'entreprise respecte les contrats qu'elle a passés avec tous les ouvriers», nous a déclaré Lamine Lachouri, le représentant de la section syndicale. Özgün prétexte ne plus avoir l'argent nécessaire pour payer ses ouvriers à cause du retard dans les payements de plusieurs situations, alors que de l'autre côté, les ouvriers refusent d'être pris en otages. «Moi, personnellement, je ne cherche pas à savoir si l'Etat paie ou non l'entreprise. J'ai un contrat avec Özgün pas avec la DTP !» nous a encore déclaré un autre responsable syndical, et de poursuivre : «Dernièrement, l'entreprise a proposé de remettre à chacun d'entre nous une somme de 4 000 DA! Que pourrai-je acheter avec pareille somme ? Surtout que la fête de l'Aïd arrive dans quelques jours !» Lancé en 2015 pour une durée de 28 mois, ce chantier a connu depuis plusieurs changements et les délais de réalisation se sont vite allongés. Actuellement, l'entreprise s'attelle à la réalisation de trois nouveaux tunnels d'une longueur globale de 1135 mètres, pour un coût estimé à trois milliards de dinars. Pour accélérer la cadence des travaux et livrer le projet dans les temps impartis, deux équipes s'activent au niveau de chaque tunnel nuit et jour. Mais, avec ce contretemps, tous les délais seront encore prolongés et la promesse de livrer un autre tronçon d'ici fin juin ne sera plus d'actualité. Au début, ce projet de 90 millions d'euros a suscité un grand espoir parmi les populations de la région eu égard aux nombreux postes d'emplois qu'il allait générer. Mais avec tous les tracas liés aux difficultés de payement des salaires, beaucoup ont vite déchanté. Ils se désolent du fait que dans un pays aussi riche, les citoyens doivent peiner pour dénicher des emplois et, encore, continuer à s'angoisser à chaque fin de mois pour percevoir de maigres salaires qui ne leur permettent même pas de vivre décemment.