L'acteur français, Tahar Rahim, d'origine algérienne, lauréat de deux Césars 2010 (meilleur espoir et meilleur acteur) pour son époustouflant rôle dans, Un prophète de Jacques Audiard (9 Césars), était à Alger. Il a participé à la projection-débat du film Un Prophète, samedi après-midi, à la salle Cosmos. Vous avez « bluffé » tout le monde dans le film Un Prophète de Jacques Audiard. Vous avez crevé l'écran et total (rôle d'un caïd maghrébin dans le milieu carcéral)… Oui ! Absolument ! Je n'ai jamais espéré avoir un tel rôle et démarrer comme cela. Même dans mes rêves les plus fous et mes nuits les plus folles. (rires). Maintenant que cela m'arrive, je suis très heureux. Et en même temps, j'ai très peur. J'ai tendance à dire que les gens exagèrent autour de tout cela. La galvanisation est un peu trop… Le scénario (idée originale) de Abderaouf Dafri est inespéré… Quand j'ai découvert et lu le scénario original, j'étais comme un fou. J'étais subjugué par l'histoire. Et je me suis dit : « Voilà, enfin un scénario ». Même si je n'avais pas été pris dans le film (Un Prophète), j'aurais été le premier à aller le voir en salle. Donc, je suis très content. La nouveauté dans le ce scénario, il fallait allier différents univers. Et les univers d'Abdel (Abdelraouf Dafri) et Jacques (Audiard, réalisateur), sont un cocktail détonant. Vous avez bousculé l'etablishment du cinéma français et démystifié l'approche du polar de par un nouveau et certain regard… C'est ce que voulait Audiard. Il l'expliquait avant de réaliser le film. Mon cœur s'est arrêté de battre. Il disait qu'il voulait faire « bouger » le casting dans son cinéma et notamment celui français. C'était la première idée motivant sa démarche. En découvrant le scénario d'Abdel (Abdelraouf Dafri), il s'y est retrouvé. Je suis ravi de me retrouver dans cette belle aventure. Vous ne comptez plus pour du « beur »… (Rires). Je dis que c'est légitime. A un moment donné, il faut accepter la réalité du cinéma. C'est la vie de tous les jours. Aussi, il faut pas « ignorer » les Arabes en France. Il faut dire la vérité. Il faut éviter l'idée préconçue et caricaturale des « larbins » ou des gentils. Le réalisateur Jacques Audiard vous a fait confiance… Dans ce projet de film, Un Prophète, Jacques Audiard y a mis son cœur et ses tripes. Il a pris un risque énorme. Pourtant, je n'ai pas fait grand-chose. Moi, je lui en serais reconnaissant toute ma vie de m'avoir fait confiance. C'était un pari fou de sa part. Depuis, vous êtes très sollicité. Vous venez de tourner dans le film américain The Eagle of the Ninth de Kevin Macdonald, un film épique écossais. Vous entamez une carrière internationale… Pour vous dire, cela n'est pas volontaire ou calculé. Je n'ai pas envie de penser à un plan de carrière internationale. Décider un plan futur. C'est se mettre des œillères. Ce n'est pas du tout ce que je veux. Moi, je recherche de l'aventure. Des choses différentes et nouvelles, et continuer à grandir. Ce projet de film The Eagle of the Ninth, est arrivé par hasard, en fait. Racontez… J'ai reçu une demande de casting pour le film The Eagle of The Ninth pour incarner le rôle d'un ancien prince écossais qui parlerait en vieux gaélique. J'étais un peu surpris et je me posais des questions. Un rôle curieux. Alors, j'ai accepté et j'ai passé le casting. Le lendemain, le réalisateur Kevin Macdonald m'appelle, m'annonce qu'il me prend dans son film. Après, on a discuté ensemble du film. L'idée est très charmante que celle d'interpréter un tel personnage. Du coup, là, j'y trouve mon compte. C'est une aventure. Et c'est aussi un risque de me « casser la gueule ». Que répondez-vous à ceux qui vous attendent au tournant, après le succès de Un Prophète ? Justement, je n'aime pas entendre ça. Pourquoi cela dérange. Quand le film sort et que ça commence à aller de mieux en mieux, la fleur se transforme en fusil. Vous allez tournez avec Gérard Depardieu… Oui ! Mais encore… J'ai accepté de tourner dans le film. Ce sera la fin de l'année prochaine. Et le film La Chienne… (Rires). Je viens de finir le tournage. C'est comme Le dernier Tango à Paris ? Non ! C'est différent ! Avec le réalisateur, le film bouge. Il lui ressemble. C'est un bon scénario. Vous aimez les risques… Justement, quand on part à l'aventure, on prend des risques. On espère vous voir bientôt dans un film algérien… Si le scénario me plaît (rires) et que l'aventure est au rendez-vous, oui. Je viendrai tourner en Algérie. Pour moi, il s'agit de cinéma. Quand il y a une symbiose, que tout marche bien et que tout le monde s'entend bien dans un projet, il n'y a pas de raison. Et puis, si cela ne marche pas, tant pis. Je ne regretterai jamais. Qu'est-ce que cela vous fait de revenir en Algérie ? Cela fait 22 ans que ne suis pas venu en Algérie. La dernière fois c'était à Oran dont je suis originaire. Cela me fait énormément plaisir d'être accueilli chaleureusement, dans la rue. Et d'être accepté d'emblée comme si j'étais resté 22 ans, ici. Cela me touche beaucoup. Tout le monde me dit bonjour. Même les « flics ». (rires). On est en plein film.