Mme Fatma Zohra M. avait du mal à reprendre goût à la vie, après l'assassinat de son mari, par les hordes criminelles, le 27 décembre 1994 à Aïn Tagouraït (Tipaza). L'homme a été exécuté parce qu'il refusait de se soumettre au diktat que voulaient instaurer les terroristes. En dépit de l'hostilité de l'environnement et du climat, et l'insécurité qui faisait peur aux populations rurales, la veuve s'est engagée, à sa manière et selon ses moyens dérisoires, à mener un combat auprès des familles démunies, en particulier la gent féminine, pour leur porter aide et assistance, mais surtout pour leur apprendre à lire, à écrire et à coudre. Elle se déplaçait chez les familles victimes du terrorisme qui habitaient en zones rurales, pour les aider à surmonter leurs difficultés. Cette combattante refusait de s'adresser à l'autorité communale de Aïn Tagouraït, car elle s'illustre par un mépris et une insouciance envers les actions de proximité auprès des familles déshéritées, de surcroît rurales. « Je sais que l'Etat a mis les moyens pour aider ces familles, dit-elle, mais ici à Aïn Tagouraït, on a l'impression que ces autorités communales se fichent des directives des dirigeants de notre pays, et d'ajouter : « Je ne souhaite pas m'étaler sur les histoires de passe-droits, etc. ». Elle a pu suivre une formation en informatique et en infographie dans une école privée à Alger, pour se développer et faire profiter les femmes et les filles des familles démunies de ses connaissances, dans son domicile. Mme Fatma Zohra M. était une enseignante à Alger, avant de se marier. Afin d'agir dans la légalité, elle a créé une association de lutte contre l'analphabétisme dénommée Ennour, agréée par la wilaya de Tipaza. Des cours sont dispensés à titre gratuit aux filles de la commune de Aïn Tagouraït, au nombre de 80. Selon notre interlocutrice, 30 filles suivent des cours d'alphabétisation, 20 se forment en couture et en dessin sur soie et 30 vont entamer une formation sur l'initiation à l'informatique. Grâce à l'aide du ministère de l'Emploi et de la Solidarité nationale, Mme Fatma Zohra M. a pu acquérir un équipement informatique qui lui permet d'enrichir ses activités. Les femmes et les filles doivent obligatoirement passer par l'apprentissage de la lecture et de l'écriture avant de se consacrer à la formation en couture et en informatique. « Cela exige beaucoup de patience et de sacrifices pour pouvoir atteindre mon objectif. Les femmes sont devant vous, vous pouvez les interroger, j'essaye de les aider, compte tenu de leurs conditions sociales très critiques. Tant mieux si elles arrivent à s'en sortir par la suite », déclare-t-elle. Bien que la Journée mondiale de la femme ait été déjà célébrée depuis plus d'une semaine, Mme Fatma-Zohra M. a tenu à organiser une simple cérémonie de remise d'attestations aux femmes et aux filles qui viennent d'achever le cycle d'alphabétisation. Justement, c'est au cours de cette sympathique et conviviale cérémonie qui a eu lieu à la bibliothèque communale de Aïn Tagouraït, que la présidente de l'association Ennour a été installée officiellement par Abdelkrim Thelidj et en présence de Omar Amtout, représentant de l'Office nationale d'alphabétisation, en qualité de responsable de la Ligue nationale pour l'alphabétisation au niveau de la wilaya de Tipaza. Parmi les invités se trouvaient des représentants du Centre action et culture - une association caritative - qui se sont montrés impressionnés par le travail de la responsable de l'association Ennour et la qualité des articles produits par les femmes et les filles des zones rurales. Il n'en demeure pas moins que l'indifférence de l'APC de Aïn Tagouraït a été dénoncée par ces filles et ces femmes désintéressées par le clientélisme, mais toujours en quête d'un épanouissement sain de la femme algérienne.