L e Pakistan, par la voix de son Premier ministre, Imran Khan, a adopté hier un ton guerrier face à l'Inde, en mettant en garde son voisin contre toute agression dans sa partie du Cachemire. Un territoire montagneux majoritairement peuplé de musulmans pour lequel les deux pays se sont déjà livrés deux guerres. «L'armée pakistanaise dispose d'informations solides selon lesquelles ils ont l'intention de faire quelque chose au Cachemire pakistanais», a déclaré le Premier ministre pakistanais, cité par des médias. «Ils sont prêts et nous allons leur donner une réponse ferme», a-t-il poursuivi lors d'un discours à Muzaffarabad, la capitale du Cachemire pakistanais. «Nous avons décidé que si l'Inde commet une violation, nous nous battrons jusqu'au bout.» Et de soutenir : «Le moment est venu de vous donner une leçon.» De son côté, le chef d'état-major de la puissante armée pakistanaise, le général Qamar Javed Bajwa, a déclaré que ses troupes sont «entièrement prêtes à jouer leur rôle». Le changement de ton est sévère côté pakistanais, alors que le ministre des Affaires étrangères, Shah Mehmood Qureshi, a déclaré jeudi dernier que son pays n'envisage pas l'option militaire. «Nous examinons plutôt des options politiques, diplomatiques et juridiques», a-t-il déclaré, alors que le Premier ministre est fustigé par l'opposition pour sa politique «faite de volte-face». Les tensions entre les deux pays voisins ont atteint leur paroxysme après la décision prise par New Delhi de révoquer, le 5 août, l'autonomie constitutionnelle de la partie du Cachemire qu'elle contrôle et qu'Islamabad revendique. Les nationalistes hindous ont également fait voter par le Parlement la dislocation de la région. Ces mesures, qui visent à placer sous une tutelle plus directe de New Delhi cette région rebelle, ont été qualifiées d'«illégales» par le Pakistan, les deux pays se disputant le Cachemire depuis leur partition en 1947, au terme de la colonisation britannique. Islamabad a jusqu'ici indiqué vouloir porter l'affaire devant le Conseil de sécurité de l' Organisation des Nations unies (ONU) et la Cour pénale internationale. Le Pakistan a également expulsé l'ambassadeur indien et mis un terme au commerce bilatéral. «Espace vital» Depuis le 4 août, le Cachemire indien vit ainsi coupé du monde. Un black-out des communications et de fortes restrictions de circulation ont été imposés par les autorités indiennes. D'après le gouverneur de l'Etat du Jammu-et-Cachemire, le couvre-feu imposé au Cachemire sous contrôle indien sera toutefois assoupli après la Fête nationale de l'indépendance aujourd'hui, même si téléphone et internet resteront coupés. Mardi, un porte-parole du ministère indien de l'Intérieur a indiqué sur Twitter que les restrictions sont «en train d'être allégées de manière progressive» dans le Jammu-et-Cachemire. Dimanche, Imran Khan a comparé l'inaction de la communauté internationale face aux événements se déroulant au Cachemire au silence ayant entouré l'émergence d'Hitler en Allemagne dans les années 1930. «Le couvre-feu, la répression et le génocide imminent des Cachemiris au Cachemire occupé par l'Inde se produit exactement selon l'idéologie du RSS qui s'inspirait de l'idéologie nazie», a-t-il tweeté. Et de s'interroger : «La question qui se pose est : le monde regardera-t-il et se montrera-t-il conciliant comme il l'a été avec Hitler ?» «Je crains que cette idéologie de la suprématie hindoue (…) ne s'arrête pas au Cachemire occupé par l'Inde», a ajouté le Premier ministre pakistanais, évoquant ensuite un «ciblage du Pakistan, qui est pour les suprémacistes hindous ce qu'était le Lebensraum («espace vital», ndlr) d'Hitler». Le RSS, ou Rashtriya Swayamsevak Sangh (Corps des volontaires nationaux), est un mouvement ultranationaliste hindou, que ses détracteurs qualifient de mouvement antimusulman fascisant. Fondé en 1925, le RSS est considéré comme le mentor idéologique du Bharatiya Janata Party (BJP), parti de l'actuel Premier ministre indien, Narendra Modi.