Les enseignants du supérieur sont sortis, hier, de leur réserve pour critiquer une démarche incompréhensible émanant du ministère de l'Enseignement supérieur. Contre tout attente, la prime d'encadrement des enseignants chercheurs, notamment les maîtres de conférences de rang « B », est revue à la baisse, et ce, au moment où ils attendaient leur régime indemnitaire. Que s'est-il passé ? En date du 12 avril 2010, la direction du budget, des moyens et de contrôle de gestion du ministère de l'Enseignement supérieur a adressé une instruction aux chefs d'établissement d'enseignement supérieur leur demandant de verser l'indemnité d'encadrement aux maîtres de conférences de rang « B » et ce, en application du décret présidentiel n°07-304 du 29 septembre 2007 fixant la grille indiciaire des traitements et le régime de rémunération des fonctionnaires ainsi que l' instruction n°07 du 29 décembre 2007 relative à la mise en œuvre du nouveau système de classification et de rémunération des fonctionnaires. Il est noté dans l'instruction que certains chefs d'établissement d'enseignement supérieur n'attribuent pas cette indemnité aux maîtres de conférences de classe « B ». De ce fait, il leur rappelle les dispositions du décret présidentiel, qui, dans son article 19, stipule qu'en attendant l'adoption des textes réglementaires régissant les régimes indemnitaires, les fonctionnaires et agents publics conservent le bénéfice des primes et indemnités qui leur sont servies à la date d'effet du présent décret, à l'exception de certaines indemnités entre autres de sujétion, de service public local, d'investigation douanière, de revenu... De ce fait, l'enseignant maître de conférences de classe « B » conserve l'indemnité d'encadrement de 4300 DA par mois. Or, le paradoxe se situe justement à ce niveau : tous les enseignants ayant présenté une thèse et étant passé au grade de maître de conférences de classe « B » ont bel et bien bénéficié d'une prime d'un montant de 8100 DA par mois et non pas de 4300 DA. « Les recteurs ont interprété positivement le décret présidentiel et ont décidé d'attribuer aux enseignants qui ont changé de grade une prime de 8100 DA comme le stipule la nouvelle grille des salaires. Après 29 mois d'application, le ministère de l'Enseignement supérieur réagit et rédige une note non pas pour ordonner le versement de la prime mais pour rappeler le montant de la prime », a regretté un syndicaliste du Conseil national de l'enseignement supérieur (CNES) qui ne comprend pas une telle attitude : « Aujourd'hui, on demande aux enseignants ayant bénéficié d'une prime de 8100 DA de rembourser la moitié de celle-ci avec effet rétroactif à partir de la date de soutenance. Ce n'est pas normal d'autant plus que les collègues ayant soutenu leurs thèses ont le droit à un régime indemnitaire de rang supérieur », a soutenu M. Rahmani, porte-parole du CNES. Les enseignants concernés par cette note estiment que celle-ci a le mérite de révéler que la revendication du CNES concernant la gouvernance est fondée. « Le ministère parle de 8% des établissements ayant mal appliqué le décret présidentiel, il essaye cet argument de justifier l'injustifiable et tente de dédramatiser une faute en avançant un taux aussi bas », a lâché M. Rahmani. Par ailleurs, le CNES s'est réuni et a réitéré son appel aux pouvoirs publics pour un vrai dialogue, à même de prendre en charge sérieusement les revendications de l'ensemble des couches sociales, dans un cadre de concertation et de construction. Réagissant à la décision du ministère, le conseil du CNES a pris acte des répercussions induites par la promulgation de certains régimes indemnitaires sur la finalisation de celui des enseignants chercheurs, dans le sens où cela induit la nécessité de clarifier et renégocier certains aspects techniques dans le cadre de la commission mixte. S'agissant de la révision à la baisse de la prime d'encadrement, le CNES réfute cette procédure et demande au ministre de prendre les mesures nécessaires pour l'annuler. Par ailleurs, le CNES demande au gouvernement de mettre en place des mécanismes de protection du pouvoir d'achat et à ouvrir le débat avec les syndicats autonomes dans ce sens. S'agissant de la question de la gestion et de la gouvernance, le conseil national, tout en notant les derniers changements opérés à la tête de certains établissements universitaires, estime que beaucoup d'efforts restent encore à faire, afin d'éradiquer la gestion domestique et oligarchique ainsi que le « clientélisme » et « l'aârouchia », qui s'installent durablement dans certaines universités, portant inévitablement préjudice à l'ensemble des efforts consentis par les pouvoirs publics et la communauté des enseignants.