"Un Prophète ", le film mille fois primé dans les festivals internationaux notamment à Cannes 2009 sera à l'affiche ce samedi à la salle Cosmos de Riad El Feth. Cette projection initiée par le Centre culturel français d'Alger (CCF) aura lieu à 17h en présence de Abdel Raouf Dafri, scénariste du film et Tahar Rahim, premier rôle et également plusieurs fois récompensé. D'une durée de 2h35, ce long métrage est une plongée dans l'univers carcéral, dedans et hors les murs, à suivre l'ascension criminelle d'un jeune homme à la gueule d'ange. Grand Prix du Jury au 62ème Festival de Cannes. Premier prix de la cinquième édition des Globes de Cristal, Un prophète, " c'est une épopée criminelle, comme on en voit plus souvent dans les films américains que dans les français, une de ces histoires qui mènent un moins que rien jusqu'au pouvoir et à la richesse. C'est un thriller, au sens le plus strict du terme : un film qui fait naître des sensations violentes, qui provoque des poussées d'adrénaline, fait peur, révulse et exalte. " Il a plu des distinctions dès sa sortie sur ce film qui a respectivement raflé le César 2010 du Meilleur film ; Meilleur réalisateur ; Meilleur acteur : Tahar Rahim ; Meilleur espoir masculin : Tahar Rahim ; Meilleur scénario original ; Meilleure photographie ; Meilleurs décors ; Meilleur montage. Prix du Jury au 62ème Festival de Cannes. Premier prix de la cinquième édition des Globes de Cristal etc... Tourné avec des inconnus, Un prophète raconte aussi la prise de pouvoir d'une nouvelle génération de comédiens. Parcours en six "gueules" d'un casting réussi. C'est peut-être l'impression la plus violente produite par le nouvel Audiard, Un prophète : on n'y connaît personne. Au cinéma, une prison est rarement fréquentée par des gens connus. Déjà en 1960, Jacques Becker, pour son œuvre ultime, Le Trou - le grand film français sur l'univers carcéral, dont Un prophète est le seul héritier -, avait tenu à choisir des débutants ou des acteurs novices que le spectateur associerait d'emblée avec la prison. Quand Jacques Becker tournait Le Trou, il s'inscrivait dans un autre horizon du cinéma français. Un cinéma de stars, celles de l'après-guerre, auxquelles allaient s'ajouter celles liées à l'émergence de la Nouvelle Vague. Ce cinéma, assis sur un réservoir inépuisable de comédiens, se posait alors la question du casting comme une péripétie, jamais comme un défi. En 2009, l'enjeu du casting se révèle bien plus aigu dans un cinéma hexagonal qui évolue avec un vivier limité d'acteurs et ne semble plus à même de peupler une prison comme Jacques Becker y était parvenu. "Cette histoire de casting est un abîme", estimait Jacques Audiard avant de se lancer dans la production d'Un prophète. Le réalisateur de " Sur mes lèvres " et de " De battre mon cœur s'est arrêté " s'est longtemps demandé comment il allait pallier ce vide et trouver les comédiens, pas seulement des "gueules", qui peupleraient sa prison. Il a fini par trouver une réponse à sa proposition, en conditionnant la réussite artistique de son film à la justesse de ses choix de casting. "J'ai fait d'une expérience professionnelle, une expérience existentielle." Le cinéma criminel américain a régulièrement, du " Scarface " d'Howard Hawks, avec Paul Muni, au " Parrain " de Francis Coppola et la révélation d'Al Pacino, emprunté cette voie où l'ascension d'un gangster, figure centrale de son cinéma, passe par la naissance d'un acteur. Jacques Audiard met en scène une trajectoire comparable, mais de manière plus insidieuse, retenue, secrète, en contrebande, pour des enjeux dont le spectateur ne prend la mesure qu'à la fin du film. Jacques Audiard a trouvé par hasard son acteur principal, Tahar Rahim, en visitant le plateau de "La Commune", la série télévisée située en banlieue diffusée par Canal+. Cette rencontre s'apparente à un coup de foudre, si l'on définit une telle adhésion comme la reconnaissance, par le metteur en scène, de qualités hors du commun, qu'il est le premier à déceler, chez son comédien. Le charisme rentré de Tahar Rahim, son air juvénile, son innocence, un regard très vif, une voix légèrement cassée, une allure transparente alliée à une photogénie hors du commun en font l'acteur rêvé pour incarner, dans Un prophète, ce caïd d'apparence soumis, maîtrisant en fait à la perfection les codes de la prison. D'autres acteurs accompagnent Tahar Rahim - Adel Bencherif, Reda Kateb, Hichem Yacoubi, Slimane Dazi, Jean-Philippe Ricci -, inconnus comme lui et tous impeccables. Ils s'imposent avec une telle évidence qu'on se demande pourquoi on les avait si peu vus auparavant, comme si, au demi-monde de la prison, correspondait un purgatoire des comédiens que le cinéma français devrait plus souvent visiter.