L'œuvre d'Assia Djebar, entre transcription et transmission» est le thème d'une journée d'étude animée, la semaine dernière, à la bibliothèque municipale de Larbaâ Nath Irathen, à l'initiative de l'EMEV (Entreprise d'organisation des événements culturel, économique et scientifique). La rencontre s'est penchée sur les romans et les films réalisés par cette femme de lettres, décédée le 6 février 2015 à Paris. Les communications étaient riches et variées, au grand bonheur des amoureux des livres, présents dans la salle. Kamel Bouchama, ancien ministre et auteur, s'est étalé dans son intervention sur le parcours d'Assia Djebar, le contexte socio-politico-culturel de son œuvre, ainsi que les fragments de sa vie rassemblés avec soin et intentionnalité. «La ville de Juba II a donné naissance à cette femme de littérature et de la réflexion. A Paris, les étudiants de l'UGEMA seront suivis par la jeune Fatma Imalayen et ses parents ont été tous versés dans la Révolution. Assia Djebar est un livre ouvert», dira-t-il. Lui succédant, Ahmed Béjaoui, producteur-critique de cinéma et écrivain, a témoigné sur l'expérience cinématographique de Djebar et les grands moments de sa carrière de cinéaste. Il a aussi raconté quelques anecdotes qu'il avait vécues avec la réalisatrice des films La Nouba des femmes du mont Chenoua, en 1978, et La Zerda ou les chants de l'oubli, en 1982. L'ancien animateur de l'émission «Télé ciné club» a souligné que pour comprendre l'œuvre d'Assia Djebar, il faut remonter à la source de son inspiration, qui est sa participation à la lutte de libération. Il a mis l'accent sur le fait qu'elle était marginalisée dans son propre pays. «Le parcours de combattante et de militante d'Assia dans le cinéma fut très riche. Elle fut la première femme en long métrage (…) Le système ne l'aimait pas, étant francophone. Elle eut le Prix de la critique. Le niveau de ses détracteurs était bas et on l'écartera des chemins de production jusqu'à sa mort.» Djoher Amhis-Ouksel, pédagogue, auteure et poétesse, s'est intéressée, de son côté, à la résistance des femmes dans l'œuvre djebarienne. L'intervenante a relevé les aspects de leur claustration et de leur émancipation, et l'importance de la parole dans la survie et l'existence. Elle a déclaré, entre autres : «Cette Tanina du Mont Chenoua s'est envolée et l'encre s'est répandue. La société conservatrice n'a pas laissé de place à la femme, elle la couve et l'empêche de s'émanciper, Assia Djebar prône l'avènement du couple.» Dans le même sillage, la communication de Aziz Namane s'est axée sur le rôle important joué par les femmes pour la sauvegarde de la mémoire collective, à travers la résurgence des voix du passé, définissant ainsi l'écriture de Assia Djebar, ses voies d'emprunt et ses moyens sûrs permettant d'exister salutairement. Hacene Halouane a traité, quant à lui, la question des langues chez Djebar, et à travers le texte La Tunique de Nessus, il a montré le rapport que l'écrivaine entretenait avec la langue française, ainsi que sa position à l'égard de tamazight, sa langue de cœur. L'universitaire, Nadia Sebkhi, a estimé que «voyager jusqu'aux sources, comme savait le faire l'académicienne, est indispensable en ces temps de tous les remous». Dans une déclaration à El Watan, Malek Amirouche, responsable du Café littéraire de Tizi Ouzou et initiateur de cette journée d'étude, s'est dit très satisfait de la réussite de cette journée d'étude. «C'est un challenge relevé grâce à la présence et l'engagement des auteurs, qui ont bien voulu répondre à l'invitation d'une manière désintéressée. Notre objectif à l'avenir est de faire en sorte d'organiser ce genre de rencontres en dehors des enceintes universitaires. Ainsi, on donnera l'occasion au large public, notamment celui des zones montagneuses, d' y assister. Mes remerciements à Aziz Namane pour sa collaboration et au directeur de l'ONDA, Bencheikh Samy El Hocine, qui a toujours accompagné les activités de l'Emev», conclut Malek Amirouche.